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CRITIQUES DE CONCERTS 25 avril 2024

Nouvelle production de Daphné de Richard Strauss mise en scène par Nicolas Joel à l'Opéra de Vienne.

Le retour de Daphné
© Wiener Staatsoper GmbH / Axel

Absente de la scène viennoise depuis plus de trente ans, la Daphné de Strauss fait son grand retour dans une nouvelle production signée Nicolas Joel et Pet Halmen, dont l'impact visuel rend justice à une oeuvre difficile à illustrer scéniquement. Et n'était la baguette un rien fruste de Semyon Bychkov, la partie musicale se hisserait encore plus haut que la mise en scène.
 

Staatsoper, Wien
Le 13/06/2004
Yannick MILLON
 



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  • Antépénultième opéra de Richard Strauss, Daphné fait partie de ces ouvrages qu'on ne donne jamais ; un livret très moyen et une action bien difficile à porter à la scène n'y sont sans doute pas étrangers. La dernière production viennoise de l'oeuvre remonte d'ailleurs à 1965, quand Karl Böhm et les Wiener Symphoniker accompagnaient un plateau de rêve lors des Wiener Festwochen.

    Comme toujours, Nicolas Joel aborde sa mise en scène avec un respect absolu du sens de l'oeuvre mais aussi un brin de modernité qui empêche son travail de sombrer dans le trop traditionnel. La grande force de cette nouvelle production réside dans la beauté de ses tableaux. Dans des tons souvent bleutés, elle joue le jeu de l'hellénisme, avec son temple grec qui sert de décor à l'essentiel de l'action, ses statues d'Apollon et Dionysos, ses masques de comédie. Certaines images sont très réussies, comme l'immense masque voilé à l'arrivée d'Apollon, d'où surgiront, une fois découvert, les Bacchantes, ou la pétrification, avec la chrysalide qui se referme sur une Daphné statuaire. De manière originale, Joel change un peu la donne en faisant d'Apollon, tout de noir vêtu, un être à l'autorité naturelle, qui maîtrise les éléments sans arrogance particulière, et du jeune Leucippe, tout en blanc, un chien fou, adolescent joueur et fougueux qui ne tient pas en place, et inspire finalement plus de pitié que de compassion.

    Pour servir au mieux cette nouvelle Daphné, l'Opéra de Vienne a mis le paquet quant à la distribution. Première surprise, et de taille, la Daphné de Ricarda Merbeth, dont l'Elisabeth bayreuthienne de l'été passé nous avait laissé bien peu d'espoir d'entendre cette voix assez grêle triompher d'un rôle extrêmement périlleux. Mais l'Allemande campe un personnage affolé, psychotique, et sa belle présence rachète un timbre assez vert. Et même si la voix paraît souvent monochrome et le vibrato jamais modulé de manière expressive, l'assurance stupéfiante dans l'aigu – dont le rôle n'est pas avare – et l'agilité forcent le respect.

    Rien à redire en revanche sur le magnifique Apollon de Johan Botha, incontestablement LA voix de la soirée. Le ténor sud-africain incarne un dieu serein, véritable force tranquille, à l'opposé de l'arrogance prônée par James King, et dispose d'un souffle proprement phénoménal, projetant en permanence la voix avec rondeur et homogénéité. Michael Schade endosse avec classe le rôle de Leucippe, l'adolescent épris de Daphné, où sa jeunesse et sa clarté de timbre, sa facilité d'émission font merveille. Dans les rôles secondaires, on remarquera la très sonore Gaea de Marjana Lipovšek, à la voix de poitrine idéalement accrochée, jamais écrasée, et le Peneios un rien plébéien de Walter Fink, au demeurant voix immense et timbre sépulcral.

    Dans la fosse, le somptueux instrument qu'est l'orchestre de l'Opéra de Vienne profère sans compter des sortilèges sonores et des couleurs bucoliques envoûtantes et vives – des bois en état de grâce. Il est d'autant plus regrettable que la baguette de Semyon Bychkov, efficace et dramatique mais souvent trop peu canalisée, semble presque lutter contre les subtilités de l'orchestre. Beaucoup trop cantonnée dans un mezzo forte ambiant, elle brasse souvent dans le vide sans distinction ni précision – scène finale sur des œufs.

    Au final, une première de très haute tenue, dont on espère voir les imperfections se gommer avec le temps, mais qui confirme l'excellence d'une maison d'opéra prestigieuse entre toutes.




    Staatsoper, Wien
    Le 13/06/2004
    Yannick MILLON

    Nouvelle production de Daphné de Richard Strauss mise en scène par Nicolas Joel à l'Opéra de Vienne.
    Richard Strauss (1864-1949)
    Daphne, tragédie bucolique en un acte
    Livret de Joseph Gregor

    Chor der Wiener Staatsoper
    Orchester der Wiener Staatsoper
    direction : Semyon Bychkov
    mise en scène : Nicolas Joël
    décors, costumes et éclairages : Pet Halmen
    chorégraphie : Renato Zanella
    préparation des choeurs : Marco Ozbic

    Avec :
    Walter Fink (Peneios), Marjana Lipovšek (Gaea), Ricarda Merbeth (Daphne), Michael Schade (Leukippos), Johan Botha (Apollon), Markus Nieminen (premier berger), Benedikt Kobel (deuxième berger), Jens Musger (troisième berger), Johannes Wiedecke (quatrième berger), Genia Kühmeier (première servante), Aarona Bogdan (deuxième servante).

     


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