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CRITIQUES DE CONCERTS |
09 mai 2025 |
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Reprise des Pêcheurs de perles de Bizet dans la mise en scène du collectif FC Bergman, sous la direction de Guillaume Tourniaire à l’Opéra de Lille.
Perles de culture
Cette production des Pêcheurs de perles accoste à Lille en provenance de l'Opéra des Flandres. En faisant le pari de monter un ouvrage au romantisme suranné à un collectif de théâtre contemporain, Aviel Cahn avait misé sur le décalage et le décapant. Le résultat comble nos attentes, malgré une distribution en demi-teinte.
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La renommée des Pêcheurs de perles tient surtout à ses airs célèbres sans que l'auditeur sache au juste d'où ils proviennent. Les mises en scène de l'ouvrage se comptent hélas sur le bout des doigts – la faute à un livret de Michel Carré et Eugène Cormon qui alourdit l'intrigue d'une naïveté narrative et d'un orientalisme hors d'âge.
L'originalité de cette proposition tient essentiellement au travail du collectif théâtral FC Bergman, composé de quatre acteurs/créateurs/artistes : Stef Aerts, Joé Agemans, Thomas Verstraeten et Marie Vinck. Ils ont développé un langage théâtral très personnel qui, outre un côté anarchiste et légèrement chaotique, est avant tout très évocateur et poétique.
Le fil rouge de cette production consiste à faire du passé et du souvenir le motif récurrent qui relie les personnages et guide leur destinée. Rien d'étonnant alors à découvrir cette maison de retraite dans laquelle se déroule la narration, comme lieu physique et projection mentale. Nadir et Zurga se remémorent le passé, parmi les autres pensionnaires.
Avec beaucoup d'humour, les scènes sont ponctuées régulièrement par une série de décès qui occasionnent l'intervention d'une équipe sanitaire chargée d'évacuer les corps dans la chambre mortuaire située à proximité du salon. Installé sur une tournette, le décor montre tour à tour les espaces de la maison de retraite, ainsi qu'une immense vague figée au moment de retomber sur le rivage – une vague que l'on retrouve sur le petit tableau accroché dans la pièce où officient les thanatopracteurs.
Les personnages principaux sont grimés pour qu'apparaisse la différence d'âge avec leurs doubles, incarnés par des figurants plus jeunes, avec le personnage de Nourabad qui ne fait qu'un avec le jeune Zurga. Leïla débarque sur un fauteuil roulant, de toute évidence au crépuscule de son existence au moment de chanter son grand air.
Au cours de son duo avec Nadir, elle retrouvera son corps de jeune fille, déshabillée et pour ainsi dire mise à nu au moment où il déchire son masque de silicone. Le chœur interrompt les ébats et crie au scandale en découvrant les deux amants. Zurga ira cacher sa peine en allant s'allonger dans un des tiroirs de la morgue, image tragique et brutale d'une mort consentie qui met un terme à cette histoire nostalgique.
La distribution fait la part belle aux qualités de Rafal Pawnuk qui campe un Nourabad élégant et double scéniquement le jeune Zurga. Stefano Antonucci n'a hélas qu'une voix assez terne et peu projetée à offrir au Zurga âgé. Sa présence scénique rattrape en partie ces défauts mais l'ensemble reste sous-dimensionné à la prestation de la jeune Gabrielle Philiponet, dont la souplesse et la tenue parviennent à faire de Leïla un personnage émouvant et sensible.
Marc Laho affronte un rôle de Nadir sans parvenir à faire oublier un timbre qui se délite par endroits et des aigus qui blanchissent sous l'effort qui les sous-tend. La célébrissime romance Je crois entendre encore est prudemment amputée de la reprise à l'octave du périlleux Charmant souvenir. Le Chœur de l'Opéra de Lille fait belle impression, dirigé par le geste sûr et vigoureux de Guillaume Tourniaire à la tête de l'Orchestre de Picardie.
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