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CRITIQUES DE CONCERTS |
01 décembre 2024 |
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Début du Festival de création musicale « Présences 2004 » à Radio France, Paris.
Présences 2004
Philippe Hersant
Le Festival de création musicale « Présences » joue la carte des pays du nord pour faire escorte à l'invité d'honneur de sa l4e édition, le compositeur français Philippe Hersant, un indépendant, qui se revendique comme tel. Pas de révolution lors du premier week-end, mais un public très concerné, et très interventionniste.
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Continuer de prétendre que le fossé ne cesse de se creuser entre la musique contemporaine et la plus grande partie du public, et qu'elle reste une affaire d'initiés, relève d'une forme de complaisance tenace, et en tout cas d'une courte vue qui voudrait l'accréditer, si l'on en croit précisément le public, toutes générations confondues, qui se pressait à la Maison de Radio France, où le Festival « Présences » donnait vendredi dernier le coup d'envoi de sa quatorzième édition. La gratuité des concerts est, certes, un avantage, mais ne peut être tenue pour une raison nécessaire et suffisante.
Une édition qui fait la preuve que le temps de toutes les « tables rases » et de ses avatars est bien derrière nous, que l'utilisation des technologies avancées reste un outil incontesté à la disposition des créateurs, et non un « passage obligé ». Une programmation dominée par un invité d'honneur, le français Philippe Hersant, et un large coup de projecteurs sur les musiciens du nord, « pour redonner à la musique sa vertu de paysage », écrit le directeur de la musique à Radio France, René Koering.
Vendredi 30 janvier
Le premier week end a montré qu'il s'agissait moins d'une exposition des courants dominants de la création contemporaine, que de la mise en lumière de personnalités, saisies dans leurs oeuvres à un moment déterminant de leur parcours. C'est le cas de Philippe Hersant qui avoue s'être aujourd'hui réconcilié avec son destin de compositeur, après des années d'interrogations, et de voyages à l'intérieur du continent musical nourri par des siècles de musique. En acceptant la fascination du passé et de son terreau fertile, en refusant de répudier l'attraction tonale, mais en la revivifiant quand elle participe de l'écriture, il n'a pas choisi la voie la plus facile : « je n'arrive à travailler qu'à travers le filtre du souvenir, comme Fellini » déclare-t-il.
Même si son concerto pour piano, Streams, passionnément servi par une interprète de grande classe, Alice Ader, mériterait d'être resserré dans sa partie médiane, il délivre de très belles images : de l'ostinato furioso du piano, accentué par les couleurs sombres de l'orchestre, au tout début de la pièce, aux longues coulées des cordes comme des éclaircies passagères, jusqu'au lent cheminement labyrinthique vers le final.
Si Hersant, dans l'ensemble, sait toujours convaincre, les musiciens du Nord, en revanche, ont dans l'ensemble plutôt déçu. Malgré la qualité d'une écriture chorale qu'ils maîtrisent par tradition, on sent les faiblesses d'une expérimentation musicale parfois hasardeuse, dans la relation voix/instruments, visant souvent à la séduction en soi.
Il ne manquait pas aux invités scandinaves la présence tutélaire d'un de leur grand compatriote, celle du danois Carl Nielsen (1865-1931), dont la centenaire et tellurique Sinfonia espansiva allait être exécutée, à l'issue du premier concert, avec une énergie impressionnante par l'Orchestre de Radio Danoise, sous la direction particulièrement enflammée de son chef Thomas Dausgaard.
Samedi 31 janvier
Chez les nordiques, toujours la même grisaille, et seule la pièce de Karin Rehqvist, Lumière, source de lumière, dédiée à Anna Lindh, la ministre suédoise des affaires étrangères assassinée en septembre 2003, retient l'attention par ses sonorités arachnéennes, ses voix aériennes, entre imploration et déploration.
Retour à Philippe Hersant, dont le Concerto pour violon est une pièce d'un seul tenant qui selon le compositeur « tient plus de la rêverie que du morceau de bravoure ». Et pourtant, on reste souvent extérieur à cette méditation poétique. On s'intéresse plus au jeu subtil entre le soliste et l'orchestre, qui cède à un effet de polarisation autour du même motif, traité en une suite de variations raffinées, jusqu'à l'impressionnante cadence finale qui donne priorité au soliste. Et l'on doit saluer l'engagement d'Augustin Dumay, et l'excellence d'une interprétation que l'on voudrait voir plus souvent au service de la musique d'aujourd'hui.
Quarante minutes de déferlante sonore
On attendait beaucoup de la création d'Athanor de Guillaume Conesson : quarante minutes d'une déferlante sonore, défendue avec ardeur et conviction par l'Orchestre National de France et un chef indiscutablement l'un des meilleurs de sa génération, Jonathan Darlington. Plus qu'une cantate sur un poème de Milosz et des textes d'alchimistes grecs et latins, l'oeuvre a l'allure d'une symphonie de psaumes ou d'un oratorio à l'antique revisité, avec deux voix solistes peinant à émerger d'une masse orchestrale et chorale surdimensionnée.
Dans Athanor, le fourneau de l'alchimiste d'où l'or pur doit jaillir, Guillaume Conesson a rassemblé des musiciens où l'on reconnaissait au passage Carl Orff, Stravinsky, Roussel, Honegger, emportés dans une exaltation générale qui ne cède pas d'un bout à l'autre de l'oeuvre. Reste qu'offrir à un jeune compositeur un tel plateau est rare, et l'exposer au public de « Présences » parfaitement légitime. La dure loi des risques partagés était respectée. A cet égard, la sanction de la salle, entre applaudissement et vindicte, fut éloquente.
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Salle Olivier Messiaen - Maison de la Radio, Paris Le 31/01/2004 Françoise MALETTRA |
| Début du Festival de création musicale « Présences 2004 » à Radio France, Paris. | Vendredi 30 Janvier
Sunleif Rasmussen (*1961)
La nuit éplorée, pour choeur d'enfants et orchestre (2003)
Choeur de la Radio danoise
direction : Michael Bojesen
Création mondiale
Karin Rehnqvist (*1957)
A l'ange aux mains brûlantes, pour hautbois et choeur (2000)
Max Artved (hautbois)
Création française
Philippe Hersant (*1948)
Streams, pour piano et orchestre (2000)
Alice Ader (piano)
Carl Nielsen (1865-1931)
Symphonie n°3, « espansiva », pour soprano, baryton et orchestre, Op. 27 (1911)
Ditte Andersen (soprano)
Michael Lindberg (baryton)
Orchestre de la Radio danoise
direction : Thomas Dausgaard
Samedi 31 janvier
Karin Rehnqvist (*1957)
Lumière, source de lumière, pour choeur d'enfants et orchestre (2003)
Adolf Friedriks Flickkör, Suède
direction : Bo Johansson
Création mondiale
Juhani Komulainen (*1953)
Mysterium, pour choeur d'enfants et orchestre (2003)
Oulaisten Nuorisokuoro (Finlande)
direction : Tapani Tirilä
Maîtrise de Radio France
direction : Toni Ramon
Création mondiale
Philippe Hersant (*1948)
Concerto pour violon (2003)
Augustin Dumay, violon
Création mondiale
Guillaume Connesson (*1970)
Athanor, pour soprano, baryton, choeur mixte et orchestre (2003)
Création mondiale
Virginie Pesch (soprano)
Nigel Smith (baryton)
Choeur de Radio France
direction : Philip White
Orchestre National de France
direction : Jonathan Darlington | |
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