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CRITIQUES DE CONCERTS |
01 novembre 2024 |
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Création française de Die tote Stadt à l'Opéra du Rhin.
La ville des morts-vivants
La production de Die tote Stadt (La Ville morte) d'Erich Korngold à l'Opéra du Rhin n'est pas également appréciée par les collaborateurs d'Altamusica. Alors que François Malettra la loue sans réserve, Michel Parouty reste très circonspect sur la transposition chronologique opérée par la mise en scène d'Inga Levant.
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C'est vrai, Angela Denoke et Torsten Kerl mènent au succès ces représentations de Die tote Stadt, assumant crânement des rôles longs et périlleux. Certes, Jan Latham-Koenig fait de louables efforts, et il est certain que, au fil des jours, l'orchestre ne pourra que progresser.
Reste que la mise en scène d'Inga Levant est pour le moins contestable, et semble davantage une interprétation qui se superpose artificiellement à l'oeuvre qu'un véritable point de vue sur l'opéra. On cherche en vain le sens du fantastique qui sourd de chaque page du roman de Georges Rodenbach, et qui prouve que rien n'est plus troublant que la réalité quotidienne lorsqu'un événement infime vient la perturber.
On attend inutilement la réflexion sur le jeu des apparences, sur la fascination morbide pour l'image d'une morte qui pourrait faire de Marietta une soeur aînée de la Madeleine du Vertigod'Hitchcock qui traite exactement le même sujet sinon le même roman. Rien n'empêcherait, d'ailleurs, ces visions complémentaires de coexister. Mais cette Vienne en ruines d'après-guerre, dans laquelle Korngold est un inconnu et le symbole d'un passé révolu, ce Paul qui peine à sortir de son enfance et joue avec une poupée (rien ne prouve, d'ailleurs, qu'il ait aimé une femme, et que le mal qui l'éprouve ne soit pas le produit de son imagination) sonnent comme la condamnation d'un art- celui d'un compositeur qui s'est laissé dévoyer par Hollywood- jugé dépassé.
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Le symbolisme avec lequel joue Inga Levant est souvent lourd, et les images d'Anthony Edwards, passé la surprise du premier acte et quelques fulgurances, s'enlisent dans le grotesque, au point de faire ressembler la procession du Saint-Sang, au troisième acte, à une scène tirée de La Nuit des morts-vivants. L'ironie, ici, ne convainc pas- c'était déjà le cas à l'acte précédent, avec les références aux nonnes du Robert le Diable de Meyerbeer, l'opéra que répètent Marietta et ses amis.
Reste que, malgré tout, la musique résiste, et elle est d'une grande beauté, lyrique et âpre, fascinante et violente, témoin d'un romantisme exacerbé qui n'est sans doute plus de mise aujourd'hui, mais auquel on peut se laisser prendre. On comprend mal, en revanche, que la France ait dû attendre quatre-vingts ans la création scénique d'un ouvrage de cette trempe.
Lire également l'avis plus favorable de Françoise Malettra
Lire aussi la revue de presse
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Opéra du Rhin, Strasbourg Le 12/04/2001 Michel PAROUTY |
| Création française de Die tote Stadt à l'Opéra du Rhin. | Die tote Stadt (La Ville morte)
Opéra en trois actes de Erich Wolfgang Korngold, d'après le roman de Georges Rodenbach " Bruges-la-morte "(l892), crée simultanément à Cologne et à Hambourg, le 4 décembre 192O.
Création scénique en France, à L'Opéra du Rhin, le 12 avril 2001l.
Orchestre Philharmonique de Strasbourg
Choeurs de l'Opéra du Rhin
Direction musicale : Jan Latham-Koenig
Mise en scène : Inga Levant
Avec Torsten Kerk/Norbert Scnmittberg (Paul), Angela Denoke (Marietta), Yuri Batukov (Frank), Birgitta.
Pour ceux qui n'ont pas la possibilité d'aller voir et entendre Die tote Stadt à l'Opéra du Rhin (24,22 et 28 avril) ou à La Filature de Mulhouse (4 et 6 mai), séance de rattrapage à Paris au Théâtre du Châtelet les 14,17 et 21 mai prochains. | |
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