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CRITIQUES DE CONCERTS |
11 décembre 2024 |
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Reprise de Cosi fan tutte à l'Opéra Garnier, Paris.
Cosi soit-il !
Reprise pour la troisième fois depuis sa création en 1996, voici une production en passe de devenir un classique. Nul besoin de chercher ici ni inquiétudes métaphysiques, ni noirceur, ni ambiguïtés : voici un Mozart de commedia dell'arte, léger, ravissant, à peine nostalgique. Bref, la raison d'un succès public qui ne se dément pas.
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Le splendide décor d'Ezio Toffolutti a gardé tous ses charmes : l'œil se laisse volontiers séduire par cette lagune vénitienne voilée de brume, par ces vivants Giandomenico Tiepolo. Mais on est ici face au travail d'un peintre, fût-il des plus raffinés : quelle catastrophe, en revanche, que la mise en scène ! Si la pétulante Despina de Maria Bayo ne tirait pas de son statisme, à grands efforts (le passage de la « pierre messmérienne » est particulièrement raté, les jeux de scène – indigents – restant en total décalage avec le texte), un vrai quatuor de nigauds, on finirait par se croire au musée
Saluons cependant la performance d'Alessandro Corbelli, véritable acteur lui aussi, qui joue efficacement de ses airs matois et de ses roulades d'yeux. Qu'un vrai metteur en scène réveille le spectacle et fasse un peu bouger notre monde (quand verra-t-on sur les scènes parisiennes une production aussi vive, fine, spirituelle, que celle qu'Emmanuelle Bastet signait, il y a un an, pour le Grand-Théâtre de Bordeaux ?), et tout ira pour le mieux.
Musicalement en effet, la soirée est sans histoire. On regrette certes les formidables mozartiennes Barbara Frittoli et Katarina Karneus (2000), mais Enkeledja Shkosa (Dorabella) a du métier, cela s'entend, et la belle Anja Harteros (Fiordiligi) a de la grâce, même si sa voix, généreuse mais inégale, frôle parfois le désagréable (raucités ponctuelles) pour se maintenir, la plupart du temps, dans une honnête moyenne : belle Micaela il y a eu à Bastille, la soprano américaine n'a pas forcément l'instrumentalité que requiert souvent son rôle. Leurs vis-à -vis, Roberto Saccà (Ferrando) et Russell Braun (Guglielmo), ont un chant sans problèmes, noble et plaisant. La palme allant, ici aussi, au vieux briscard, fin et puissant, Alessandro Corbelli, mais surtout à l'éclatante Maria Bayo, parfaitement à l'aise en Despina et qui, à chacune de ses interventions, réveille de son timbre ensoleillé une salle (et une scène !) quelque peu assoupie.
À la baguette, le vétéran Armin Jordan mène l'orchestre de l'opéra dans ce qui semble être une promenade de santé, sérieuse, classique, irréprochable à défaut d'être inoubliable.
Prochaines représentations les 4, 7, 10, 13, 20, 23, 26 et 28 juin.
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| Le 02/06/2003 Anne-BĂ©atrice MULLER |
| Reprise de Cosi fan tutte à l'Opéra Garnier, Paris. | Cosi fan tutte, opéra de Wolfgang Amadeus Mozart
Direction musicale : Armin Jordan
Mise en scène, décors & costumes : Ezio Toffolutti
Mise en scène réalisée par Christoph Lehnert
Choeur & Orchestre de l'Opéra National de Paris
Avec Anja Harteros (Fiordiligi), Enkeledja Shkosa (Dorabella), Maria Bayo (Despina), Roberto SaccĂ (Ferrando), Russell Braun (Guglielmo), Alessandro Corbelli (Don Alfonso). | |
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