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CRITIQUES DE CONCERTS |
18 septembre 2024 |
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Winterreise (Le Voyage d'Hiver) de Franz Schubert dans la mise en scène de Bob Wilson au Théâtre du Châtelet.
Un aller simple
Étrange idée que vouloir mettre en scène des lieder de Schubert, qui plus est avec Bob Wilson aux manettes et une Jessye Norman que l'on attendait assez peu dans ce répertoire. De quoi redouter le pire dans une rentrée parisienne déjà peu avare de " coups médiatiques " (Aïda à Bercy ou Attila à Bastille). Il n'en fut rien.
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Bien sûr, le Voyage d'hiver peut très bien se passer de toute mise en scène ou mise en image. Bien sûr, il est conçu pour une voix d'homme et malgré la prestation magnifique d'une Christa Ludwig, ce sont les barytons qui ont marqué l'interprétation de ces pages, avec aussi l'exception de Jon Vickers.
Malgré tout cela, il était difficile de ne pas être envoûté par le climat de dépouillement visuel et musical de ce spectacle qui est le fruit d'une collaboration étroite entre Jessye Norman, Robert Wilson, et avec la complicité de Pierre Bergé, ex-directeur de l'Opéra de Paris.
De bout en bout, l'entreprise s'est contentée de l'essentiel. Quelques déplacements, quelques gestes sobres mais éloquents, quelques jeux de lumière dont Robert Wilson a le secret, la silhouette épisodique d'un homme en noir, Jessye Norman incarnait à la perfection cette errance à la fois géographique et intérieure, cette série de questionnements angoissés entrecoupés de rares moments de joie.
La voix fragile de la chanteuse, proche parfois d'un " Sprechgesang " (le " parlé-chanté " théorisé par Schœnberg) qu'annonce d'ailleurs ici l'écriture vocale de Schubert, par instants à la limite de la justesse – donc de la fêlure, se prêta idéalement à une interprétation qui ne fut que simplicité dense, concentration expressive, sans la moindre concession pour séduire avec facilité.
En osmose parfaite avec le pianiste Mark Markham (en remplacement de Myung Whun Chung) et avec les images conçues par Wilson, la Norman a embringué son public dans un étrange voyage aux confins de l'univers fantasmagorique de Schubert comme très peu d'interprètes avaient su le faire jusque-là .
Sans aucun doute, l'ensemble constitue un de ces moments d'exception dont aucun disque, ni aucune captation, ne sauraient en reproduire le climat et l'intensité. Grâce ? Magie ? Non, tout simplement un de ces voyages qui demande une réelle volonté pour qui souhaite revenir. Mais le faut-il ?
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Théatre du Châtelet, Paris Le 24/09/2001 Gérard MANNONI |
| Winterreise (Le Voyage d'Hiver) de Franz Schubert dans la mise en scène de Bob Wilson au Théâtre du Châtelet. | Mise en scène, scénographie et lumière de Robert Wilson
Costumes Yves Saint-Laurent
Avec Jessye Norman (soprano) et Mark Markham (piano) | |
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