|
|
CRITIQUES DE CONCERTS |
01 novembre 2024 |
|
Le Voyage d’hiver de Schubert par Werner Güra accompagné au piano par Christoph Berner au Théâtre des Abbesses, Paris.
Un voyage mal organisé
Déception avec cette interprétation du Voyage d’hiver de Schubert au Théâtre des Abbesses par le ténor allemand Werner Güra, chanteur mozartien et rossinien réputé, bien connu aussi comme interprète du Lied. Ni la qualité de la voix ni la manière d’aborder ce cycle complexe entre tous et ingrat pour les ténors n’ont pu convaincre.
|
|
Complicité artistique
Sombre Volga
Hommage au réalisme poétique
[ Tous les concerts ]
|
Il fut Tamino à l’Opéra de Paris il n’y guère longtemps et sa réputation dans le domaine du Lied est solidement établie. Pourtant, ce Voyage d’hiver au Théâtre des Abbesses ne restera pas dans les mémoires comme un grand moment schubertien. Timbre peu agréable et voix raide sauf quand il détimbre ou passe en registre de tête, procédés dont il use et abuse dès qu’il veut chanter piano, Werner Güra n’a sans doute pas raison de s’attaquer à ce cycle qui convient beaucoup mieux aux voix graves.
Même si un Jon Vickers, un Ian Bostridge ou surtout un Christoph Prégardien ont su grâce à leur génie propre en donner des visions personnelles d’une fantastique portée psychologique, poétique, musicale et intellectuelle, ce sont plutôt les Hans Hotter, Theo Adam, Dietrich Fischer-Dieskau, Hermann Prey, Thomas Hampson ou Wolfgang Holzmair qui ont marqué l’interprétation de l’œuvre ces cinquante dernières années.
Le caractère extrêmement sombre, intérieur, visionnaire, psychanalytique même, de ce voyage beaucoup plus intérieur que physique exige une palette de couleurs vocales, une flexibilité d’élocution collant au texte, une variété d’humeurs dans une même logique de désespérance que seuls quelques interprètes peuvent vraiment atteindre.
Ici, nous restons dans une lecture assez linéaire, uniforme, ne pouvant traduire les dimensions quasi surnaturelles de certaines visions, comme celles, entre autres, de Irrlicht (Feu follet), Täuschung (Illusion), des Nebensonnen (Soleils jumeaux) ou du Leiermann (Joueur de vielle).
Trop peu de variété dans les couleurs pour passer du désespoir irrémédiable aux faibles lueurs d’un repos enfin acquis, même si c’est dans la tombe, ou pour traduire cette angoisse ou cette déception qui surgissent toujours au détour des pages amorcées parfois avec de faux airs de gaîté.
L’abus des sons détimbrés en guise de nuance dessert le texte et crée d’artificiels contrastes, toujours les mêmes. Bref, un cheminement qui ne nous a guère conduits dans les profondeurs du subconscient si riche du compositeur. On dira que Werner Güra chante très bien la Belle meunière, mais ce cycle est totalement différent, malgré une certaine similitude de quelques thèmes.
Et puis, ce n’est pas l’accompagnement monochrome et plus rythmique que poétique du pianiste Chrtistoph Berner qui pouvait aider Werner Güra à progresser sur cet itinéraire semé d’embûches.
| | |
|
Théâtre des Abbesses, Paris Le 31/01/2009 Gérard MANNONI |
| Le Voyage d’hiver de Schubert par Werner Güra accompagné au piano par Christoph Berner au Théâtre des Abbesses, Paris. | Franz Schubert (1797-1828)
Winterreise
Werner Güra, ténor
Christoph Berner, piano | |
| |
| | |
|