|
|
CRITIQUES DE CONCERTS |
04 octobre 2024 |
|
Ouverture de saison de l'Orchestre National de France au Théâtre des Champs-Elysées.
Le National se rassure
Soirée délibérément germanique pour la rentrée de l'Orchestre National de France. On sent bien que, dans sa volonté de restaurer le prestige de l'Orchestre après des années aventureuses, Kurt Masur ne cesse de lui faire relever des défis, et avec un tel programme, il semble en bonne voie d'y parvenir.
|
|
Lutte des classes
Petits bonheurs au purgatoire
Folle Ă©quipe
[ Tous les concerts ]
|
Si l'ouverture de Tannhaüser sentait un peu la rentrée des classes, avec une certaine brutalité dans la direction et les dérapages de quelques pupitres, elle marquait en revanche l'exceptionnelle qualité des cordes et des bois, signant là le travail de fond réalisé depuis l'arrivée au pouvoir de Masur. On ne se console pas vraiment de la défection de Julia Varady, remplacée au pied levé par la star montante Deborah Voigt. Douée d'une santé triomphante (elle chantait Isolde, la veille, à l'Opéra de Vienne), la soprano américaine possède indiscutablement une grande voix, d'une technique et d'une solidité à toute preuve. Mais il faut bien reconnaître qu'à aucun moment elle n'a réussi à être bouleversante et à transcender la musique pour incarner deux des plus sublimes figures féminines de Wagner. Elle enchaîna l'air d'entrée d'Elisabeth et La mort d'Isolde avec une vaillance et une détermination sans appel, allant jusqu'à annoncer au public (qui lui cria « merci d'avance !) qu'elle entendait bisser l'air d'Elisabeth. Ce qu'elle fit, sans rien changer de sa belle vigueur, dans l'exultation générale.
| | |
Le meilleur était à venir avec la troisième Symphonie d'Anton Bruckner, magistralement dirigée par un Kurt Masur qui excelle dans le décryptage des arcanes d'une oeuvre aussi monumentale. Wilhem Furtwängler disait de Bruckner qu'il était « un mystique gothique égaré dans le XIXème siècle ». Et c'est pourtant, plus encore que l'incontestable importance de sa musique sacrée, ses neuf symphonies qui a assurent aujourd'hui sa postérité. Dédiée à Wagner, la troisième en porte bien peu les traces, sans doute en raison des multiples remaniements dont elle a fait l'objet. Kurt Masur la replace dans toute sa vérité en la faisant bien plus proche de Beethoven dans son ampleur architecturale, et de Schubert dans la tendresse joyeuse des mouvements lents aux allures de ländler. Le chef du National est un bâtisseur, avec quelques chose de fondamentalement attaché à la terre et aux paysages parfaitement découpés. Il brasse la matière sonore avec une obstination et une jubilation sans fin, pour en extraire la substance et l'organiser dans un flux cohérent, sans rien consentir au pur décoratif. Et ce soir-là , la réponse de l'Orchestre fut exactement à la hauteur de l'engagement de son chef : l'adhésion totale d'une grande formation enfin rassurée sur son avenir.
| | |
|
Théâtre des Champs-Élysées, Paris Le 10/09/2003 Françoise MALETTRA |
| Ouverture de saison de l'Orchestre National de France au Théâtre des Champs-Elysées. | Orchestre National de France
Direction : Kurt Masur
Soliste : Deborah Voigt (soprano)
RICHARD WAGNER
Tannhaüser (Ouverture, Entrée d'Elisabeth « Dich, teure Halle », extrait de l'acte II)
Tristan et Isolde (Prélude et mort d'Isolde Mild und Leise wie er lächelt
ANTON BRUCKNER
Symphonie n°3 en ré mineur, dite Wagner Symphonie
(Mehr langsam, misterioso – Adagio, bewegt, quasi andante – Ziemlich schnell – Allegro)
| |
| |
| | |
|