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CRITIQUES DE CONCERTS |
11 octobre 2024 |
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Récital d'Andreas Scholl avec l'Academia Bizantina au Théâtre des Champs-Élysées, Paris.
Un prince chez les bergers d'Arcadie
Il entre en scène à grandes enjambées, précédé d'une réputation plus que flatteuse qui fait de lui un des meilleurs contre-ténors de sa génération, et d'un capital de sympathie intact. Andreas Scholl ravit à chacune de ses apparitions, et son récital du TCE consacré aux cantates baroques arcadiennes n'aura pas fait exception à la règle.
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Il est vrai qu'Andreas Scholl est un de ces rares musiciens qui, dans son parcours, a su opérer des choix raisonnés qui ont préservé un tel capital et l'ont conduit souvent à la redécouverte de trésors oubliés, inscrits dans des périodes moins fréquentées que d'autres de l'histoire de la musique.
C'est le cas des quatre cantates au programme du concert, qui appartiennent à l'âge d'or de la mythique Arcadie, ressuscitée à Rome vers la fin du XVIIe siècle par la célèbre académie italienne éponyme, à l'initiative d'un groupe de poètes romains lors du séjour de la reine Christine de Suède dans leur capitale. En accueillant en son sein, quelques années plus tard, des compositeurs comme le sicilien Alessandro Scarlatti, le romain Francesco Gasparini, et surtout le vénitien Benedetto Marcello, elle allait établir les nouveaux codes de la création poétique et musicale, et sceller l'alliance des « Bergers d'Arcadie » avec les « Virtuoses excellents ».
Il s'agissait de s'émanciper de la complexité des schémas baroques en redonnant à la cantate de chambre « une poésie forte de sa propre beauté, et le culte de ce qui est plaisant ». Dans des récitatifs aux harmonies audacieuses, placés devant deux airs au caractère nettement distinct dans leur forme et leur développement, il y sera question des désordres de la passion amoureuse, des intermittences du coeur, et d'amants égarés en appelant à une nature consolatrice.
Andreas Scholl y développe un art du chant et du dire d'une raffinement qui émerveille. Le corps entier est en éveil, le visage traduit le bonheur, les tourments, la douceur ou la colère. La ligne vocale, d'une stabilité sans faille sur toute l'étendue de la tessiture, est parfaite. Ce qui lui permet de jouer de toutes les séductions d'un timbre à peu près unique. Un des grands moments de la soirée est la cantate Quando penso agl'affanni de Benedetto Marcello (« Quand je songe à la douleur d'une âme asservie par l'amour, je sens s'échapper tout désir de m'éprendre d'un visage
») : un modèle de style, qui, avec Scholl, fait la part d'une théâtralité sans excès, mais captivante d'un bout à l'autre.
Un seul regret : que l'acidité des violons de l'Academia Bizantina, le manque de cohésion des instruments et une direction sans imagination ne lui aient pas offert un écrin à sa mesure.
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Théâtre des Champs-Élysées, Paris Le 08/03/2004 Françoise MALETTRA |
| Récital d'Andreas Scholl avec l'Academia Bizantina au Théâtre des Champs-Élysées, Paris. | Pietro Paolo Bencini (ca. 1675-1755)
A' il sacrificio di Abramo
Ouverture
Francesco Gasparini (1668-1727)
Ecco che alfin ritorno
Cantate pour alto, cordes et continuo
Arcangelo Corelli (1653-1713)
Concerto grosso, Op. 6, n °4
Francesco Gasparini (1678-1727)
Destati Lidia mia
Cantate pour alto, cordes et continuo
Benedetto Marcello (1686-1739)
Quando penso agl'affanni
Cantate pour alto, cordes et continuo
Alessandro Scarlatti (1660-1725)
Concerto grosso n°4 en sol mineur
Antonio Vivaldi (1678-1741)
Cessate, ormai cessate
Cantate pour alto, cordes et continuo, RV 684
Andreas Scholl, contre-ténor
Academia Bizantina
direction et clavecin : Ottavio Dantone | |
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