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CRITIQUES DE CONCERTS 01 novembre 2024

Reprise de Lucia di Lammermoor dans la mise en scène de Andrei Şerban, sous la direction d’Aziz Shokhakimov à l’Opéra national de Paris.

Schizophrénie romantique
© Emilie Brouchon

La Lucia di Lammermoor de Şerban fait partie des rares spectacles qui se bonifient avec les années. Avec des interprètes engagés comme Brenda Rae, Javier Camarena et le jeune Mattia Olivieri, cette pièce gagne en puissance dramatique. Par sa direction attentive et atmosphérique, le chef Aziz Shokhakimov effectue de bien beaux débuts à l’Opéra de Paris.
 

Opéra Bastille, Paris
Le 18/02/2023
Thomas DESCHAMPS
 



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  • En ramenant l’action de Lucia di Lammermoor dans un gymnase de caserne militaire, Andrei Ĺžerban traduit toute la violence des pressions physiques et psychologique subies par l’hĂ©roĂŻne. Le chĹ“ur situĂ© en hauteur de l’arène observe le dĂ©litement de la santĂ© mentale de la jeune femme qui monte pĂ©rilleusement dans les agrès. Si le non-respect des didascalies avait suscitĂ© l’ire du public Ă  la crĂ©ation en 1995, la mise en scène qui a perdu en chemin quelques scories semble aujourd’hui assez classique. Sous l’élĂ©gance des costumes et des dĂ©cors Ă©voquant le XIXe siècle, l’action n’est pas Ă©dulcorĂ©e pour autant et conserve toute sa force Ă©vocatrice. Une distribution solide et Ă©quilibrĂ©e sert au mieux cette reprise.

    Le rôle d’Alisa est bien discret mais Julie Pasturaud lui assure une présence chaleureuse. Normanno veule et détestable, Éric Huchet reprend son personnage avec une cruauté inégalée dans les détails. Thomas Bettinger fait un Arturo impeccable, tandis qu’Adam Palka déploie d’évidentes qualités de timbre et de souffle pour un Raimondo qui ne pèche que dans quelques phrasés indulgents. Mais la sensation du plateau, c’est indéniablement l’Enrico à la présence saisissante de Mattia Olivieri. Si le ramage égale le plumage chez ce baryton déjà expérimenté dont la ligne allie la beauté à la souplesse, il manque à l’acteur un rien d’aisance.

    En ce qui concerne le rôle d’Edgardo, il suffit de chanter et c’est ce que fait de manière solaire Javier Camarena en respectant les nuances de la partition en se gardant de tout effet outrancier dans la colère ou le désespoir. Sa partenaire, Brenda Rae observe elle aussi une tempérance stylistique de bon aloi. D’une voix manquant singulièrement de consistance dans le médium et le bas du registre, elle tire le maximum dans les vocalises et dans l’ornementation des reprises. Ses talents d’actrice emportent tout. De l’ingénuité à la panique, Brenda Rae dispose d’une palette émotionnelle qui fait de sa Lucia schizophrène un portrait très personnel.

    Dans la fosse, Aziz Shokhakimov fait montre lui aussi d’une approche approfondie. Il donne un ton très sombre à cette histoire tragique et accablante. Fort à propos, il n’hésite pas à ralentir certains tempos pour souligner la gravité de la situation. L’opéra y gagne une authentique atmosphère romantique qu’il n’a pas toujours sous d’autres baguettes ne recherchant que la brillance.




    Opéra Bastille, Paris
    Le 18/02/2023
    Thomas DESCHAMPS

    Reprise de Lucia di Lammermoor dans la mise en scène de Andrei Şerban, sous la direction d’Aziz Shokhakimov à l’Opéra national de Paris.
    Gaetano Donizetti (1797-1848)
    Lucia di Lammermoor, drame tragique en trois actes (1835)
    Livret de Salavatore Cammarano d’après La Fiancée de Lammermoor de Walter Scott

    Chœurs et Orchestre de l’Opéra national de Paris
    direction : Aziz Shokhakimov
    mise en scène : Andrei Şerban
    décors et costumes : William Dudley
    Ă©clairages : Guido Levi
    préparation des chœurs : Ching-Lien Wu

    Avec :
    Brenda Rae (Lucia di Lamermoor), Javier Camarena (Edgardo di Ravenswood), Mattia Olivieri (Enrico), Thomas Bettinger (Arturo Bucklaw), Adam Palka (Raimondo Bidebent), Julie Pasturaud (Alisa), Éric Huchet (Normanno).

     


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