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CHRONIQUES
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18 avril 2024
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Dans cet ouvrage, on retrouve l'élégance d'esprit et la grande culture de l'homme qui avait quitté en 1948 sa Bulgarie natale et choisi la France, abandonnant sa carrière de pianiste pour n'être " que compositeur ".
Un homme qui se voulait farouchement indépendant et qui le prouvera autant par son oeuvre que face à la création musicale de son temps dont il fut le chroniqueur pendant des années. Il déclarait : " L'art est comme l'amour, il ne peut s'épanouir que libre. "
Engagé dans tous les combats d'une génération tumultueuse qui rêvait de révolutions radicales faisant table rase du passé, et les mettait en oeuvre au Domaine Musical ou au Festival de Royan, il revendiquera toujours le droit de prendre ses distances avec les diktats du sérialisme, de l'électronique, et de la plupart des manifestations postmodernes.
En 1970, deux oeuvres lui apportent la célébrité : Ombres (Hommage à Beethoven) pour cordes, et surtout le cycle des Archipels, ces formes ouvertes où le piano et les instruments qui le rejoignent se voient offrit un espace de liberté leur imposant cependant d'opérer des choix à partir de " réservoirs de notes " à leur disposition.
Dans son livre Le Langage musical, il s'en explique : entre la surcharge affective et le fantasme de l'objectivité, il y a une zone que les interprètes doivent labourer sous peine de mort de l'oeuvre. Nombre d'entre eux témoignent dans le livre : Claude Helffer, Idil Biret, Christian Ivaldi, Elisabeth Chojnacka
Amoureux fou de poésie, il compose en 1973 Amers, dédié à Saint-John Perse. Cinq ans plus tard, son opéra Le Nom d'Œdipe créera l'événement au Festival d'Avignon. Au cours des années qui suivront, c'est encore au piano (Concerto, 6 Études d'après Piranèse), à la voix (Lit de neige sur un texte de Paul Ceylan) et au quatuor, qu'il donnera l'essentiel de son oeuvre.
Professeur au Conservatoire de paris, homme de radio, critique musical, essayiste, il était un formidable communicateur et un passeur passionné. On dispose ici de la liste complète de ses livres, de ses principaux articles et de ses entretiens radiophoniques.
Un chapitre essentiel est consacré à l'analyse chronologique de l'ensemble de sa production, assortie d'informations précieuses qui permettent de la mettre en perspective. Un portrait à plusieurs voix, chaleureux, mais sans complaisance, le plus juste qui existe aujourd'hui.
L'Association des amis d'André Boucourechliev publie un CD où l'on retrouve le pianiste Boucourechliev jouant pour un cercle d'amis, dans les années cinquante, la transcription du choral Ich ruf' zu dir de Bach-Busoni, le premier mouvement de la Fantaisie Op.17 de Schumann, et Les Tableaux d'une exposition de Moussorsgky dans la version originale.
Un document légué par celui qui se réclamait de Walter Gieseking dont il avait été le disciple, avouant que ce n'était qu'après la mort de celui-ci qu'il s'était senti libre de changer de peau et de devenir compositeur. On peut se procurer l'enregistrement auprès de l'Association, 14, Rue du Pré-aux-Clercs, 75006 Paris.
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André Boucourechliev (1925-1997)
Alain Poirier
Jean-Pierre Burgart, Martine Cadieu, Jean Ducharme, François Nicolas, Béatrice Ramaut-Chevassus
Éditions Fayard
422 pages, 25 euros |
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