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CRITIQUES DE CONCERTS |
01 novembre 2024 |
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Nouvelle production du Comte Ory de Rossini dans une mise en scène de Denis Podalydès et sous la direction de Louis Langrée à l’Opéra Comique, Paris.
Le Comte et sa Comtesse
Avec Le Comte Ory, l’Opéra Comique clôture l’année sur un succès, dû autant au plateau porté par les magnifiques chanteuses Julie Fuchs et Gaëlle Arquez qu’à la direction dynamique de Louis Langrée dans laquelle apparaît tout l’apport de cet ouvrage à l’opéra français. Sans oublier la mise en scène simple mais efficace de Denis Podalydès.
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Lorsque Rossini arrive à Paris, c’est avec le désir de marquer l’opéra et pour composer dès 1825 le Voyage à Reims à l’occasion du couronnement de Charles X. Il a déjà perdu sa capacité à sortir une œuvre inédite en trois semaines, mais il usera toujours lors de reprises en français et dans son avant-dernier opéra sa technique de réutilisation de matériau préexistant.
Ainsi naît le Comte Ory en 1828, largement inspiré du Voyage, même si l’un est encore très italien quand l’autre initie juste avant Guillaume Tell l’opéra français. Après s’être délecté du jeu brut et latin de Giacomo Sagripanti à Barcelone dans Il Viaggio, c’est avec un tout autre plaisir que l’on apprécie maintenant à l’Opéra Comique celui du français Louis Langrée dans le Comte.
Car si ce grand chef mozartien montre dès les premiers accords qu’il sait donner du corps et de la franchise à l’Orchestre des Champs-Élysées, ainsi qu’accompagner avec un rythme toujours précis les airs comme les plus larges ensembles, il retient avant tout l’attention par la couleur donnée à la partition. L’influence du Comte chez Meyerbeer devient alors patente, et avec lui l’ouverture sur tout l’opéra français, déjà initiée par Gluck que l’on reconnaît dans la scène de la tempête, puis développée plus tard par Berlioz, Halévy ou Delibes, mais aussi à des sonorités récupérées ensuite à Paris par Verdi.
Sur le plateau, on chante tout autant français, et la majorité du texte est intelligible dans toutes les bouches. Julie Fuchs surpasse le reste de la distribution par son éclat, sa fraîcheur, son souffle et sa brillance. Elle était Comtesse Folleville dans le Viaggio à Zurich il y a deux ans, elle est encore plus Comtesse ce soir, car là où dans l’italien on lui trouve déjà l’agilité et une gestion des aigus hallucinante, elle présente un chant legato qui correspond encore mieux au français et montre qu’il y a déjà du Lakmé dans son rôle ce soir.
Gaëlle Arquez l’accompagne avec le rôle travesti d’Isolier. La mezzo montre elle aussi un chant agile, d’une superbe souplesse, et son timbre garde une véritable clarté qui ne s’éteint pas même dans le haut de la tessiture. Le Comte Ory de Philippe Talbot paraît face à ces deux merveilles légèrement en retrait, même s’il joue parfaitement son personnage bouffe, travesti d’abord en Prêtre puis en Sœur. Sa partition pleine de pièges lui permet d’atteindre quelques contre-ut.
Bien qu’annoncée souffrante, la Dame Ragonde d’Ève-Maud Hubeaux préserve sa beauté du timbre dans toutes ses interventions. Jean-Sébastien Bou tient un Raimbaud parfaitement caractérisé, homme confident en même temps qu’assuré, juste légèrement en difficulté dans la respiration au II. Le Gouverneur de Patrick Bolleire présente une superbe assise et renforce sa présence dès le premier air, parfaitement tenu sur l’ensemble du spectre, quand la jeune Jodie Devos réussit par sa présence agréable à faire vivre le court rôle d’Alice.
Le chœur Les Eléments fait ressortir des individualités, tout particulièrement lors du Gran Pezzo, tandis que ses membres surjouent les rôles de sœurs ou de soldats, dans une mise en scène de Denis Podalydès simple mais efficace si l’on en juge par les nombreux rires dans l’assemblée. Les décors d’Éric Ruf présentent l’action d’abord dans une église puis dans un couvent, se jouant ainsi de l’ancienne censure parisienne qui avait limité l’accoutrement du Comte à celui d’Ermite plutôt qu’à un véritable prêtre. Les costumes traditionnels de Christian Lacroix ne cherchent pas à dynamiser un livret de Scribe pour lequel il serait risqué de chercher la modernité à tout prix.
On retiendra surtout de ce travail un jeu d’acteur permettant à l’ensemble des chanteurs de donner leur meilleur, et le trio final sur une pierre en forme de lit mortuaire.
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