altamusica
 
       aide
















 

 

Pour recevoir notre bulletin régulier,
saisissez votre e-mail :

 
désinscription




CRITIQUES DE CONCERTS 15 octobre 2025

Création mondiale d’Antigone de Pascal Dusapin dans une mise en scène de Netia Jones et sous la direction de Klaus Mäkelä à la Philharmonie de Paris.

Un luxueux désarroi
© Cordula Treml

Le nouvel opératorio de Pascal Dusapin, Antigone, créé à la Philharmonie de Paris, s’offre comme la continuation sans rupture ni novation d’une œuvre au long cours. Ce bel opus est servi avec grand luxe par la mise en scène non invasive de Netia Jones, la direction passionnée de Klaus Mäkelä et un groupe de chanteurs soigneusement choisi.
 

Philharmonie, Paris
Le 07/10/2025
Thomas DESCHAMPS
 



Les 3 dernières critiques de concert

  • Boris prĂ©sumĂ© coupable

  • Les promesses de Theodora

  • Un luxueux dĂ©sarroi

    [ Tous les concerts ]
     
      (ex: Harnoncourt, Opéra)




  • Avec Antigone, figure emblĂ©matique de la tragĂ©die antique, Pascal Dusapin prĂ©sente son douzième opĂ©ra. L’affrontement entre bien moral et bien public conserve son actualitĂ© brĂ»lante. Le compositeur a Ă©laborĂ© lui-mĂŞme son livret Ă  partir de la traduction de la tragĂ©die de Sophocle par Hölderlin. Il a habilement rĂ©duit la pièce mais n’a pas souhaitĂ© traduire le texte allemand du poète.

    Avec ce drame intemporel, Dusapin poursuit l’exploration d’un genre qu’il s’est appropriĂ©, l’« opĂ©ratorio Â», qui remonte Ă  l’Oedipus Rex de Stravinski. Du reste, il n’y a pas de rupture avec ce nouvel opus qui semble reprendre le fil laissĂ© avec un prĂ©cĂ©dent ouvrage antiquisant, Penthesilea. MĂŞmes tensions dans l’orchestre, mĂŞme tempo et mĂŞme mezzo-forte dominant.

    L’oreille retrouve les aplats et nappes de cordes, les mélopées de flûte, les percussions et les soudaines stridences faisant office de scansions. Prélude et interludes montrent un art de l’orchestration à son sommet. En même temps, ce refus de marquer la temporalité fait que l’œuvre ne semble pas vraiment évoluer entre son début et sa conclusion. L’écriture vocale sonne tout aussi dense.

    Dusapin exploite à présent beaucoup mieux la richesse des tessitures, sauf peut-être dans le cas d’Antigone dont le mezzo semble se cantonner dans le bas du registre. Le recours à un contre-ténor pour le Coryphée offre l’un des plus beaux moments de la partition, où le compositeur allège l’accompagnement avec des effets qui semblent se souvenir du Curlew River de Britten. Curieusement, la scène la plus forte ne sort pas des affrontements entre Antigone et Créon, mais de la confrontation du roi de Thèbes avec le devin Tirésias.

    Ce bel ouvrage bénéficie d’une mise en scène sobre de Netia Jones, qui a installé sur une estrade en fond de scène de grands piliers faisant autant office de bordure de palais que d’entrée de grotte ou de tombe. Quelques vidéos abstraites projetées sur ce décor, deux écrans figurant des retransmissions du discours royal suffisent à prouver que la représentation lyrique reste possible dans une salle de concert. La sonorisation discrète confond par son excellence. Dans la fosse créée au parterre, Klaus Mäkelä dirige avec conviction un Orchestre de Paris d’une superbe cohésion et prodigue en couleurs.

    Le luxe de cette création mondiale se trouve parachevé avec la distribution. Certes, la mezzo Christel Loetzsch n’est paradoxalement pas la mieux servie avec le rôle-titre, le compositeur la poussant trop souvent à un parlando restrictif. Face à elle, l’intense Créon de Tómas Tómasson tient la longueur par la solidité de son émission et trouve le juste désespoir dans son effondrement. Du court rôle déchirant d’Ismène, Anna Prohaska tire le meilleur, de même que le jeune Thomas Atkins en Hémon.

    Edwin Crossley-Mercer et Serge Kaludji, respectivement Tirésias et Coryphée, ne sont pas pour rien dans le succès de leur scène. La surprise de la soirée vient avec le rôle du Messager qui se révèle central, entre dénonciation et figure totalement impuissante face à l’implacable tragédie. Le baryton Jarrett Ott incarne le plus pur désarroi résultant de ce conflit à jamais irréductible.




    Diffusion le 29 octobre sur France Musique. Une diffusion vidéo est prévue ultérieurement sur ARTE Concert et Philharmonie Live.




    Philharmonie, Paris
    Le 07/10/2025
    Thomas DESCHAMPS

    Création mondiale d’Antigone de Pascal Dusapin dans une mise en scène de Netia Jones et sous la direction de Klaus Mäkelä à la Philharmonie de Paris.
    Pascal Dusapin (*1955)
    Antigone, opératorio en cinq actes
    Livret du compositeur d’après la tragédie de Sophocle dans la traduction allemande de Friedrich Hölderlin

    Création mondiale

    Orchestre de Paris
    direction : Klaus Mäkelä
    mise en scène, costumes, dispositif : Netia Jones
    vidéo : Lightmap
    éclairages : Éric Soyer
    Avec : Christel Loetzsch (Antigone), Anna Prohaska (Ismène), Tómas Tómasson (Créon), Jarrett Ott (Un messager), Thomas Atkins (Hémon), Edwin Crossley-Mercer (Tirésias), Serge Kakudji (Coryphée).

     


      A la une  |  Nous contacter   |  Haut de page  ]
     
    ©   Altamusica.com