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CHRONIQUES
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28 avril 2024
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Rencontre étonnante pour le concert d’ouverture des Musicales 2014, entre le jeune clarinettiste surdoué Raphaël Sévère et l’illustre Quatuor Pražak qui incarne magistralement depuis 1978 la très ancienne et brillante école des cordes tchèques. D’un côté, toute l’expérience et la maturité de quatre instrumentistes de haut vol, de l’autre, un jeune homme de vingt ans qui est la musique même, la musique vécue, ressentie en profondeur, autant par nature que grâce à une technique acquise.
Car, avant de se mettre à huit ans à la clarinette, Raphaël était déjà initié au piano, au violon et au violoncelle. Lauréat à douze ans de cinq concours internationaux, détenteur depuis l’an dernier d’un master avec mention très bien à l’unanimité du jury au Conservatoire National Supérieur de Paris, ce garçon peu ordinaire rayonne de joie de jouer et la clarinette étant en vedette dans la musique de chambre de Mozart comme dans celle de Brahms, il se retrouve forcément en meneur de jeu dans le groupe de ses vénérables ainés. Mais le talent n’a rien à voir avec l’âge.
Le Quintette en si mineur pour clarinette et cordes op. 115 de Brahms permet à ce bouillant soliste et à ses valeureux partenaires de nous entraîner à leur suite dans le tumultueux univers romantique d’un Brahms lyrique, opulent, expressif en diable. On est aussi touché par les élans de la clarinette et des cordes dans les trois mouvements rapides, voire emportés, que par le chant aux larges phrases généreuses parfois nostalgiques de l’Adagio.
Et quelle sonorité à la fois contrastée et fusionnelle des cordes et de l’instrument à vent ! Même sentiment de plénitude, de jubilation sonore et émotionnelle avec le Quintette en la majeur KV 581 de Mozart, aux couleurs différentes, mais d’une séduction tout aussi absolue.
Le lendemain, c’est au très raffiné Manoir de Soissay, près de la petit ville bien pittoresque de La Perrière, d’accueillir un autre ensemble de chambre, emblématique cette fois d’une nouvelle génération d’interprètes. Les Trio Les Esprits a en effet été fondé voici deux ans par trois anciens lauréats du CNSM de Paris, le pianiste Adam Laloum, la violoniste d’origine coréenne Mia-Sa Yang et le violoncelliste Victor Julien-Laferrière.
Trois personnalités jeunes, attachantes, Laloum, l’un des chefs de file de la nouvelle cohorte de pianistes français internationaux, bénéficiant d’une notoriété individuelle déjà forte, Mia-Sa Yang très expérimentée dans tous les répertoires et Julien-Laferrière, aussi riche à vingt-cinq ans en trophées de toutes sortes que son collègue Sévère l’est à vingt ans. Ils se sont adjoint une autre étoile montante des cordes françaises en la personne de l’altiste Adrien La Marca, révélation soliste instrumental aux dernières Victoires de la Musique Classique, et de la contrebassiste Pénélope Poincheval.
On leur doit de très séduisantes interprétations du Quatuor avec piano en mib majeur KV493 de Mozart et du Quintette la Truite de Schubert, emportés avec enthousiasme, foi et tout le dynamisme d’une jeunesse assoiffée de belle musique. Un léger bémol concernant la Sonate Arpeggione de Schubert jouée ici à la contrebasse. Les versions pour alto ou violoncelle conviennent mieux à cette œuvre qui pâtit d’une sonorité trop uniforme et trop feutrée, engendrant vite une certaine monotonie peu conforme à un univers schubertien aux humeurs si variées.
Deux autres week-ends réuniront maintenant des artistes aussi universellement appréciés que Michael Levinas, Amandine Beyer, Pierre Hantaï, Ophélie Gaillard et Dominique Visse.
Église de Mortagne-au-Perche, samedi 28 juin
Johannes Brahms (1833-1897)
Quintette pour clarinette et cordes en si mineur op. 115
Wolfgang Amadeus Mozart (1756-1791)
Quintette pour clarinette et cordes en la majeur K.581
Raphaël Sévère, clarinette
Quatuor PraĹľak
Manoir de Soissay, dimanche 29 juin
Franz Schubert (1797-1828)
Sonate pour Arpeggione et piano en la mineur D 821
Wolfgang Amadeus Mozart (1756-1791)
Quatuor avec piano en mib majeur KV493
Franz Schubert
Quintette en la majeur pour piano et cordes D.667 « La Truite »
Adrian La Marca, alto
Pénélope Poincheval, contrebasse
Trio Les Esprits
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