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CRITIQUES DE CONCERTS |
22 septembre 2025 |
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Reprise de La Bohème de Puccini dans la mise en scène de Claus Guth, sous la direction de Domingo Hindoyan à l’Opéra national de Paris.
Captain Hindoyan
La funeste opération lune voulue par Claus Guth pour La Bohème continue de dérouter, avec sa temporalité éclatée et sa mélancolie noire. La distribution n’est pas toujours l’illustration la plus convaincante de cette jeunesse sans espoir. La direction de Domingo Hindoyan, un vrai chef de fosse, fait néanmoins tout l’intérêt de cette reprise.
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Captain Hindoyan
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La Bohème selon Claus Guth, l’une des productions parisiennes les plus clivantes de ces dernières années, revient à Bastille pour une deuxième série de reprises. Le temps ne change rien à l’affaire. Ce spectacle intelligent et parfaitement réalisé montrant un Rodolfo cosmonaute en ultime détresse revivant sa jeunesse et la tragédie de son amour pour Mimi, reste largement contre-intuitif. Cette distanciation, ce pas de côté stellaire compliquent diablement les choses à force d’hallucinations concomitantes et contredit souvent la musique avec une assurance déroutante. Ainsi de la scène au café Momus où le passage de Parpignol se transforme en cortège funèbre derrière le cercueil de Mimi.
Indéniablement, la démarche renouvelle radicalement les images de La Bohème pour l’amateur qui assiste à une énième production de cet opéra pivot du répertoire. On songe cependant aux néophytes réputés nombreux à l’Opéra de Paris qui s’enorgueillit à juste titre d’un taux de plus de 50 % de nouveau public chaque saison. Le travail de Guth et de ses collaborateurs aurait toute sa place dans un festival. Dans une maison de répertoire, rien n’est moins sûr : ne faudrait-il pas s’assurer de présenter une lecture plus en phase avec un livret qui n’a rien perdu de ses pouvoirs ? D’autant que la première distribution pour ce début de série s’avère plus solide qu’émouvante.
Et pourtant Charles Castronovo n’a rien d’un chanteur impavide. Il apporte toute sa sensibilité coutumière à son Rodolfo mais la voix se présente désormais meurtrie par la fréquentation de rôles trop lourds. Les aigus en force perturbent la ligne et s’accordent pas avec la jeunesse du héros – du moins dans le livret originel. À ses côtés, la Mimi de Nicole Car offre un chant beaucoup plus stable, même si le duo de la fin du premier tableau la voit rejoindre le ténor dans ses cris. La soprano australienne livre ensuite une prestation impeccable où chaque inflexion parfaitement contrôlée ne laisse pas beaucoup de place aux émotions ni aux affres de la maladie supposée la foudroyer.
Marcello reste l’un des meilleurs rôles du baryton Etienne Dupuis. Il en possède la palette d’expression à la perfection et déploie un legato du plus bel effet. Le Schaunard de Xiaomeng Zhang donne à entendre un chant élégant. Parmi les débutants dans la maison, la Musette d’Andrea Carroll déçoit en raison d’une émission pas toujours franche et d’une incarnation fort générique. En revanche, le Colline d’Alexandros Stavrakakis fait sensation par la beauté de son timbre et l’assurance de son chant.
L’autre grande source de satisfaction vient de la fosse. Sous la baguette de Domingo Hindoyan, l’Orchestre de l’Opéra paraît à son meilleur. Le chef vénézuélien donne une lecture certainement moins brillante que celle de son compatriote Gustavo Dudamel à la création du spectacle mais sous sa direction, la musique possède une fluidité idéale où couleurs et rythmes semblent venir de la mélodie. Surtout, Hindoyan révèle une attention particulière au plateau, aidant les solistes et apportant in fine l’émotion tant attendue.
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Opéra Bastille, Paris Le 17/09/2025 Thomas DESCHAMPS |
 | Reprise de La Bohème de Puccini dans la mise en scène de Claus Guth, sous la direction de Domingo Hindoyan à l’Opéra national de Paris. | Giacomo Puccini (1858-1924)
La Bohème, opéra en quatre tableaux (1896)
Livret de Giuseppe Giacosa et Luigi Illica d’après Scènes de la vie de Bohème d’Henry Murger
Maîtrise populaire de l’Opéra-Comique
Chœurs et Orchestre de l’Opéra national de Paris
direction : Domingo Hindoyan
mise en scène : Claus Guth
décors : Étienne Pluss
costumes : Eva Dessecker
éclairages : Fabrice Kebour
vidéo : Arian Rotemberg
préparation des chœurs : Alessandro Di Stefano
Avec :
Nicole Car (Mimi), Charles Castronovo (Rodolfo), Etienne Dupuis (Marcello), Andrea Carroll (Musetta), Xiaomeng Zhang (Schaunard), Alexandros Stavrakakis (Colline / Benoît), Frank Leguérinel (Alcindoro), Huyn-Jong Roh (Parpignol), Andrés Prunell-Vulcano (Sergente dei doganari). |  |
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