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CRITIQUES DE CONCERTS |
01 novembre 2024 |
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Récital de Maurizio Pollini au Théâtre du Châtelet, Paris.
Retour aux sources
Schumann, Chopin, ce fut avec ces compositeurs romantiques que l'on découvrit Pollini au disque dans les années 1960. Depuis, ils ne l'ont jamais vraiment quitté, et le pianiste italien ne leur avait jamais donné une telle maturité. Un véritable retour aux sources pour un récital admirable.
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La Fantaisie en ut majeur de Schumann, les Ballades, les Scherzos de Chopin, sont pour les pianistes comme les Symphonies de Beethoven pour les orchestres : c'est à peine si on ose encore les jouer. Et pourtant, quelle jubilation de les entendre, surtout sous les doigts d'un Pollini au pinacle d'une des plus grandes carrières de l'époque ! Tout avait commencé par ce curieux Allegro op. 8 de Schumann, pièce très virtuose et d'une légèreté surprenante, même si sa complexité d'écriture est bien schumannienne. On la connaît peu, perdue entre des oeuvres majeures comme les Papillons ou le Carnaval qui la suivent dans le catalogue des opus. Elle a d'étranges couleurs et une volubilité qui ne sera pas toujours aussi fluide dans les pages ultérieures.
L'approche de Pollini de la grande Fantaisie en ut majeur op. 17 est bien connue. Il ne cesse pourtant de la peaufiner, de l'approfondir. L'entrée du thème dans le premier mouvement est toujours aussi bouleversante, à vous donner le frisson, et le reste se déroule avec une clarté qui rend justice à la multiplicité des plans sonores sans jamais nuire au climat si romantique qui domine. Nous sommes au coeur de cet univers où espoir et angoisse se côtoient sans cesse, mais avec une pudeur que n'auront pas d'autres grands romantiques. La manière dont Pollini bâtit ce monument en en vivant les émotions les plus intimes est purement magistrale.
Moins connu que les Préludes de l'op. 28, le Prélude en ut dièse mineur op. 45 de Chopin est une oeuvre assez élégiaque, qui pourrait être un Nocturne. C'est une belle page pour nous mettre dans l'état d'esprit qui convient afin d'aborder deux Ballades, la troisième et la quatrième. S'appuyant moins sur la diversité possible des couleurs que sur l'énergie qui bouillonne au coeur de ces pages, Pollini les rapproche au maximum de l'élan irrésistible de leurs soeurs littéraire de l'époque, celles des Byron ou des Keats en particulier.
Chevauchées fantastiques freinées de quelques temps de repos, juste pour reprendre son souffle, avant d'être à nouveau emporté dans d'infernales tourbillons de passions ou de guerres. Nouvelle pause dans le rêve de deux Nocturnes, avant de terminer dans la foudroyante virtuosité du Premier Scherzo, doigts magiques, ligne musicale menée d'un seul souffle, une épopée grisante. Et puis, trois bis pour un public en délire, rien que du Chopin, pour prolonger le rêve.
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Théatre du Châtelet, Paris Le 23/06/2004 Gérard MANNONI |
| Récital de Maurizio Pollini au Théâtre du Châtelet, Paris. | Schumann, Chopin
Maurizio Pollini, piano
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