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CRITIQUES DE CONCERTS |
11 décembre 2024 |
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Reprise du Trouvère mis en scène par Francesca Zambello à l'Opéra Bastille, Paris.
Licitra Ă Paris
Salvatore Licitra (Manrico) et Marina Mescheriakova (Leonore).
Cette reprise de la mauvaise production du Trouvère présentée pour la première fois à l'Opéra national de Paris en novembre dernier a permis au ténor italien Salvarore Licitra de faire enfin ses débuts dans cette maison. Distribution presque entièrement renouvelée. Mais pour Licitra, les amateurs de vrai chant italien n'auront pas été déçus.
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Il faut bien faire avec cette calamiteuse production du Trouvère ! A la revoir, on se demande encore ce qu'il y a de pire, entre la laideur des décors, la futilité des gadgets qui n'apportent ni ne racontent rien et l'absence de mise en scène au sens normal du terme. Le contraste reste d'ailleurs étrange entre une pareille accumulation de détails inutiles et dénués de signification et le comportement totalement stéréotypé et ringard imposé aux chanteurs, Leonore chantant, pour ne citer que cet exemple, tout le D'amor sull'ali rose plantée devant la loge du souffleur, comme au concert ! Pathétique.
Distribution renouvelée en revanche pour les rôles principaux, avec, en vedette, le jeune ténor italien Salvatore Licitra. Solide physiquement et vocalement, il renoue avec une certaine tradition italienne sans complications excessives. Le timbre est franc, l'émission facile, la voix bien sonnante sur toute la tessiture, les nuances prudentes sans être pour autant absentes. Nous sommes loin des raffinements d'un Alagna dans le même rôle dont Licitra, néanmoins, possède sans doute de manière plus exacte les vrais moyens.
Avec des moyens impressionnants qui ne gâtent jamais la musicalité, Larissa Dyadkova est pour lui une partenaire idéale et la première grande scène entre Manrico et Azucena reste comme l'un des sommets de la soirée. Voix de bronze contre voix d'airain, la gitane redevient bien le principal personnage féminin, comme Verdi l'entendait à l'origine. D'autant que Marina Mescheriakova est une assez pâle Leonore. Timbre musical, jolie voix bien conduite, sans aucun doute, elle n'a ni la solidité des graves ni l'éclat des aigus d'une vraie verdienne. Elle semble chanter davantage la comtesse des Noces de Figaro que l'amoureuse passionnée du Trouvère. D'autant que la direction très inégale de Maurizio Benini semble lui tendre sans cesse des pièges, tour à tour trop lente ou trop rapide, la poussant à bout de souffle dans le cantabile de ses airs et brouillant ses vocalises dans la cabalette du Miserere.
Beaucoup plus convaincant qu'en Guy de Montfort des Vêpres siciliennes, Anthony Michael-Moore incarne avec toute la vaillance adéquate le méchant comte Di Luna. Mais où sont les vrais barytons Verdi d'antan avec ce mordant et cette noirceur de la voix qu'un Cappuccilli possédait au plus haut degré ? Très beaux débuts à Paris du jeune bulgare Orlin Anastasov en Ferrando, bon physique de basse, voix bien frappée et souple. Quant à Martine Mahé, excellente comme toujours, elle mérite une décoration pour accepter de rentrer en scène affublée en suffragette féministe anglaise des années 1920 ! Mais ce n'est que l'un des nombreux gags du spectacle.
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