|
|
CRITIQUES DE CONCERTS |
10 octobre 2024 |
|
Reprise de la Guerre et la Paix de Prokofiev dans la mise en scène de Francesca Zambello, sous la direction de Vladimir Jurowski à l'Opéra Bastille, Paris.
Flamboyante reprise
Bo Skovhus (le Prince Andrei) et Vladimir Ognovenko (le Maréchal Koutouzov).
Somptueuse distribution pour cette reprise de la production de la Guerre et la Paix de Sergei Prokofiev que Francesca Zambello avait signée en mars 2000. Le spectacle a gardé son éclat, et la direction flamboyante de Vladimir Jurowski, étoile montante de la direction d'orchestre, ajoute au succès de l'entreprise.
|
|
Wozzeck chez Big Brother
Géométrie de chambre
Respiration vitale
[ Tous les concerts ]
|
Sans un chef qui maintienne la pression pendant toute la durée de cet « opéra monstre », comme le qualifiait Rostropovitch, la Guerre et la Paix ne tiendrait pas aussi facilement le public en haleine. Musique magnifique certes, livret très solidement construit malgré une deuxième partie aux accents patriotiques un peu datés aujourd'hui. Le peuple chantant sa liberté, qu'il s'agisse de l'époque de l'intrigue ou de celle de l'opéra, cela ne sonne-t-il pas de manière étrange alors que l'histoire nous permet d'avoir un regard rétrospectif sans concession sur ces deux périodes de l'histoire russe ? Mais ce n'est qu'un problème annexe. Les scènes se succèdent avec une logique et une rapidité adéquates et choeurs, orchestre, solistes ont tous un rôle important à tenir, ne serait-ce que pour quelques répliques.
Le choeur de l'Opéra dirigé par Peter Burian est splendide, par sa force, son éclat, sa musicalité, sa capacité à garder son homogénéité sonore même dans les scènes où il se trouve en plein mouvement ou en plein dispersion sur le plateau. Un triomphe amplement mérité. De même, sous la baguette de Vladimir Jurowski, personnalité décidément en ascension direct vers les sommets, l'orchestre entre avec autant d'habileté que d'efficacité dans toutes les finesses de cette redoutable partition, tout à tour brillant ou plus tempéré, capable des élans les plus intenses et des rêveries les plus tendres. Et Jurowski tient aussi le plateau aux innombrables protagonistes avec une précision qui force l'admiration. Sa direction est tonique sans brutalité, riche de son sans saturation, toujours dans une musicalité expressive, contrôlée, respectueuse des couleurs spécifiques de l'écriture de Prokofiev. Alors le spectacle se déroule sans que le temps existe.
Impossible naturellement de citer tous les chanteurs de cette distribution pléthorique et très équilibrée. La Natacha d'Olga Guryakova est toujours aussi belle vocalement et théâtralement. La voix a même gagné en ampleur, sans rien perdre de sa qualité. Bo Skovhus est bien sûr un Andrei de rêve, par la voix, d'abord, ample et ferme, au timbre si bien frappé, par la stature ensuite. Un personnage de film. Excellente incarnation de Pierre par Michael König, avec sa belle voix claire et son allure de faux balourd amoureux. Et tous les autres sont parfaitement à leur place, du Koutouzov caverneux de Vladimir Ognovenko à la belle Comtesse Hélène d'Elena Zaremba.
Quant au spectacle lui-même, il a retrouvé son rythme, son efficacité, jouant habilement sur une sobriété décorative indispensable vue la foule qui occupe généralement la scène. Une des meilleures réussites de Francesca Zambello, créatrice décidément imprévisible, si l'on songe à certaines productions catastrophes dont elle nous a gratifiés depuis 2000. Mais personne n'est parfait
| | |
| | |
|