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CRITIQUES DE CONCERTS |
01 novembre 2024 |
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Version de concert de Béatrice et Bénédict par l'Ensemble Orchestral de Paris sous la direction de John Nelson au Théâtre du Châtelet, Paris.
Dernière flambée berliozienne
Après le triomphe des Troyens en début de la saison, le théâtre du Châtelet récidive avec Béatrice et Bénédict, l'unique opéra-comique de Berlioz, qui met en scène toutes les ambiguïtés du sentiment amoureux. Une production donnée en version de concert, mais élégamment mise en espace par François Le Roux, qui clôt l'année Berlioz sur un pur moment de bonheur.
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Deux couples jouent au jeu de l'amour : amour tendre et amour masqué. D'un côté, Héro et Claudio : ils s'aiment et se le disent. De l'autre, Béatrice et Bénédict, ils ne se supportent pas et le font savoir. Mais lorsqu'on clame si haut que l'on se déteste, il y a tout à parier que l'on s'aime sans vouloir se l'avouer, et que l'on finira un jour par rendre les armes.
C'est là toute l'histoire de ce petit chef d'oeuvre, composé con furia par un Berlioz de cinquante-sept ans, qui, en attendant la création des Troyens, délaisse, le temps d'un divertissement, le grand opéra et la tragédie romantique, en faisant appel une fois encore à Shakespeare, au «&nsbp;grand homme », celui de Beaucoup de bruit pour rien. Il y aura des rires, des larmes vite séchées, des amours consentis et des amours contrariées, et un épisode bouffe dans le plus pur style de la comédie italienne. L'intrigue se noue et se dénoue, faisant se succéder airs, duos, trios, choeurs, tandis que l'orchestre commente avec une légèreté complice, tout en finesse.
Evitant la rigidité de la stricte version de concert, François Le Roux a imaginé une simple mise en espace, où les « entrées » sont réglées avec beaucoup de goût et d'intelligence, libérant le jeu des interprètes qui semblent improviser et y prendre un plaisir fou. Et le charme opère sur un spectacle où passe un grand souffle de jeunesse. Quant aux défections de Anne Sofie von Otter et Ruth Ziesak dans les deux rôles titres féminins, elles n'ont pas empêché de recomposer un plateau proche de l'idéal.
Isabelle Cals est une Béatrice têtue et irrésolue à souhait, qui joue de la richesse d'une tessiture généreuse. On savoure la beauté du timbre et la vocalisation aérienne d'Inva Mula (Héro), tout en douceur et langueur, et le mezzo superbe de la québécoise Marie-Nicole Lemieux (Ursule). Si François Le Roux, qui s'est fait une tête à la Berlioz, est irrésistible dans l'épithalame grotesque de Somarone, et Stéphane Degout (Claudio) aussi séduisant que la brièveté du rôle le lui permet, c'est indiscutablement Paul Groves (Bénédict) qui remporte la palme de la soirée, avec une ligne de chant impeccable, une articulation parfaite (ce qui n'est pas toujours le cas chez les deux premières dames) et un jeu scénique d'un naturel confondant.
La présence de Carole Bouquet en récitante, tantôt joliment sentencieuse, tantôt pleine d'humour, ajoute à la grâce d'un spectacle dont la qualité revient pour beaucoup à John Nelson, à l'Ensemble Orchestral de Paris – qui décidément ne cesse de monter en puissance – et à l'excellent Choeur du Châtelet.
Bref, rien que du bonheur pour cette dernière flambée berliozienne !
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