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CRITIQUES DE CONCERTS 25 avril 2024

Concert Vivaldi avec la mezzo Vesselina Kasarova et l'Ensemble 415 sous la direction de Chiara Banchini au Théâtre des Champs-Élysées, Paris.

Perles irrégulières
© BMG

Lors de son dernier passage à Paris dans Alcina, Vesselina Kasarova n'avait que partiellement convaincu de son adéquation avec le répertoire baroque. Sa rencontre avec l'Ensemble 415, baroqueux s'il en est, paraissait donc pour le moins improbable. Par delà les excès, la mezzo-soprano bulgare n'en a pas moins offert des Vivaldi d'une envoûtante inventivité musicale.
 

Le 07/12/2005
Mehdi MAHDAVI
 



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  • Il y a à peine plus de dix ans, l'Ensemble 415 de Chiara Banchini livrait avec la complicité d'Andreas Scholl une des versions les plus extatiques du Stabat Mater de Vivaldi. Avec Vesselina Kasarova, diva consacrée de Zurich à Paris dans le bel canto romantique de Rossini, Donizetti et Bellini, la perspective est évidemment toute autre. Après deux concertos plus convaincants d'esprit et de couleurs que de mise en place, la mezzo bulgare fait une apparition sculpturale, étincelante, de rouge et de noir zébrée, telle une Carmen contemporaine.

    Sous ses faux airs de femme fatale, la Kasarova impose d'emblée une présence, un rayonnement quasi-musical, décuplé dès que retentissent les premières notes. Transfigurée, elle attaque sa déploration d'une voix suffoquée, inquiétante : registres plus que disparates, oscillant entre pureté virginale et graves de matrone, les garants de l'orthodoxie vocale en seront pour leurs frais, à l'instar des docteurs ès styles, offusqués par tant d'excès.

    Impossible pourtant de résister à l'art envoûtant de la chanteuse. Du seul instinct, chaque mesure semble naître de l'instant, de l'orientation du regard, de la souplesse du corps, du don absolu d'une grande artiste. Pas une nuance ne semble définitive, tant la mezzo-soprano s'investit dans chaque pianissimo, jusqu'à perdre le souffle, la justesse, retrouvés aux termes d'une quête physique et spirituelle. Car ce chant n'est que variété, dont pas un son ne ressemble au précédent, pas une intention ne se répète : perle authentiquement irrégulière, baroque.

    Le dialogue avec les musiciens n'est de surcroît jamais interrompu. Venus d'horizons si divers, l'Ensemble 415 et Vesselina Kasarova n'en communiquent pas moins avec le même langage, la musique. Ainsi, Chiara Banchini a elle aussi ses défaillances, d'un archet moins volubile, moins spectaculaire que certains de ses pairs, mais aussi une capacité à faire s'élever un chant écorché, qui rend à Vivaldi une profondeur oubliée, pour que deux femmes d'exception prouvent que la perfection technique n'est pas plus nécessaire que suffisante à l'expression musicale.

    Bien davantage que le Stabat Mater, le Nisi Dominus flatte l'émission et le timbre lumineux de la mezzo-soprano, confondante d'abattage dans les parties les plus virtuoses. Et le Cum dederit, fragilement suspendu par une justesse sans cesse vacillante, mais d'une variété dynamique absolument inouïe, inimaginable, et toujours réinventée, quasi-expérimentale, n'a jamais été si hypnotique, tandis que le dialogue avec la viole d'amour du Gloria Patri se situe à un intouchable niveau d'instrumentalité, dès lors que Vesselina Kasarova exalte les sonorités de l'ensemble de son corps.

    Déjà intimement bouleversés, jusque dans nos certitudes, il ne nous restait plus qu'à verser des larmes. Extrait d'Ariodante de Haendel, Scherza infida se situe au sommet de l'art de la fureur désolée. A l'inverse d'une Magdalena Kožená figée il y a peu dans une rhétorique affectée, Vesselina Kasarova, la projection soudain intense, s'y jette à corps perdu, versant des larmes de sang.




    Le 07/12/2005
    Mehdi MAHDAVI

    Concert Vivaldi avec la mezzo Vesselina Kasarova et l'Ensemble 415 sous la direction de Chiara Banchini au Théâtre des Champs-Élysées, Paris.
    Antonio Vivaldi (1678-1741)
    Concerto pour orchestre en sol mineur RV 108
    Concerto pour orchestre en fa mineur RV 143
    Stabat Mater, RV 621 (1712)
    Concerto pour deux violons et orchestre en la mineur op. 3 n° 8, RV 522
    Concerto « Madrigalesco Â» en ré mineur RV 129
    Nisi Dominus, RV 608 (1717)

    Vesselina Kasarova, mezzo-soprano
    Ensemble 415
    direction et violon : Chiara Banchini

     


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