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CRITIQUES DE CONCERTS |
10 aoűt 2025 |
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Reprise du Ring de Wagner dans la mise en scène de Valentin Schwarz, sous la direction de Simone Young au Festival de Bayreuth 2025.
Bayreuth 2025 (1) :
Primum non nocere
Retour au Ring de Valentin Schwarz avec un peu d’appréhension. Si une certaine efficacité avait in fine suscité de l’intérêt lors de la découverte, c’est ici avant tout la direction amorphe de Simone Young qui empêche toute conviction : le spectateur de bonne volonté peut avaler bien des couleuvres sur le plateau, mais l’indigence en fosse reste indigeste à Bayreuth.
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Bayreuth 2025 (3) :
Chaussure Ă son pied
Bayreuth 2025 (2) :
Les Maîtres ringards
Bayreuth 2025 (1) :
Primum non nocere
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Nous relisons avec nostalgie nos réserves de 2023 sur Pietari Inkinen, qui dirigeait minimaliste et épuré, parfois brouillon, pour terminer dans la noirceur. C’est désormais une lourdeur famélique qu’inflige Simone Young. Jamais pourtant nous n’avions imaginé qu’on pouvait rater le Prélude de L’Or du Rhin, la montée au Walhalla, la conclusion orchestrale de Crépuscule. Certes, la Chevauchée des Walkyries, le début du III de Siegfried, même sa Marche funèbre sont d’un équilibre plus délicat.
Mais cette manière épaisse, molle, mal stratifiée (cavalcades de bois surexposées, cuivres pudibonds), de brider toute progression et d’assécher tout climax réussit le tour de force d’avorter les pages les plus évidentes de Wagner, ces moments où sans chef l’orchestre saurait accomplir sa tâche. Primum non nocere (D’abord ne pas nuire), dit-on en médecine… Que penser d’une direction qui crée des problèmes où il n’y en a pas ?
Ajoutons une petite amertume regardant les (naguère) meilleurs chœurs d’opéra du monde. La révolution est en marche : effectifs réduits, recrutement manifeste sur le critère du seul volume ; comment expliquer ce relâchement sensible dans la mise en place, l’intonation, et surtout la fin d’un certain idéal de la diction (« HOgen, wOs tust du? WOs TOtest du? ») ? Notons que la tendance à la consonne crachée et à l’aboiement se retrouve chez nombre de solistes de la Colline, pour un bénéfice discutable sur l’intelligibilité.
N’ergotons pas sur les changements de distribution, saluons les nouveaux-venus Michael Spyres, Siegmund aristocratique, moelleux et clair, Klaus Florian Vogt, Siegfried juvénile et gentil, quitte à renoncer au pathos dans son agonie, Anna Kissjudit, Erda aux immenses moyens, Daniel Behle, Loge malicieux, Christina Nilsson, Freia lumineuse.
Ne boudons pas non plus notre plaisir et notre agacement à réentendre (qualités et défauts à l’identique) les mêmes Wotan, Fricka, Alberich, Fafner, Brünnhilde (Catherine Foster cette fois y compris dans Siegfried), Gunther, Waltraute. Ni quelques nouvelles déconvenues – Mika Kares court d’aigu en Hagen, Gabriela Scherer à la truelle du mauvais goût en Gutrune.
Le spectacle avait à l’origine l’attrait labyrinthique d’une narration où il fallait ne pas se perdre ; passé l’expérience de la désorientation, et sachant où l’on va, on profite davantage de petits détails qu’on n’avait pas le loisir d’observer, mais la stimulation est irrémédiablement perdue.
Ce qui a peut-être le plus souffert des années, c’est la direction d’acteurs, abandonnée, qui aboutit à une mollesse rythmique, un flou dans l’espace, des interactions jamais crédibles. Pas une étreinte, un affrontement, une empoignade, un mouvement de plateau qui semble porté par une vie, une action, une trajectoire authentique – la direction musicale, de nouveau, n’aide pas. Peu de joie également dans les innombrables touches d’humour du metteur en scène qui du coup produisent l’effet d’un sarcasme superficiel.
S’il est vrai que le Regietheater consiste à mettre en scène des concepts, et que par conséquent il laisse la place à une forme d’abstraction, étendant le champ de la convention théâtrale vers encore plus d’invraisemblance que dans la représentation traditionnelle, on peut néanmoins reprocher à Valentin Schwarz de laisser de côté une certaine sève sans laquelle les concepts restent intellectuels et arides. L’œuvre d’art total de Wagner ne mérite-t-il pas qu’on fasse feu de tout bois, même celui du sentiment ?
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Festspielhaus, Bayreuth Le 31/07/2025 Thomas COUBRONNE |
 | Reprise du Ring de Wagner dans la mise en scène de Valentin Schwarz, sous la direction de Simone Young au Festival de Bayreuth 2025. | Richard Wagner (1813-1883)
Der Ring des Nibelungen, festival scénique en un Prologue et trois Journées (1876)
Livret du compositeur
Chor und Orchester der Bayreuther Festspiele
direction : Simone Young
mise en scène : Valentin Schwarz
décors : Andrea Cozzi
costumes : Andy Besuch
éclairages : Nicol Hungsberg
vidéo : Luis August Krawen
préparation des chœurs : Thomas Eitler de Lint
Avec :
Das Rheingold
Tomasz Konieczny (Wotan), Nicholas Brownlee (Donner), Mirko Roschkowski (Froh), Daniel Behle (Loge), Christa Mayer (Fricka), Christina Nilsson (Freia), Anna Kissjudit (Erda), Olafur Sigurdarson (Alberich), Ya-Chung Huang (Mime), Patrick Zielke (Fasolt), Tobias Kehrer (Fafner), Katharina Konradi (Woglinde), Natalia Skrycka (Wellgunde), Marie Henriette Reinhold (FloĂźhilde).
Die WalkĂĽre
Michael Spyres (Siegmund), Vitalij Kowaljow (Hunding), Tomasz Konieczny (Wotan), Jennifer Holloway (Sieglinde), Catherine Foster (BrĂĽnnhilde), Christa Mayer (Fricka), Catharine Woodward (Gerhilde), Brit-Tone MĂĽllertz (Ortlinde), Margaret Plummer (Waltraute), Christa Mayer (Schweirtleite), Dorothea Herbert (Helmwige), Alexandra Ionis (Siegrune), Marie Henriette Reinhold (Grimgerde), Noa Beinart (Rossweisse), Igor Schwab (Grane).
Siegfried
Klaus Florian Vogt (Siegfried), Ya-Chung Huang (Mime), Tomasz Konieczny (Der Wanderer), Olafur Sigurdarson (Alberich), Tobias Kehrer (Fafner), Anna Kissjudit (Erda), Catherine Foster (BrĂĽnnhilde), Victoria Randem (Waldvogel), Branko Buchberger (Der junge Hagen), Igor Schwab (Grane).
Götterdämmerung
Klaus Florian Vogt (Siegfried), Michael Kupfer-Radecky (Gunther), Olafur Sigurdarson (Alberich), Mika Kares (Hagen), Catherine Foster (BrĂĽnnhilde), Gabriela Scherer (Gutrune), Christa Mayer (Waltraute), Noa Beinart (1. Norn), Alexandra Ionis (2. Norn), Dorothea Herbert (3. Norn), Katharina Konradi (Woglinde), Natalia Skrycka (Wellgunde), Marie Henriette Reinhold (FloĂźhilde), Igor Schwab (Grane). |  |
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