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CRITIQUES DE CONCERTS |
11 octobre 2024 |
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Concert symphonique de l'Orchestre de l'Opéra de Paris sous la direction d'Oliver Knussen au Palais Garnier, avec la participation des sopranos Christine Schäfer et Barbara Hannigan.
Schäfer la réconciliatrice
Oliver Knussen et l'Orchestre de l'Opéra de Paris mettent à l'honneur le répertoire contemporain et la Seconde École de Vienne. Une soirée où la prestation très attendue de Christine Schäfer se montre à la hauteur de sa réputation. L'Allemande donne notamment une leçon là où ses partenaires avouent quelques insuffisances.
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Si le répertoire viennois n'acquiert sa saveur définitive qu'avec les timbres veloutés du terroir, Webern plus que quiconque n'est rien sans un instrument de choix. Aussi, se montrer à la hauteur du sens de la couleur instrumentale des Six pièces op. 6 n'est pas le moindre des mérites de l'Orchestre de l'Opéra de Paris. Car peu de phalanges françaises, hormis sans doute l'Orchestre de Paris, peuvent se hasarder sans dommage dans un répertoire aussi exigeant sur le plan du timbre.
Oliver Knussen sait du reste tirer des musiciens le meilleur élixir, par un art consommé de la netteté rythmique et du brillant des sonorités. Cette lecture détaillée et assez rapide, mosaïque de timbres contrastants, ne suffit cependant pas à compenser une palette expressive réduite, dont le manque d'amplitude dans la dynamique révèle les insuffisances d'une marche funèbre tombant à plat. Knussen a pris le parti de ciseler plus que d'incarner, de lire plus que d'interpréter des pièces dont il peaufine jusqu'à la moindre articulation.
Il faut de même plus que cette direction soignée et efficace mais un peu sèche pour rendre justice à la musique de chair que représentent les Correspondances de Dutilleux. Créé en 2003, l'ouvrage reprend des lettres fortes dont l'hommage vibrant de Soljenitsyne au couple Rostropovitch constitue un bel exemple. La soprano Barbara Hannigan, négatif de Knussen, théâtralise par trop le propos dans une outrance pas toujours bienvenue, manque de grave et chevrote dans les piano.
On trouvera finalement le parfait compromis entre l'exactitude technique et l'exigence musicale en l'intervention idéale de Christine Schäfer. Aussi sobres qu'efficaces musicalement, aussi purs que brillants vocalement, les Altenberg Lieder s'écoulent dans la limpidité même. Tout ce que Christine Schäfer perd en panache de façade, elle le gagne en pertinence, dans une perfection et une intelligence rare du chant. Son plötzlich ist alles aus est d'une diction aussi nette que d'une musicalité méticuleuse, d'un parlé aussi sobre qu'évident. Cette Lulu de légende redonne du relief à la direction d'un chef sous influence.
Knussen compositeur clôt cette soirée avec une 3e symphonie dont le détail est à la mesure des préoccupations du chef, avec des textures de cristal dont le scintillement est perpétuellement mis en valeur par un goût très sûr. À une première partie volubile succède le temps suspendu des nappes sonores de la seconde partie et l'ouvrage, toujours intéressant au niveau de l'écriture orchestrale, s'inscrit bien dans cette soirée orientée vers la couleur instrumentale.
Mais le véritable point d'ancrage de ce concert aura sans conteste été Christine Schäfer, réconciliant les tendances interprétatives de la soirée dans une prestation aussi courte que mémorable, témoignant d'un achèvement rare.
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Palais Garnier, Paris Le 22/11/2005 Benjamin GRENARD |
| Concert symphonique de l'Orchestre de l'Opéra de Paris sous la direction d'Oliver Knussen au Palais Garnier, avec la participation des sopranos Christine Schäfer et Barbara Hannigan. | Anton von Webern (1883-1945)
Six pièces pour orchestre op. 6
Henri Dutilleux (1916*)
Correspondances
Barbara Hannigan, soprano
Alban Berg (1885-1935)
Altenberg Lieder, op. 4
Christine Schäfer, soprano
Oliver Knussen (*1952)
Symphonie n° 3
Orchestre de l'Opéra national de Paris
direction : Oliver Knussen | |
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