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	| CRITIQUES DE CONCERTS | 
	04 novembre 2025 | 
 
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Nouvelle production de Tristan et Isolde de Wagner mise en scène par Nicolas Joel et sous la direction de Pinchas Steinberg au Théâtre du Capitole de Toulouse.
  
Un Tristan dont on attendait trop 
 Janice Baird (Isolde) et Alan Woodrow (Tristan).
Après une Femme sans ombre qui avait placĂ© la barre très haut, on attendait sans doute trop du Tristan de Nicolas Joel Ă  Toulouse. Jamais indigne, la nouvelle production du Capitole affiche une Janice Baird nettement moins incontestable que dans Strauss, et peine Ă  soutenir l'intĂ©rĂŞt scĂ©nique. L'Orchestre du Capitole se fait alors le principal moteur dramatique.   
		 
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 Découvrant en mars 2004 une Elektra phénoménale, nous n'avions alors pas tari d'éloges sur Janice Baird, voix et physique de tragédienne d'une autre époque. À l'automne dernier dans la Femme sans ombre, on croyait percevoir un certain durcissement du timbre de l'Américaine, imputable à l'endurance assassine et au personnage marmoréen de la Teinturière. Finalement, la voix qu'on imaginait idéale pour les grands Wagner semble nettement moins à son aise dans le caractère plus changeant, la dynamique moins cantonnée au canon à décibels d'Isolde. 
  
En princesse galloise, Baird expose un timbre résolument durci, privé de séduction dès que la voix donne son impressionnant volume. Plus inquiétante est l'usure du bas-médium – très sollicité au I –, qui souvent ne passe plus l'orchestre et laisse présager un véritable trou dans la tessiture. Depuis Elektra, l'instrument s'est alourdi, épaissi, moins habile à alléger, de souffle moins contrôlé, entraînant ce soir un fréquent plafonnement de l'intonation dans les tentatives de nuances – Ungeminnt.  
 
De surcroît, la composition, trop uniment monolithique en raison de l'univocité de l'émission, demeure loin des déchirements, des failles, de l'humanité du personnage. Si la prestation décevante de cette Isolde de glace n'est pas faiblesse d'un soir ou trac de première, elle confirme le danger, même pour des voix de cette envergure, de se limiter à ces seuls emplois de Hochdramatisch. 
 
Malgré une large coupure au II, le Heldentenor Alan Woodrow, d'une belle endurance mais de projection inégale, n'est pas non plus le Tristan idéal. Ligne de chant desservie par quelques ingrates voyelles latérales, le Canadien affiche surtout de considérables problèmes de justesse – les fins de phrases, systématiquement trop basses. Le Kurwenal clair-cuivré d'Oliver Zwarg, un peu vert, parvient quant à lui difficilement à masquer des aigus bien droits.  
 
Une Brangäne et un roi Marke d'anthologie 
 
En revanche, la Brangäne constamment expressive de Janina Baechle, plus fĂ©minine et rayonnante d'harmoniques que sa maĂ®tresse, dispense autant de nuances que de magnifiques envolĂ©es. Le moment dramatique le plus fort reste toutefois le monologue du roi Marke « kolossal Â» de Kurt Rydl, vibrato lâche mais grain noir des grandes basses d'antan qui est Ă  lui seul une prĂ©sence, puissance d'Ă©locution du texte donnant un poids maximal Ă  chaque reproche assĂ©nĂ© Ă  Tristan.  
 
Comme à son habitude, Nicolas Joel privilégie une mise en scène sobre, classique en un sens et non dénuée d'un certain esthétisme – les plates-formes triangulaires mouvantes aux teintes lave, semblables à des plaques tectoniques au I ; le ciel étoilé et les feuilles mortes au II ; le rocher suspendu au III ; la beauté des éclairages nocturnes. Seulement, les enjeux psychologiques sont à peine esquissés, et de longs tunnels dans la direction d'acteurs privent le spectacle d'une lame de fond tragique.  
 
  
 
Quand le théâtre manque sur scène, seul l'orchestre peut alors jouer le rôle de moteur dramatique. Par chance, Pinchas Steinberg confirme dans la fosse qu'il n'est jamais si inspiré qu'à Toulouse. Le vigoureux maestro gratifie les chanteurs du plus beau métier de chef rompu à l'exigence de la scène, laissant le texte s'épanouir et respirer sans jamais enliser le discours, dispensant même ponctuellement une exaltation, une électricité bien au-delà de la routine.  
 
Surtout, il bénéficie du magnifique instrument qu'est l'Orchestre du Capitole, dont les bois apparaissent en état de grâce – la délicatesse des flûtes, le hululement stellaire des clarinettes dans l'hymne à la nuit, la clarinette basse de toute beauté du roi Marke, le cor anglais hypnotique et terriblement désabusé du pâtre – et dont les cordes démêlent l'écheveau chromatique avec un lyrisme admirable. 
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