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CRITIQUES DE CONCERTS 18 avril 2024

Nouvelle production de Tamerlano de Haendel au Théâtre des Champs-Élysées.

Une tamerlongueur de Trevor Pinnock
© Frederick G. Cattroll

Après un Ariodante contesté au Palais Garnier, un Catone décevant à l'Opéra-Comique, voilà que de nouveau l'opera seria se trouvait sur la sellette au Théâtre des Champs-Élysées : Tamerlano de Haendel dans la production attendue de Jonathan Miller, avec les forces de l'English Concert dirigé par Trevor Pinnock.
 

Théâtre des Champs-Élysées, Paris
Le 21/06/2001
Yutha TEP
 



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  • RĂ©pĂ©tons-le : la mise en scène de l'opera seria ne va pas sans susciter maintes questions, en particulier dans les fameux da capo (airs exĂ©cutĂ©s deux fois de suite), qu'aucun scĂ©nographe Ă  ce jour n'a traitĂ© de façon absolument satisfaisante. On peut du moins imaginer un juste milieu entre la surcharge symbolique (parfois totalement incomprĂ©hensible) d'un Lavelli et l'option de Jonathan Miller, d'une sobriĂ©tĂ© qui frise l'atonie.

    Le plateau du Théâtre des Champs-Élysées est presque vide, de grands panneaux aux couleurs dorées ou mates découpant le fond noir, un seul accessoire occupant le centre de ce même plateau : le trône de Tamerlan, symbole d'une autorité absolue et capricieuse, qui pèse de tout son poids sur l'ensemble de l'opéra.

    De chatoyantes couleurs que viennent rehausser de très beaux éclairages. La volonté esthétisante ne fait d'emblée aucun doute, d'autant que les costumes signés Judy Levin sont au diapason, leurs exubérances raffinées s'insérant somptueusement dans les décors. Mais l'exubérance s'arrête là.

    Côté jeu d'acteurs, on trouvera difficilement plus simple : les chanteurs parcourent élégamment la scène, mais avec une économie de gestes qui finit par lasser. Bref, l'ensemble est insuffisant pour traduire les fulgurances de cette histoire d'esclavage et de haine, au point de passer outre à plusieurs reprises les règles traditionnelles de l'opera seria.

    Même la fameuse scène du suicide de Bajazet, dont les paroles sont d'une violence rare, se diluera comme un nuage de lait dans une tasse de thé. Faut-il remercier Jonathan Miller de son attention aux chanteurs ? Certes, aucun n'a à se battre contre le décor ou une gesticulation intempestive, tel que cela fut le cas pour Ariodante au Palais Garnier, chacun se trouvant judicieusement placé sur le devant de la scène pour aborder ses airs.


    Des tempi qui ménagent les chanteurs

    Et l'on perçoit alors le vrai problème de cette production : une scénographie si sobre aurait eu quelques chances de trouver sa justification si elle s'était appuyée sur une distribution éblouissante, ce qui fut loin d'être le cas. On attendait beaucoup de Monica Bacelli en Tamerlan.

    Cette belle chanteuse possède une voix dorée, un chant d'une belle tenue, mais nullement les graves de son rôle, alors même que sa virtuosité pourtant reconnue ne s'inscrit pas tout à fait dans ce que demande le chant haendelien. Elle ne doit son salut, dans le redoutable A dispetto, qu'au tempo raisonnable adopté par le chef.

    Par ailleurs, elle utilise étrangement et abondamment la voix parlée dans ses récitatifs, assurément pour les animer et pour traduire la psychologie tyrannique et névrosée de l'empereur : l'effet n'en reste pas moins dérangeant. Si le chant est un peu plus désordonné (des vocalises fougueuses mais à la justesse approximative, un legato perfectible), sa compatriote, Anna Bonitatibus, apporte par son abattage un relief inattendu dans le rôle un peu ingrat d'Irene, tout comme Antonio Abete, dont la basse profonde rend saisissante sa courte intervention en Leone.

    Le couple d'amoureux n'est guère satisfaisant : Graham Pushee en Andronicus est certes musicien, mais les intentions sont trahies par un timbre peu amène, voire insupportable dans le bas medium, alors qu'Elizabeth Norberg-Schulz ne peut proposer qu'une Asteria monochrome, au timbre assez agréable, homogène mais sans les mille couleurs nécessaires, privée en outre dans les da capo de toute aisance par un sens rythmique approximatif.

    Et Bajazet, sur qui repose la plus grande partie de l'action théâtrale ? La voix barytonnante de Thomas Randle donne une épaisseur appréciable au personnage, même si sa jeunesse, de voix et de physique, contredit quelque peu ses intentions. Ce qui manque cependant, encore une fois, c'est l'intensité, particulièrement dans la scène du poison qui reste l'un des moments les plus virulents de tout l'operia seria.

    À sa décharge, il n'est guère aidé par un Trevor Pinnock au diapason de son metteur en scène : quel dommage qu'il n'ait su mieux utiliser les qualités d'un orchestre magnifique, l'un des meilleurs qu'on ait entendu cette saison au Théâtre des Champs Élysée. De jolies choses donc, là où on attendait du sang et des larmes. Ainsi traité, l'opera seria n'exibe guère que ses longueurs.




    Théâtre des Champs-Élysées, Paris
    Le 21/06/2001
    Yutha TEP

    Nouvelle production de Tamerlano de Haendel au Théâtre des Champs-Élysées.
    Tamerlano de Georg Friedrich Haendel
    opera seria en trois actes sur un livret de Nicola Haym d'après Agostino Piovene
    The English Concert.
    Trevor Pinnock, direction musicale
    Jonathan Miller, mise en scène
    Judy Levin, costumes
    Michael Gunning, Ă©clairages
    Avec Monica Bacelli (Tamerlano), Thomas Randle (Bajazet), Elizabeth Norberg-Schulz (Asteria), Graham Pushee (Andronico), Anna Bonitatibus (Irene), Antonio Abete (Leone).

     


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