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CRITIQUES DE CONCERTS |
08 juillet 2025 |
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Nouvelle production d’Elias de Mendelssohn dans une mise en scène d’Andreas Homoki et sous la direction de Gianandrea Noseda à l’Opéra de Zurich.
Elias à la gloire du chœur
Point final des treize saisons d’Andreas Homoki à la tête de l’Opéra de Zurich, cette production d’Elias, que le metteur en scène allemand signe lui-même, se distingue grâce à un formidable plateau vocal, qui compense son absence de vision de l’oratorio de Mendelssohn. Maître incontestable de ses forces musicales, Gianandrea Noseda embrase la fosse.
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Treize années durant, le travail de metteur en scène d’Andreas Homoki à l’Opernhaus Zürich, dont il s’apprête à donner les rênes à Matthias Schulz, aura oscillé entre ratages cuisants (La Forza del destino), spectacles tout sauf honteux mais parfaitement oubliables, et quelques réussites, dont le Ring (filmé) marque le point culminant.
Elias, que l’Allemand a choisi pour ses adieux, ne se hisse assurément pas à cette hauteur. Braquer les feux de la rampe sur un oratorio, a fortiori à la narration elliptique, s’inscrit certes dans une volonté d’élargir le spectre du théâtre musical. Mais encore faudrait-il que la proposition scénique donne chair à son potentiel dramatique. Or il n’en est rien.
À la décharge d’Homoki, le souvenir très vif de la vision de Calixto Bieito (Theater an der Wien puis Lyon) ne lui laissait aucun droit à la tiédeur. La clairvoyance saisissante du propos du Catalan sur le rapport de nos sociétés modernes à ses leaders politiques, et aux mensonges qu’ils parviennent, à force de démagogie, à asséner avec l’évidence de leur vérité alternative, ne fait que renforcer l’impression d’être face à une coquille vide. Sans que des costumes censément contemporains ne parviennent à conférer un semblant de relief dramaturgique à l’esthétisme mystérieux – et assumé comme tel – du décor – encore et toujours monté sur tournette – d’Hartmut Meyer.
Face à la foule qui tantôt l’adule, tantôt le rejette, ou en proie à un doute solitaire, au gré de la rotation de panneaux incurvés, le paumé atrabilaire dont Christian Gerhaher porte les vêtements informes n’incarne la parole prophétique du rôle-titre que grâce à un chant à nul autre pareil. Une sorte de Sprechgesang d’avant l’heure, dont la déclamation franche, heurtée parfois, projette une palette expressive d’autant plus inouïe qu’elle refuse à l’âme d’Elias, même le temps, en principe suspendu, de Herr Gott Abrahams, l’apaisement du legato.
Il sera l’apanage de l’Ange, auquel Wiebke Lehmkul prête un timbre et une émission idéalement équilibrés d’alto clair, tandis que le soprano de Julia Kleiter sait insuffler à la pureté instrumentale de la ligne une urgence proprement théâtrale. Si la musicalité poussée jusqu’à l’affectation de Mauro Peter ne le rend audible que par intermittence, de parfaites silhouettes entourent le quatuor des protagonistes – encore qu’une voix blanche soit préférable pour l’Enfant au vibrato apeuré de Sylviane Salamońska.
La dimension opératique de l’ouvrage est décuplée par l’engagement sans faille du chœur – que d’aucuns, trop puristes en vérité, aimeraient ici et là plus transparent et, chez les dames à découvert, surtout, moins vibré. La direction de Gianandrea Noseda participe de cette constante sensation de densité, sans que le Philharmonia Zürich n’écrase jamais le plateau. Le sens supérieur des équilibres du chef italien, dont l’arrivée au poste de Generalmusikdirektor restera comme l’un des événements majeurs du mandat d’Homoki, se traduit aussi dans sa manière de faire ressortir tout ce que la partition de Mendelssohn doit à Bach autant qu’à Haendel, tout en jetant la lumière la plus affûtée sur sa voix singulière.
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