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CRITIQUES DE CONCERTS |
09 octobre 2025 |
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Première à l’Opéra-Comique des Contes d’Hoffmann d’Offenbach dans la mise en scène de Lotte de Beer, sous la direction de Pierre Dumoussaud.
Les Contes n’y sont toujours pas
Le retour des Contes d’Hoffmann sur les lieux de leur création aurait dû être un événement. Déjà vue à Strasbourg en janvier dernier, la production de Lotte de Beer apporte cependant des réponses toujours aussi discutables à des questions inévitables, tandis que la distribution, largement renouvelée, ne convainc qu’à demi.
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Inutile de s’étendre à nouveau sur les choix dramaturgiques de Lotte de Beer, sinon pour déplorer qu’ils soient la cause d’un charcutage de la partition, dont l’absence de version définitive ne devrait pas pousser la liberté de l’interprète jusqu’à la mise en péril de la cohérence de l’ouvrage. A fortiori dans le contexte de son retour espéré sur la scène de l’Opéra-Comique – qui l’a vu naître posthume et tronqué – au terme d’une éclipse de près de trois décennies.
Voilà une occasion manquée de remettre à plat les découvertes musicologiques récentes et de choisir avec discernement parmi des variantes souvent pléthoriques pour établir un matériel aussi exhaustif que possible, dans les limites imposées par la représentation. À quoi bon, de surcroît, opérer un retour, certes naturel en ces lieux, aux dialogues parlés, si c’est pour les réécrire – et d’abord en anglais pour ensuite les traduire – sous la forme d’une pseudo-narration dévolue à la seule Muse au premier acte, puis partagée avec Hoffmann ?
Au bout de ces Contes, il est impossible de déterminer si Lotte de Beer fait le procès de l’œuvre elle-même ou de son protagoniste, du véritable Hoffmann ou de son avatar lyrique, ou encore de tout cela à la fois. L’estocade de la Muse n’en est que plus caricaturalement féministe dans sa volonté de déconstruire la masculinité toxique du poète. Faut-il, dès lors, « annuler » Hoffmann ?
Déjà au pupitre lors de la création du spectacle, Pierre Dumoussaud joue, dans l’acoustique nettement plus favorable de la salle Favart, d’une palette de couleurs et d’accents superbement mise en valeur par l’Orchestre philharmonique de Strasbourg, en même temps qu’il parvient à fluidifier l’alternance entre passages chantés et parlés. Dans la première partie du moins. Avant, donc, de se heurter au curieux assemblage de fragments que demeure l’acte vénitien, dont la densité vire à la confusion.
Des quatre diables ou assimilés, et réduits à une portion plutôt congrue, Jean-Sébastien Bou n’a pas davantage le grave qu’en janvier dernier. Reste la netteté de la diction, qu’il partage non seulement avec un Ensemble Aedes d’une remarquable limpidité, mais aussi avec l’ensemble du plateau.
Y compris Amina Edris, qui se fourvoie absolument dans son triple rôle, à moins que la pulpe du timbre ne se soit déjà définitivement évaporée… Olympia sans étincelle virtuose, Antonia touchante certes, mais indurée, sinon stridente, et Giulietta anguleuse, elle laisse la primauté à la Muse d’Héloïse Mas, investie autant qu’il est nécessaire de l’être pour porter cette dramaturgie à bout de bras, opulente dans le bas du registre, remontée dans le nez dès que la tessiture s’élève.
Mais ne venait-on pas d’abord pour Michael Spyres, tout auréolé du souvenir d’exploits glorieux dans la maison, comme de sa singularité de « baryténor » autoproclamé, désormais engagé dans l’ascension des sommets wagnériens ? Si son Hoffmann conserve, dans le style propre à l’opéra-comique, une clarté aussi irrésistiblement personnelle qu’idiomatique, il tend à s’assécher et grisonne quand l’écriture embrasse un romantisme plus héroïque.
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Opéra Comique - Salle Favart, Paris Le 01/10/2025 Mehdi MAHDAVI |
 | Première à l’Opéra-Comique des Contes d’Hoffmann d’Offenbach dans la mise en scène de Lotte de Beer, sous la direction de Pierre Dumoussaud. | Jacques Offenbch (1819-1880)
Les Contes d’Hoffmann, opéra fantastique en cinq actes (1881)
Livret de Jules Barbier et Michel Carré.
Ensemble Aedes
Orchestre philharmonique de Strasbourg
direction : Pierre Dumoussaud
mise en scène : Lotte de Beer
décors : Christof Hetzer
costumes : Jorine van Beek
éclairages : Alex Brok
réécriture des dialogues et dramaturgie : Peter te Nuyl
Avec :
Michael Spyres (Hoffmann), Héloïse Mas (La Muse / Nicklausse), Jean-Sébastien Bou (Lindorf / Coppélius / Docteur Miracle /Capitaine Dapertutto), Raphaël Brémard (Andrès / Cochenille / Frantz / Pitichinaccio), Amina Edris (Olympia / Antonia / Giulietta / Stella), Sylvie Brunet-Grupposo (Voix de la Mère), Nicolas Cavallier (Luther / Crespel), Matthieu Walendzik (Hermann / Schlémil), Matthieu Justine (Nathanaël / Spalanzani / le Capitaine des sbires). |  |
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