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CRITIQUES DE CONCERTS 01 novembre 2024

Représentation de l'opéra-bouffe Li Zite ‘ngalera de Leonardo Vinci au festival de Radio-France et de Montpellier.

Une galère exquise
© Eric Sebbag

Deux ans après la Cité de la Musique et un coffret radieux chez Opus 111, Antonio Florio a redonné Li Zite ‘ngalera (les Fiancés en galère) de Leonardo Vinci au festival de Montpellier. De la savoureuse cuisine napolitaine qui mélange joyeusement commedia dell'arte, opéra-bouffe et théâtre à intrigues filandreuses.
 

Festival de Radio France et Montpellier, Opéra Berlioz Le Corum,
Le 24/07/2001
Jacques DUFFOURG
 



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  • Si l'intermède La Serva padrona de Pergolesi est passĂ© Ă  la postĂ©ritĂ© comme l'envol du style buffa, en raison de son immense triomphe, il n'en fut pas, loin s'en faut, le crĂ©ateur. Leonardo Vinci, qui fut avec Durante un maĂ®tre de Pergolesi, offrait dix ans auparavant Ă  sa ville de Naples cette comĂ©die, Li Zite n'galera, la seule de ses dix en dialecte napolitain qui ait survĂ©cu ; et couronnĂ©e d'un retentissant succès.

    Neuf chanteurs-acteurs pour dix-sept instrumentistes, en tout et pour tout, ont Ă  dĂ©fendre durant près de trois heures l'essence mĂŞme de la commedia : l'Ă©quivoque. RĂ©sumer l'intrigue est un exercice vain, le but de ce type de pièce Ă©tant moins l'action elle-mĂŞme que sa conduite. On y trouve tous les Ă©lĂ©ments nĂ©cessaires au comique de situation, avec un Ă©cheveau de confusions amoureuses compliquĂ©es Ă  plaisir de rebondissements et querelles.

    Saddumene, le librettiste, ne se prive pas du sel des travestissements croisĂ©s (femme dĂ©guisĂ©e en homme et inversement), Ă  quoi Vinci rajoute le piment des ambiguĂŻtĂ©s vocales (rĂ´le masculin chantĂ© par une femme, et surtout la rĂ©ciproque : irrĂ©sistible dĂ©rivĂ©e d'Arnalta nymphomane, tenue par Giuseppe " Pino "de Vittorio).

    Lorsque les deux duplicitĂ©s se superposent (Roberta Andalò, manière de serviteur un moment revĂŞtu de fĂ©minins oripeaux), on rĂ©alise que Mozart et Strauss n'ont rien inventĂ©. Encore une pincĂ©e de théâtre dans le théâtre (dĂ©jĂ  !), une impayable turquerie (l'arrivĂ©e d'Hassan, la danse ottomane), un langage souvent vert et Ă  double sens, ainsi qu'une dĂ©coupe des scènes ultra-rapide : et l'on obtient le parangon de l'ouvrage composite qui fond des langages connus en un alliage neuf.


    Les notes au diapason de l'action

    Encore faut-il que l'autre langage, celui des notes, rivalise de brio. On n'est guère déçu. Quand l'action fuse de toutes parts, la musique jaillit de même. Si la formule rhétorique dominante est l'aria da capo (air chanté deux fois) que Vinci contribua a formaliser dans ses opere serie, on est loin, très loin, de sa monotone continuité.

    Chacun des trois actes est couronnĂ© d'un finale polyphonique, court mais travaillĂ© Ă  l'extrĂŞme. Entre eux, le compositeur se plaĂ®t Ă  essayer toutes les formules qui courent sous sa plume, c'est-Ă -dire les meilleures : interludes orchestraux, ariosos, rĂ©citatifs accompagnĂ©s, duos ; et un Ă©tonnant et très long trio de rĂ©conciliation (vers la fin de l'acte II) qui oscille sans fin entre l'anxiĂ©tĂ© et la tendresse, mĂŞme Haendel n'a pas fait mieux.

    La simplicité cellulaire des airs (qui ne rime en rien avec indigence) permet un épanchement mélodique constamment renouvelé, que Antonio Florio ordonne et contraste avec un petit effectif (trois vents seulement) toujours spirituel, velouté et caressant. Magnifique accompagnement des scènes (clavecin, archiluth, théorbe, violoncelle
    ), d'une sobre mais inusable variété.

    Si tous les instrumentistes méritent plus qu'un satisfecit, on se régale de surcroît d'une splendide équipe de chanteurs, musiciens accomplis autant que comédiens chevronnés. Seule Maria Ercolano, dans la peau du primo uomo, refroidit quelque peu avec ses aigus frêles et instables. Tous les autres sont à louer sans réserve avec mention spéciale au baryton de Giuseppe Naviglio, deux personnages à lui seul.

    Ne dĂ©pare pas la mise en espace de Christophe Galland, Ă  l'image du reste : lĂ©gère, efficace, caustique. Bref, des galères comme celle-ci, on en redemande.




    Festival de Radio France et Montpellier, Opéra Berlioz Le Corum,
    Le 24/07/2001
    Jacques DUFFOURG

    Représentation de l'opéra-bouffe Li Zite ‘ngalera de Leonardo Vinci au festival de Radio-France et de Montpellier.
    Li Zite ‘ngalera (les Fiancés en galère) de Leonardo Vinci (±1693-1730)
    La Cappella della PietĂ  dei Turchini,
    Direction : Antonio Florio.
    mise en espace de Christophe Galland

    Avec Maria Ercolano, Emanuela Galli, Roberta Invernizzi, Giuseppe de Vittorio, Daniela del Monaco, Rosario Totaro, Roberta Andalò, Giuseppe et Pietro Naviglio

     


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