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| CRITIQUES DE CONCERTS |
07 décembre 2025 |
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Nouvelle production de L’Amour de Danaé de Strauss dans une mise en scène de Claus Guth et sous la direction de Sebastian Weigle au Festival de Munich 2025.
Munich 2025 (1) :
La Chute
Claus Guth livre une habile mais parfois triviale adaptation de la fantaisie mythologique imaginée par Strauss et Gregor. La direction de Sebastian Weigle sonne à l’aune de cette conception, tandis qu’une éclatante distribution dominée par le Jupiter souverain de Christopher Maltman et par l’étonnante Danaé de Malin Byström emporte toute réserve.
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Peu de maisons peuvent se prévaloir d’une troisième production du dernier opéra de Richard Strauss. Après la production originelle de Salzbourg (Rudolf Hartmann) aménagée par Jean-Pierre Ponnelle en 1967, puis celle de Giancarlo del Monaco en 1988, l’Opéra de Bavière vient de confier L’Amour de Danaé à Claus Guth. L’adepte d’un Regietheater éclairé se montre prudent face à une œuvre touffue dont on a souvent souligné les faiblesses, en particulier celles imputables au livret verbeux de Joseph Gregor.
Un court prologue expose Danaé en pleine séance de mannequinat sous les flashs des photographes. Le rideau se lève sur le roi Pollux assailli par ses créanciers. Point de palais antique ici mais l’étage d’une tour new-yorkaise contemporaine. La mèche jaune-orangé du flamboyant roi ne laisse aucun doute : nous sommes chez Donald Trump.
Dès lors, Guth peut dérouler avec une grande lisibilité l’histoire : papa voit Midas comme l’occasion de se refaire et fifille ne résiste pas à tout ce qui brille, notamment aux pluies d’or qui se déversent sur elle. Au II, c’est sur un lit king size digne de Mar-a-Lago qu’intervient le quiproquo trivial entre Danaé, Jupiter et Midas, jusqu’au fameux baiser qui transforme en or Danaé. Le dieu accepte de lui rendre forme humaine, mais furieux de la voir lui échapper, prive de son pouvoir son ancien émissaire.
Au III, l’étage de la Trump Tower se trouve dévasté et c’est dans le dénuement que les amants affirment leur passion sans condition. Derrière eux apparaissent des images de Munich en ruines et du vieux Strauss en son jardin de Garmisch. La morale de cette fable du capitalisme sans foi ni loi saute aux yeux, ne manque pas son effet et donne une certaine consistance à cette mythologie joyeuse admirablement servie par une distribution de haut vol.
L’Opéra de Munich aligne dans les rôles secondaires mais très difficiles des quatre rois et des quatre anciennes maitresses de Jupiter d’excellents chanteurs qui portent haut la comédie, en particulier lorsque ces dernières essaient en vain de regagner les faveurs du dieu. Le Mercure doucement sarcastique de Ya-Chung Huang fait mouche et la Xanthe d’Erika Baikoff fait entendre un soprano très musical. Tonitruant au I, le Midas d’Andreas Schager fait d’abord craindre les excès dont il est parfois coutumier. Les nuances qu’il distille ensuite sans jamais détimbrer la voix en paraissent d’autant plus remarquables.
Christopher Maltman fait le plus glorieux et le plus subtil des Jupiter. Il tonne, s’amuse, se vexe et se résigne tour à tour en offrant une qualité d’émission forçant l’admiration. Enfin, la Danaé de Malin Byström dépasse les espérances : la voix a du corps tout en restant extrêmement agile. Il faut voir ici les fruits d’une carrière où la chanteuse conserve ses rôles mozartiens à côté d’emplois plus lourds. Elle offre aussi une belle évolution au personnage, passant de l’écervelée à une très émouvante conscience morale.
Dans la fosse, l’un des plus grands spécialistes de Strauss, Sebastian Weigle, ne déploie pas tout à fait la même subtilité. Sous sa baguette impeccable, l’Orchestre d’État de Bavière brille de mille feux et montre des muscles étincelants au détriment d’un or plus fin et surtout d’un troisième acte qui aurait pu sonner encore plus crépusculaire.
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Nationaltheater, MĂĽnchen Le 22/07/2025 Thomas DESCHAMPS |
 | | Nouvelle production de L’Amour de Danaé de Strauss dans une mise en scène de Claus Guth et sous la direction de Sebastian Weigle au Festival de Munich 2025. | Richard Strauss (1864-1949)
Die Liebe der Danae, mythologie joyeuse en trois actes (1944)
Livret de Joseph Gregor d’après Hofmannsthal
Chœur de l’Opéra national de Bavière
Orchestre d'État de Bavière
direction : Sebastian Weigle
mise en scène : Claus Guth
décors : Michael Levine
costumes : Ursula Kudrna
éclairages : Alessandro Carletti
vidéo : rocafilm
préparation des chœurs : Christoph Heil
Avec :
Malin Byström (Danae), Christopher Maltman (Jupiter), Andreas Schager (Midas), Ya-Chung Huang (Merkur), Vincent Wolfsteiner (Pollux), Erika Baikoff (Xanthe), Sarah Dufresne (Semele), Evgeniya Sotnikova (Europa), Emily Sierra (Alkmene), Avery Amereau (Leda), Paul Kaufmann, Kevin Conners, Bálint Szabó et Martin Snell (Vier Könige). |  |
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