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CRITIQUES DE CONCERTS 01 novembre 2024

Récital de Murray Perahia dans la série Piano **** à la salle Pleyel, Paris.

Retour aux essentiels
© DR

Dans la multitude de concerts où l’on entend les nouvelles générations de pianistes aux techniques hallucinantes, il est bon de retrouver une soirée où l’on se confronte aux essentiels du vrai grand jeu pianistique. Dans un programme allant de Bach à Chopin, Murray Perahia, ce n’est pas une surprise, est venu rappeler ce que jouer les chefs-d’œuvre du répertoire veut dire.
 

Salle Pleyel, Paris
Le 04/06/2014
GĂ©rard MANNONI
 



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  • Alternant dĂ©couvertes et rendez-vous avec nos vieilles amours, ces sĂ©ries de Piano**** auront marquĂ© en profondeur plusieurs gĂ©nĂ©rations d’interprètes et d’auditeurs. On va au devant d’un nom nouveau la curiositĂ© en Ă©veil et on part retrouver un Perahia comme Ă  des retrouvailles avec un ami de longue date, pour partager avec lui des moments que l’on sait Ă  l’avance aussi riches d’enseignements que de souvenirs.

    Suite française n° 4 de Bach, pour commencer. Une approche intérieure mais menée par un lyrisme discret, bien présent pourtant, comme une ébauche de romantisme encore hésitante. Il y a des couleurs, une vivante mise en exergue des trésors contenus dans tous ces rythmes aux noms de danses, une homogénéité de pensée qui nous conduit à la Gigue finale dans un climat d’une apaisante émotivité que la Sonate Appassionata de Beethoven qui suit parviendra à agiter de toute autre manière.

    Nous sommes là en pleine tempête sous un crâne beethovénien, avec ses interrogations brusquées par des angoisses agressives, ses moments de rêveries pleines d’espoir enchaînant sur d’autres élans de rage ou de terreur. La violence sonore est sous contrôle mais impressionne, que ce soit dans les traits qui déroulent aussi vite que l’éclair mais aussi lumineux ou les trépignements d’accords titanesques du dernier mouvement. Il y a la grandeur de la Cinquième Symphonie, l’intériorité des derniers quatuors et l’amour de bien faire sonner l’instrument. Impressionnant et bouleversant.

    Romantisme d’une autre nature avec les brefs tableaux des Papillons de Schumann, qui se succèdent comme autant de scénettes de lanterne magique. Un grain de folie, une dose de désespoir à peine caché, des élans, quelque insouciance aussi, le tout dans cette démarche à la fois sensible et intellectuelle typique de Schumann. Les doigts ont changé de rapport au clavier depuis l’Appassionata. Ils sont plus caressants, plus ludiques. Mille images scintillent devant nos yeux.

    Pour finir, une leçon de Chopin avec des œuvres très différentes. D’abord la difficile tâche de saisir et de transmettre le climat du Nocturne en si majeur op. 62. Qu’ils sont étranges, ces nocturnes et qu’ils sont de faux amis ! Rien de moins aisé que de leur faire raconter ce qu’ils ont à dire et qu’ils semblent s’efforcer de cacher derrière une écriture faussement simple.

    Perahia nous montre ici comment le contraste souligné entre menus détails, le soin porté à de petits bouts de phrasés aussi importants que les plus généreux développements lyriques, tout cela bâtit un univers aussi abstrait que sensible, entre rêverie et sensations, fugitif mais très actif sur nous, dans l’instant.

    Trois Études viennent ensuite, brossées avec une virtuosité au service de la mise en valeur des sons multiples que peut produire l’instrument, harpe éolienne ou joyeuses clochettes, et pour finir, le généreux Scherzo n° 2, brillante pièce de concert où les multiples approches au clavier proposées sont autant de pièges que Perahia transforme en éléments d’un langage vibrant, communicatif, frappant par sa vérité sans fards .

    Rien que du vrai, de l’essentiel, du piano en profondeur, de la musique majesté.




    Salle Pleyel, Paris
    Le 04/06/2014
    GĂ©rard MANNONI

    Récital de Murray Perahia dans la série Piano **** à la salle Pleyel, Paris.
    Johann Sebastian Bach (1685-1750)
    Suite française n° 4 BWV 815
    Ludwig van Beethoven (1770-1827)
    Sonate n° 23 en fa mineur op. 57 « Appassionata Â»
    Robert Schumann (1810-1856)
    Papillons op. 2
    Frédéric Chopin (1810-1849
    Nocturne en si majeur op. 62 n° 1
    Études op.25 n° 1 et n° 5, op. 10 n° 10
    Scherzo n° 2 en sib mineur op. 31
    Murray Perahia, piano

     


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