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| CRITIQUES DE CONCERTS |
09 décembre 2025 |
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Reprise de Hänsel et Gretel de Humperdinck dans la mise en scène de Pierre-Emmanuel Rousseau, sous la direction de Christoph Koncz à l’Opéra national du Rhin.
Conte macabre
Donnée pour la première fois face à du public, la production de Hänsel et Gretel selon Pierre-Emmanuel Rousseau, étrennée en streaming pendant la pandémie, souligne le côté obscur des contes enfantins, dans un palais de Rosina Leckermaul aux allures de train fantôme, face à la direction étincelante de Christoph Koncz et un plateau moyen.
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Conte macabre
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Malgré la forêt de parapluies qui ne facilite guère la circulation dans les allées du féerique marché de Noël de Strasbourg, la programmation du conte lyrique de Humperdinck demeure un incontournable dans la cité qui abrite, rue du Chaudron, la Maison de Hanssen & Gretel. C’est pourtant le sous-texte sombre, horrifique même des contes rassemblés par les frères Grimm qui a focalisé l’attention de Pierre-Emmanuel Rousseau – également auteur des décors et costumes, et qui vient saluer en mâchouillant un chewing-gum –, dans sa mise en scène de Hänsel et Gretel inaugurée en 2020 devant les seules caméras.
Un spectacle alternant réalisme de la condition des enfants, qui vivent dans la carcasse d’une caravane, au milieu d’une décharge à peine protégée par un mur de béton éventré, et mangent littéralement dans les poubelles, et atmosphère de cinéma d’épouvante, de Massacres dans le train fantôme de Tobe Hooper pour l’environnement forain aux jumelles de Shining coincées dans une machine à pince, en passant par une Sorcière aux allures de Marlene Dietrich, le visage ravagé façon Freddy Krueger.
Les appétits pédophiles de la Knusperhexe, qui envoie son émissaire dans une forêt minimaliste mais somme toute onirique, sous les doubles traits du Marchand de sable et de la Fée rosée, instillent un vrai climat macabre, avec personnages de cauchemar – squelettes dansants, peluche éviscérée, rat majorette, bêtes de cirque – et chambre de torture dissimulée dans un palais aux rassurantes touches Art nouveau. Malgré une situation un peu confuse dans la scène de séquestration, on déplorera avant tout, dans cette efficace production, une distribution hétérogène.
Principale pierre d’achoppement, la Gretel sans rayonnement de Julietta Aleksanyan, timbre voilé, médium à l’os peinant à passer l’orchestre, air sur l’émission et aigus en force. On n’est guère plus séduit par le Marchand de sable et la Fée rosée pointus de Louisa Stirland, et par la Gertrud bien émaciée de Catherine Hunold.
En revanche, même un peu léger et clair de couleur pour Peter, Damien Gastl propose une déclamation idiomatique qui retient autant l’attention que la Sorcière ténor de Spencer Lang, survolté en scène mais toujours séduisant de timbre. Saluons enfin le Hansel joliment phrasé, fervent et idéalement androgyne de Patricia Nolz, au beau timbre moiré.
Ce petit monde est idéalement porté par la baguette de l’actuel directeur d’un Orchestre national de Mulhouse soigné, Christoph Koncz, ex-chef d’attaque des seconds violons du Philharmonique de Vienne. Le jeune Autrichien, d’une grande élégance du geste, délivre une lecture cursive, crépitante même de l’opéra pour enfants que Wagner n’a jamais écrit, très attentif au rubato, canalisant son plateau sans coup férir – les rattrapages fissa des décalages du Père –, sans la moindre chute de tension.
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