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CRITIQUES DE CONCERTS |
04 octobre 2024 |
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Récital de Murray Perahia au Théâtre du Châtelet, Paris.
Le piano romantique dans tous ses Ă©tats
Pianiste culte s'il en est, Murray Perahia avait choisi un programme tout romantique pour cette escale parisienne au Théâtre du Châtelet. Un grisant voyage initiatique plongé en plein coeur du romantisme à travers le lignage tissé entre Beethoven, Schumann et Brahms.
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Avec un comportement scénique d'une simplicité et d'une sérénité totales, Murray Perahia nous a entraînés dans un voyage au plus profond du romantisme pianistique. La savante progression qui mène de la Sonate en mi bémol majeur op.31 n°3 de Beethoven (1802) aux Variations et Fugue sur un thème de Haendel en si bémol majeur op. 24 de Brahms (1861), en passant par les Fantasiestücke op. 12 de Schumann (1837) nous conduit de l'orée du romantisme à son apogée.
Simplicité novatrice de l'écriture Beethovénienne dont les audaces, les inventions, les idées futuristes passent presque inaperçues à l'oreille qui n'y prend garde, complexité des élans schumanniens avec leurs tourments, leurs accalmies et leurs questionnements, générosité des amples développements de Brahms dans cette somptueuse fugue qui clôt vingt-six variations bien trop peu souvent jouées, tout cela nous a été joué, raconté, transmis de manière miraculeuse.
Perahia, c'est la finesse, l'intelligence de l'analyse, la justesse de l'intention, dans une démarche poétique permanente qui est idéale pour ce répertoire. Tout est équilibre et réflexion en donnant l'illusion d'une sensibilité qui réagit dans l'instant et se libère devant nous pour la première fois. On ne peut mieux nous rendre tangible cette évolution des sensibilités et des formes qui s'éveille à la fin du XVIIIe siècle et trouve en Beethoven un génial relais qui porte tout plus loin, là où Schumann à son tour surgit et chemine encore davantage passant le message à Brahms qui sera quasiment la dernière figure monumentale de cette saga.
Est-il besoin de dire que Perahia nous donne une fascinante leçon de toucher, entrant de plus en plus et de manière différente dans les touches, fouillant de plus en plus loin les sonorités de l'instrument jusqu'à l'explosion finale de cette fugue presque lisztienne dans ses moments les plus intenses ? Et puis, il a la délicatesse de ne donner qu'un bis, un moment de rêve, Impromptu de Schubert immatériel, fugitif, qui laisse l'auditoire ébahi, sur un petit nuage.
Quelle sagesse de ne pas se ruer comme tant d'autres sur le piano au deuxième rappel et de préserver ainsi le climat si savamment créé depuis le début de la soirée !
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Théatre du Châtelet, Paris Le 07/06/2004 Gérard MANNONI |
| Récital de Murray Perahia au Théâtre du Châtelet, Paris. | Beethoven, Schumann, Brahms
Murray Perahia, piano | |
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