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CRITIQUES DE CONCERTS |
04 octobre 2024 |
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Nouvelle production de Faust de Gounod Ă Avignon.
Faust diablement ficelé
© Opéra d'Avignon
Entre les goûts du public et la soif d'originalité des professionnels ou de la critique, il y a parfois divorce. Pour le Faust de Gounod que vient de donner l'Opéra d'Avignon, la rupture a été consommée avec les huées qui ont accueilli le metteur en scène Paul-Emile Fourny. Ce dernier n'avait cependant commis aucune entorse au contrat.
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Opéra-Théâtre, Avignon
Le 02/02/2003
Yutha TEP
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Avec l'aide des décors faisant la part belle aux ruines, le Faust vu par Paul-Emile Fourny apporte un captivant point final à sa trilogie Gounod (après Mireille et Roméo et Juliette) à l'Opéra-Théâtre d'Avignon par une vision d'une noirceur étouffante.
Tout baigne dans une pénombre gris-bleu qui veut évoquer un certain univers cinématographique, mais atteint en tout cas une qualité quasi-onirique (ou plutôt cauchemardesque), encore renforcée par des voiles semi-transparents devant ou derrière lesquels évoluent les chanteurs.
Le rouge est la seule couleur qui surnage, en premier attribut de Méphisto (elle éclaire toute la Nuit de Walpurgis) ; elle est aussi la couleur de la chevelure de Marguerite, signe de sa malédiction et de son attachement aux forces infernales.
Tout enténébré, ce Faust marche donc irrémédiablement vers la catastrophe. Les éclopés de la scénographie imaginée Lavelli ont un peu fait école, mais la scène prend ici un relief singulier lorsque l'on voit, dans un Paris placé quelque part sous la Commune, des soldats fusiller froidement plusieurs femmes.
Seule lumière, au final, la mort de Marguerité, mais meurt-elle vraiment ? Ici, Marguerite réapparaît tenant dans ses bras son enfant qu'elle est supposée avoir tué de ses propres mains.
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Distribution en VF
Contrairement à la dernière représentation de Bastille, la distribution est ici presque entièrement française (à l'exception de Ghylaine Girard qui est néanmoins québécoise), se montre fort homogène, avec en particulier des dons d'acteur servant bien la mise en scène.
Furlan/Faust est une voix vaillante (mais pourquoi s'époumoner dans un théâtre de cette taille), cependant, les nuances ne sont pas techniquement son fort.
À l'opposé, Marc Barrard est un Valentin éperdu de lyrisme, de même que sa soeur Marguerite, voix homogène et très sûre, Ghylaine Girard est un peu hésitante au départ, et sa Ballade du Roi de Thulé souffre d'un vibrato un peu serré. Mais le dramatisme croissant du rôle l'échauffe progressivement et elle se délie pour les scènes finales.
De son côté, Christophe Fel campe un Méphisto de haute tenue, aussi jeune d'allure qu'inquiétant ; il possède l'art de projeter les mots jusqu'à les faire tranchants comme des lames, dommage que la fatigue le gagne en fin de représentation.
Sensible et attentionnée, la direction de François-Xavier Bilger est à louer intégralement même si l'on aurait pu imaginer parfois plus de violence. Les choeurs et l'Orchestre Lyrique de Région Avignon-Provence se sont montrés sans reproche. Bonus pour le public, les très longs ballets de la Nuit de Walpurgis, confiés intégralement au soin d'Eric Vu An, et qui ont remporté un triomphe.
Bref, au pays des Papes, ce Faust diablement bien ficelé méritait toutes les indulgences.
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Opéra-Théâtre, Avignon Le 02/02/2003 Yutha TEP |
| Nouvelle production de Faust de Gounod à Avignon. | François-Xavier Bilger, direction musicale
Paul-Emile Fourny, mise en scène
Eric Vu An, chorégraphie
Poppi Ranchetti, décors
Jacques Chatelet, créations lumières
Orchestre Lyrique de RĂ©gion Avignon-Provence
Choeurs de l'Opéra-Théâtre d'Avignon et des Pays de Vaucluse
Ballet de l'Opéra-Théâtre d'Avignon et des Pays de Vaucluse
Avec Jean-Pïerre Furlan (Faust), Christophe Fel (Méphistophélès), Marc Barrard (Valentin), Ghylaine Girard (Marguerite), Caroline Fèvre (Siebel), Anna Steiger (Dame Marthe), Alain Charles (Wagner). | |
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