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CRITIQUES DE CONCERTS |
01 novembre 2024 |
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Concert de l’Orchestre Symphonique de la BBC sous la direction de JiřĂ Bělohlávek, avec la participation de la soprano Karita Mattila au Théâtre des Champs-ÉlysĂ©es, Paris.
Un double état de grâce
Trop longtemps absente des scènes parisiennes, Karita Mattila reçoit un accueil dĂ©lirant du public du TCE. Chantant les Quatre derniers Lieder de Strauss avec une lumineuse franchise, elle remet bien des pendules Ă l’heure, en parfaite osmose avec JiřĂ Bělohlávek, qui offre Ă©galement une Symphonie du Nouveau Monde d’une simplicitĂ© Ă©vidente.
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Alors qu’elle triomphe sur toutes les scènes du monde, Karita Mattila a disparu des opéras de la capitale depuis le départ d’Hugues Gall de l’Opéra de Paris et de Jean-Pierre Brossmann du Châtelet. Le public parisien, lui, n’a pas oublié celle qui a été, entre autres, Lisa de la Dame de Pique et Salomé à l’Opéra Bastille ou Arabella au Châtelet. Chacune des trop rares apparitions concertantes de la soprano finlandaise à Paris est une occasion pour le public de manifester son attachement à l’une des plus charismatiques cantatrices d’aujourd’hui.
La saison dernière, la scène finale de Salomé avec l’Orchestre de Paris et Christophe Eschenbach avait enivré Pleyel. Cette fois, elle transporte le Théâtre des Champs-Élysées avec une autre facette de son art du chant straussien dans les Quatre derniers Lieder.
À la sophistication hédoniste préconisée par beaucoup de chanteuses, d’Elisabeth Schwarzkopf à Renée Fleming, Mattila préfère une approche plus charnelle, plus naturelle, plus expressive aussi dans la mesure où cette saine franchise élimine totalement le côté parfois artificiel, voire chichiteux des visions trop éthérées de ces mélodies, créées par Kirsten Flagstad en 1950 – c’est dire qu’à l’origine, il ne s’agissait pas d’un chant désincarné !
Avec sa voix saine, richement colorée, éclatante, ses aigus flottants, son timbre glorieux et lumineux de véritable soprano straussien – Arabella plus que la Maréchale –, Karita Mattila impose un chant rayonnant et sensuel.
Avec elle, l’émotion vient du naturel des contrastes, d’une sincĂ©ritĂ© gĂ©nĂ©reuse exprimĂ©e autant par le texte que par la musique. Les mĂŞmes qualitĂ©s, surtout un naturel identique, caractĂ©risent la simplicitĂ© de l’accompagnement de JiřĂ Bělohlávek avec un BBC Symphony Orchestra lui aussi en Ă©tat de grâce. Après une Jenůfa miraculeuse au Teatro Real de Madrid en dĂ©cembre 2008, puis Eugène OnĂ©guine au Met en fĂ©vrier dernier, la complicitĂ© entre la soprano et celui qui semble devenu son chef de prĂ©dilection se confirme Ă nouveau.
Visiblement très émue par l’accueil enthousiaste qui lui est réservé, Mattila remercie en français avant d’offrir une « petite chanson de son pays » a cappella. Puis, les acclamations ne tarissant pas, elle balbutie : « je suis folle mais je vous adore », avant d’improviser Plaisir d’amour, faisant chavirer la salle par sa spontanéité.
Le grand public français a dĂ©couvert tardivement Bělohlávek. Un chef peu mĂ©diatisĂ©, ancien directeur musical de la Philharmonie Tchèque, devenu en juillet 2006 celui du BBC Symphony. L’orchestre s’affirme tout au long de la soirĂ©e comme l’une des plus prestigieuses formations britanniques tant au niveau des cordes – magnifique violon solo d’Andrew Haveron – que des cuivres, avec une homogĂ©nĂ©itĂ© sonore d’une rondeur impressionnante.
En authentique chef de théâtre, Bělohlávek n’oublie jamais l’œuvre originale, c’est-Ă -dire Peter Grimes, dans les Quatre interludes marins de Britten, rĂ©unissant les pages symphoniques de l’opĂ©ra, donnĂ©s en ouverture de soirĂ©e. LimpiditĂ©, clartĂ©, mais aussi dramatisme sont donc au rendez-vous, avec un final bouillonnant exprimant la tragĂ©die qui est en train de se dĂ©rouler.
En seconde partie, le chef nous offre un Dvořák Ă la tchèque, non seulement aussi idiomatique que ses Janáček, mais tout simplement irrĂ©sistible. Une Symphonie du Nouveau Monde Ă©tourdissante d’élan, de rythme, colorĂ©e, vibrante, confondante de naturel et d’authenticitĂ©. Tout simplement Ă©vidente.
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Théâtre des Champs-Élysées, Paris Le 21/04/2009 Monique BARICHELLA |
| Concert de l’Orchestre Symphonique de la BBC sous la direction de JiřĂ Bělohlávek, avec la participation de la soprano Karita Mattila au Théâtre des Champs-ÉlysĂ©es, Paris. | Benjamin Britten (1913-1970)
Four sea Interludes
Richard Strauss (1864-1949)
Vier letzte Lieder
Karita Mattila, soprano
AntonĂn Dvořák (1841-1904)
Symphonie n° 9 en mi mineur op. 96 « du Nouveau Monde »
BBC Symphony Orchestra
direction : JiřĂ Bělohlávek | |
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