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CHRONIQUES
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26 avril 2024
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Ils brillent toute la saison à Paris, Londres, Moscou ou New York et pourtant, ils se retrouvent tous les trois ans pour ce qui constitue désormais une institution à part entière dans le paysage de la danse classique. « Les plus grands danseurs du monde », le superlatif semblerait galvaudé sans avoir lu le programme à peine croyable des neuf soirées de gala du festival. Le mérite de cette initiative revient à Tadatsugu Sasaki, imprésario japonais d’expérience qui sut rassembler ainsi pendant leurs vacances ces grands interprètes qui se confrontent ainsi comme nulle part au monde.
Prenons ainsi l’un des trois programmes, le programme B. Pas moins de quarante danseurs pour un pas de deux ou un solo. La soirée est découpée en trois tranches généreuses de plus d’une heure. Chaque part alterne des grandes scies du répertoire classique et des duos plus contemporains. Ainsi, on ouvre avec un Tchaïkovski Pas de deux de facture classique avec deux danseurs du Royal Ballet : Marianela Nuñez et Thiago Soares.
S’ensuit un duo plus périssable avec pour thème ambitieux Alexandre le Grand de Ronald Savkovic. Les deux danseurs remarquables, Polina Semionova et Friedeman Vogel, malgré leur plastique parfaite, ne peuvent tirer avantage d’une chorégraphie déjà datée. Mais le clou de cette première partie demeurera le si soviétique Flammes de Paris dans lequel le sémillant Daniil Simkin peut démontrer toute sa virtuosité sans trahir le style de l’œuvre. Le public exulte avant vingt minutes d’entracte chronométré comme tout le spectacle à la seconde près.
En deuxième partie, davantage de grands chorégraphes contemporains défendus notamment par le clan français dans la maturité de son art. L’envoûtement d’abord avec Singerland Pas de deux de William Forsythe avec Agnès Letestu et José Martinez en pleine forme. Il faut venir à Tokyo pour revoir Sylvie Guillem et Nicolas Le Riche interpréter Mats Ek dans le subversif duo de la porte extrait d’Appartement. Enfin, prémices à la saison prochaine de l’Opéra de Paris, un extrait de Bella Figura par Aurélie Dupont et Manuel Legris toujours autant dans leur élément avec Jirà Kylián.
Retour en troisième partie à un répertoire des plus classiques. Dernier petit prodige du Bolchoï, Natalia Osipova s’attaque avec Leonid Sarafanov du Mariinski au Pas de deux du Corsaire. Plus que sa giration, la Russe est stupéfiante par son saut, aussi bien pour l’adage que pour sa variation. Une puissance que bien des hommes lui envieraient, l’ensemble sans perdre une once de féminité. Seul intermède contemporain de cette dernière heure : Brel et Barbara de Maurice Béjart toujours aussi subtilement accompli par les créateurs du rôle : Elisabeth Ros et Gilles Roman.
Puis, avant le final, Esmeralda avec Tamara Rojo et Federico Bonelli. Autant de fouettés double, triple et quadruple en une seule coda ! Le public japonais, d’habitude plutôt stoïque, se lève immédiatement. Passer ainsi de la découverte d’un Mats Ek trop rare à la plus belle pyrotechnie en une soirée, les tokyoïtes continuent à s’arracher les places à prix d’or pour se familiariser à un art qu’ils révèrent.
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