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CRITIQUES DE CONCERTS |
24 mai 2025 |
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Nouvelle production du Vaisseau fantôme de Wagner dans une mise en scène de Michel Fau et sous la direction de Frank Beermann au Théâtre du Capitole, Toulouse.
Le Hollandais flottant
Au Théâtre du Capitole, Michel Fau livre au public toulousain une vision du Vaisseau fantôme victime d'une imagerie et d'une direction d'acteurs hors d'âge rappelant rien moins que l’ère de Cosima et Siegfried Wagner à Bayreuth, sauvée en partie par un plateau dominé par le Daland de Jean Teitgen et la Senta d'Ingela Brimberg.
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Le Hollandais flottant
Triomphe romain
Strass et solitude
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Après Ariane à Naxos, Elektra et Wozzeck, Michel Fau revient au Capitole avec un Vaisseau fantôme fermement arrimé à quelques effets visuels et une réflexion dramaturgique à l'étiage. Pour l'essentiel donc, ce sont les décors d'Antoine Fontaine qui forment l'intérêt principal de cette nouvelle production. De hautes structures figurant les vaisseaux des Norvégiens et des Hollandais montent jusqu'aux cintres avec des éclairages qui découpent leurs profils sur fond de toiles peintes imitant les embruns et le ciel tourmenté.
L'autre élément scénographique consiste à signifier par la présence d'un immense et très littéral cadre de scène la thématique du tableau qui obsède Senta en préambule de sa rencontre avec le damné. À la métaphore du Hollandais sortant du tableau succède la symbolique d'un cadre qui se fissure quand se confirme la conclusion tragique avec l'affrontement des deux chœurs et la méprise fatale du duo Erik-Senta. On passera également sur la présence de ce Satan d'opérette, illustrant la malédiction du Hollandais avec son déguisement de papillon noir et sa mise de Savonarole…
Puisant dans un catalogue d'images iconiques vaguement inspiré des premières productions historiques jusqu'aux riches heures du Nouveau Bayreuth, les costumes sont signés Christian Lacroix. Il ne manque pas un ruban ni une dentelle à ce chœur des fileuses en tenues traditionnelles et coiffes hautes devant leur rouet en bois.
De même, la très symbolique tenue noire du Hollandais contrastant avec la veste de brocard et le gilet jaune d'Erik ou l'équipage des spectres couverts de sang tout droits sortis d'un film de Romero. Tout ce beau monde s'agite sur une scène réduite à un étroit proscenium avec une direction d'acteurs aux abonnés absents qui joue sur des alignements et des poses de conventions, bras ouverts, regards courroucés, et une apothéose façon Monty Python serioso.
Le plateau sauve en partie la soirée, dominé par le Daland de Jean Teitgen, excellent de bout en bout par la façon de marier la densité et la profondeur du timbre pour donner au personnage des contours contrastés. Remplaçant Marie-Adeline Henry dans le rôle périlleux de Senta, Ingela Brimberg fait entendre une ligne parfois émaillée de tensions dans le registre aigu mais préservée pour l'essentiel par une technique et une projection qui dessinent un personnage volontaire et sanguin.
À ses côtés, le Hollandais très sonore d'Aleksei Isaev manque sérieusement de nuances, chantant le rôle avec une expressivité linéaire et déprimante (Die Frist ist um). Saluons également le Pilote véhément et engagé de Valentin Thill, la bonne tenue d’Eugénie Joneau en Mary et la vaillance d’Airam Hernández en Erik. Frank Beermann mène l'Orchestre et le Chœur du Capitole avec une intensité souvent aux limites d'une absence de finesse dans les détails, poussant le volume avec une conduite harmonique monolithique.
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