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CRITIQUES DE CONCERTS |
01 novembre 2024 |
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RĂ©cital Roberto Alagna
Roberto Alagna Ă©trenne Gaveau
Les apparitions de Roberto Alagna en France se font rares. Son dernier rĂ©cital parisien fut d'autant plus couru qu'il coĂŻncidait avec la rĂ©ouverture de la Salle Gaveau refaite, non pas Ă neuf, mais Ă vieux : c'est-Ă -dire avec ses atours d'origine. L'un et l'autre n'ont pas déçu le public mais peut-ĂȘtre pas tous les lyricomanes.
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Une fois encore, on a pu mesurer l'impact sur le public d'une voix de ténor. Celle d'Alagna est chaude, vibrante, brillante. En dix ans, elle a beaucoup changé : toujours généreuse, elle s'est élargie, assombrie, s'est encore développée en homogénéité et en puissance, au détriment sans doute de la souplesse.
Mais faut-il vraiment apprĂ©cier le talent et les rĂ©elles qualitĂ©s (dont l'une des plus belles dictions française et italienne qu'on ait jamais entendues n'est pas la moindre) de cet enfant chĂ©ri des lyricomanes Ă l'aune d'un concert ? Car l'artiste, Ă©panoui, heureux de retrouver ses admirateurs, ne se mĂ©nage pas, il se donne mĂȘme Ă fond, et c'est alors la performance qui compte, plus que la musique.
Voici quelques années, il était étonnant dans Donizetti ; aujourd'hui, L'Elixir d'amour et Lucia di Lammermoor sont encore phrasés avec charme, mais la ligne mélodique paraßt moins flexible, parfois surchargée d'effets réalistes inutiles. On sent que les préférences du chanteur vont, comme il l'avait souhaité, vers un répertoire plus lourd, pas seulement le Don José de Carmen (dont curieusement, et contrairement à la partition, il donne le si bémol forte) mais aussi Calaf de Turandot, Eléazar de La Juive, et Canio de Pagliacci- le rire du clown bafoué s'étrangle, l'aigu est impérieux, l'auditoire en redemande et l'on sent, entre Alagna et lui, une immédiate sympathie.
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Les bis sont nombreux, et chansons italiennes ou siciliennes s'imposent aussitÎt. Plus surprenante, la ballade d'Arlequin de Pagliacci, d'ordinaire dévolue au baryton léger qui interprÚte le personnage de Beppe, détaillée avec un sourire rusé qui fait mouche à chaque note ; il est vrai que le récital a commencé par le Deh vieni alla finestra du Don Giovanni mozartien, histoire, sans doute, de montrer qu'un vrai ténor se doit de posséder un registre grave consistant, et que toutes les classifications vocales ne sont que balivernes- il était inattendu, ce Mozart ; on l'eût aimé aussi enthousiaste mais plus raffiné.
Vieux routier au solide mĂ©tier, Anton Guadagno assure la partie orchestrale de la soirĂ©e Ă la tĂȘte d'un Orchestre Lamoureux littĂ©ralement transfigurĂ© par le travail effectuĂ© depuis plusieurs annĂ©es sous la fĂ©rule de Yutaka Sado. L'autre vedette de la soirĂ©e c'est la Salle Gaveau, dont on fĂȘte la rĂ©ouverture aprĂšs sept mois de travaux. Elle a retrouvĂ© sa guirlande de lumiĂšre au ras du plafond, ses couleurs grise et jaune d'origine, accueillantes et reposantes Il lui reste maintenant Ă se refaire une image digne de son histoire.
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Salle Gaveau, Paris Le 08/01/2001 Michel PAROUTY |
| RĂ©cital Roberto Alagna | Roberto Alagna
Orchestre des Concerts Lamoureux, direction Anton Guadagno. | |
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