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| CRITIQUES DE CONCERTS |
03 décembre 2025 |
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Reprise de Tosca de Puccini dans la mise en scène de Pierre Audi, sous la direction d’Oksana Lyniv à l’Opéra de Paris.
Le mal dominant
Jonas Kaufmann n’avait plus chanté à l’Opéra de Paris depuis 2021, dans une Aïda pour les seules caméras, et en public depuis 2017. Son retour, pour trois représentations et son premier Cavaradossi sur cette scène, était l’événement d’une longue série de Tosca. A fortiori face au Scarpia de Ludovic Tézier. Qui domine finalement seul une soirée de routine.
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Le mal dominant
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Avec vingt-quatre représentations étalées entre le 23 novembre et le 18 avril prochain, et où se succéderont quatre interprètes pour chacun des trois protagonistes, dans cinq combinaisons différentes, l’Opéra de Paris joue la carte du théâtre du répertoire, qui certes sied à un ouvrage aussi censément populaire que Tosca.
Il est naturel aussi que cette reprise de la production de Pierre Audi soit dédiée à la mémoire de cette figure visionnaire du théâtre lyrique – en tant que directeur plus que comme metteur en scène sans doute – disparue trop tôt, et si subitement, le 3 mai dernier. Il n’est cependant pas certain que ce spectacle rende justice à son art(isanat) irrégulier. Voilà en somme une Tosca conçue pour faire souvent de l’usage, insistante dans sa symbolique architecturale cruciforme, classique dans sa narration, banale dans sa direction d’acteurs, fonctionnelle donc.
L’intérêt de chaque reprise réside dès lors dans la distribution, cette conjonction entre trois titulaires plus ou moins prestigieux et chevronnés des rôles principaux, et à une baguette à l’envergure suffisante pour tenter de renouveler un propos toujours éminemment efficace quoique rabâché. Est-ce le cas en cette soirée qui, sur le papier du moins, aspirait à aligner les astres – mais sur laquelle pesait, depuis quelques jours, la menace d’une grève ? Oksana Lyniv ne se distingue guère au pupitre des chefs qui l’ont ici précédée – pulsation peu affûtée, sens du drame moyen, sonorité redevable à l’orchestre plus qu’à un talent particulier de coloriste. Au suivant – en l’occurrence Jader Bignamini en mars et avril !
Saioa Hernández ne peut donner à l’héroïne que ce qu’elle a. Une bonne voix, assez longue, sonore et solide pour n’être éprouvée, dans une salle aussi vaste, ni par la tessiture, ni par les extrêmes de l’ambitus. Et une lumière tranchante, que ne module toutefois aucune véritable nuance, pas même dans la parenthèse de Vissi d’arte. Prosaïque, l’expression la condamne à rejoindre la cohorte des Tosca sitôt entendues, sitôt oubliées…
Annoncé en Cavaradossi en 2019, Jonas Kaufmann avait alors été contraint de renoncer. Six ans plus tard, force est de constater qu’il est… trop tard. Le ténor star parvient encore, par intermittence, mais sans se hisser à la hauteur de ses fulgurances passées, à offrir à ses groupies ce qu’elles attendent de lui. Un second Vittoria! qui dure et claque, le pianissimo, désormais absolument détimbré, de O dolci baci et tant d’autres idiosyncrasies que le déclin menace de faire basculer du côté du maniérisme. Et si le jeune premier n’est plus, l’aura demeure, bien que le personnage, au I, lorgne le boulevard.
Privilège des voix graves ? À peine plus âgé que son compère, Ludovic Tézier se maintient au zénith de ses moyens. Et réitère son numéro bien rôdé de grand seigneur méchant homme avec une sorte de jouissance narcissique, et formidablement communicative. Qu’importe qu’ici et là , le cabotinage prenne le pas sur la rigueur musicale : sculpté dans un bronze éclatant de noirceur, Scarpia, c’est lui !
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Opéra Bastille, Paris Le 02/12/2025 Mehdi MAHDAVI |
 | | Reprise de Tosca de Puccini dans la mise en scène de Pierre Audi, sous la direction d’Oksana Lyniv à l’Opéra de Paris. | Giacomo Puccini (1858-1924)
Tosca, melodramma en trois actes (1900)
Livret de Giuseppe Giacosa et Luigi Illica d’après Victorien Sardou
Maîtrise de Fontainebleau
Chœurs et Orchestre de l’Opéra national de Paris
direction : Oksana Lyniv
mise en scène : Pierre Audi
décors : Christof Hetzer
costumes : Robby Duiveman
éclairages : Jean Kalman
préparation des chœurs : Ching-Lien Wu
Avec :
Saioa Hernández (Floria Tosca), Jonas Kaufmann (Mario Cavaradossi), Ludovic Tézier (Il barone Scarpia), Amin Ahangaran (Cesare Angelotti), André Heyboer (Il sagrestano), Carlo Bosi (Spoletta), Florent Mbia (Sciarrone), Bernard Arrieta (Un carceriere), Pablo Chagot di Piero (Un pastore). |  |
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