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CRITIQUES DE CONCERTS 27 avril 2024

Concert de l'Orchestre de Philadelphie sous la direction de Christoph Eschenbach au théâtre Mogador, Paris.

Bruckner et les intégristes

Assez rare sous nos latitudes, l'Orchestre de Philadelphie est de ces formations qui font encore rêver par la légende attachée à des noms comme Stokowski ou Ormandy. Ce soir à Mogador, les Américains et Christoph Eschenbach auront été à la hauteur des espérances, notamment dans une magnifique 7e de Bruckner pourtant conspuée par une fanatique de Celibidache.
 

Théâtre Mogador, Paris
Le 13/05/2004
Yannick MILLON
 



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  • Le concert dĂ©bute sous les meilleurs auspices avec une ouverture de Fidelio roborative et musclĂ©e, dans laquelle Eschenbach montre une fois de plus son affinitĂ© avec la rythmique frondeuse de Beethov, y compris dans une robuste coda digne de Toscanini. L'orchestre de Philadelphie fait d'emblĂ©e Ă©tal de ses belles qualitĂ©s : tapis de cordes somptueux, cuivres vigoureux, capacitĂ© d'Ă©coute Ă©tonnante. Le Philadelphia n'a peut-ĂŞtre pas l'excellence absolue de Cleveland, Boston ou Chicago – cors parfois incertains, bois parfois ternes – mais qu'on aimerait en France disposer de pareille Roll's symphonique !

    Un saut d'un bon siècle nous transporte dans les hautes sphères des Offrandes oubliées de Messiaen, dont l'orchestre saisit idéalement l'atmosphère éthérée et suspendue du volet introductif La Croix, comme celle, âpre et furieuse, du volet central Le Péché. La partie conclusive, l'Eucharistie, est l'occasion de se délecter, dans une luminosité recueillie, des sonorités généreuses des neuf instruments à cordes solistes.

    Après la pause, retour un demi-siècle plus tôt avec la 7e symphonie de Bruckner. Dès le premier trémolo de cordes, Eschenbach impose une gestion du temps dans le sillage de Celibidache, où la contemplation et la plastique instrumentale l'emportent, privilégiant des tempi lents – sans jamais aller jusqu'au lentissime de certains passages de sa 4e symphonie ou au tempo presque arrêté du chef roumain – et l'élévation d'une première phrase des violoncelles en une arche immense, quasi infinie, dont la longueur et la hauteur de vue donnent presque le vertige. Pour autant, ce Bruckner ne manque jamais de vigueur, comme le prouve un fulgurant crescendo final, avec une montée en puissance tenue sans la moindre accélération.

    Adagio bouleversant d'humanité

    La petite demi-heure du mouvement lent qui suit offre des couleurs orchestrales à se pâmer : violoncelles déchirants dans le second thème, cordes diaphanes, tubas wagnériens absolument magiques dans la déploration sur la mort de Wagner qui suit le climax. Moment bouleversant d'humanité, d'élévation spirituelle, s'apaisant dans une sérénité salutaire avec des cuivres tout d'aisance, de justesse et d'équilibre.

    A l'inverse de tant de chefs qui s'abîment après l'Adagio, Eschenbach négocie au mieux le Scherzo, dont il transcende le caractère éminemment rythmique, et le Finale, déjouant les pièges d'une écriture répétitive et souvent en bloc – enchaînements parfaitements fondus. Avec force ingéniosité et le concours d'un rang de cuivres éblouissant, parfaitement adapté à la majesté et la tension immense des péroraisons brucknériennes, il mène la coda à une exultation triomphale.

    Une magnifique exĂ©cution, un peu gâchĂ©e par les huĂ©es forcenĂ©es d'une auditrice surexcitĂ©e ne jurant que par Celibidache. Et pourtant aujourd'hui, qui plus que Christoph Eschenbach se rapproche de cette optique interprĂ©tative – poigne et Ă©clat en plus ? Mais preuve est faite que les intĂ©gristes sont partout, mĂŞme dans le domaine de l'interprĂ©tation brucknĂ©rienne, dont le gourou roumano-munichois avait paraĂ®t-il la science infuse. Et dans son petit Ă©cart Ă  la parole divine, Eschenbach a sans doute eu de la chance de n'ĂŞtre que sifflĂ©, car peut-ĂŞtre trouverons-nous quelque « celibidacho-maniaque Â» cagoulĂ© et armĂ© d'une kalachnikov devant le Musikverein de Vienne pour la 5e symphonie par l'hĂ©rĂ©tique Harnoncourt le mois prochain !




    Théâtre Mogador, Paris
    Le 13/05/2004
    Yannick MILLON

    Concert de l'Orchestre de Philadelphie sous la direction de Christoph Eschenbach au théâtre Mogador, Paris.
    Ludwig van Beethoven (1770-1827)
    Fidelio, ouverture en mi majeur, op. 72 (1814)

    Olivier Messiaen (1908-1992)
    Les Offrandes oubliées, méditation symphonique (1930)

    Anton Bruckner (1824-1896)
    Symphonie n°7 en mi majeur (1883)
    Version Nowak

    Philadelphia Orchestra
    direction : Christoph Eschenbach

     


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