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CRITIQUES DE CONCERTS |
11 octobre 2024 |
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Concert de l'Orchestre national de Lyon sous la direction de Marc Piollet à l'Auditorium Maurice Ravel avec la participation du violoncelliste Gautier Capuçon.
Requiem sans intensité
Marc Piollet
2006 est l'année de tous les anniversaires : L'ONL célèbre cette semaine Schumann et Chostakovitch avec le Concerto pour violoncelle du premier et la 8e symphonie du second, dans une soirée que l'Auditorium a intitulée Requiem sans paroles. Prestations très décevantes de Marc Piollet et Gautier Capuçon dans deux oeuvres majeures jouées sans intensité.
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Si la valeur n'attend pas le nombre des années, la jeunesse est du moins sujette aux mêmes irrégularités que la maturité de tout artiste. Tel est le constat d'une soirée bien routinière, placée sous la conduite de Marc Piollet et de l'étoile montante du violoncelle français Gautier Capuçon.
Ce dernier déçoit. Technique exacte, phrasé et demi-teinte soignés, le violoncelliste livre une lecture proprette du concerto de Schumann. Une respiration sonore et intempestive témoigne d'une volonté expressive qui ne prend jamais corps concrètement, tandis qu'un détaché sec et étriqué produit un troisième mouvement sans caractère ni saveur. Il faut dire que Marc Piollet ne facilite pas du tout la tâche de son soliste. L'orchestre se révèle inconsistant au possible, sans une once de poésie pour défendre l'écriture schumanienne, et ne prend jamais soin d'envelopper le violoncelle du halo sonore et poétique adéquat, aboutissant à un accompagnement atone autant qu'amorphe.
Admettons que nos interprètes ne sont pas particulièrement réceptifs à cet univers onirique particulier. Mais Marc Piollet ne l'est pas plus à une oeuvre aussi fortement ancrée dans le réel tragique que la 8e symphonie de Chostakovitch. Sans recourir au sabotage caractérisé et outrancier de Slatkin un an plus tôt dans la 11e, le chef français livre un Chostakovitch tout aussi creux, dans une lecture droite et inconsistante s'appuyant sur des contrastes qui n'en sont pas : pour conduire au climax du premier mouvement, il ne fait usage que des seules nuances, sans que celles-ci ne soient doublées par une tension plus accrue.
En résulte une extériorité d'un soviétisme primaire, évacuant toute substance dramatique pourtant magnifiquement mise en valeur par une construction dramaturgique parfaitement achevée dans l'écriture. Sans pour autant habiter le propos, une lecture scrupuleuse et analytique suffirait à mettre en relief une progression digne de ce nom ; mais en réduisant les contrastes à des paramètres en soi insuffisants, la structure s'effondre littéralement devant nous.
Marc Piollet repartant de zéro à chaque début de mouvement, jamais la tension n'est gérée de manière continue. L'orchestre est lui-même insuffisamment caractérisé, avec des timbres impersonnels, et de surcroît criards en ce qui concerne les vents dans les tutti. Tous les grands moments tombent à plat : le point d'achoppement à la fin du III arrive trop tôt ; sans extériorité efficace, point d'intériorité convaincante : le mouvement lent est à mourir d'ennui ; et que dire alors de la modulation en do majeur ouvrant le Finale, censée laisser l'auditeur respirer après un drame à couper le souffle, et qui perd ici toute saveur ?
Une soirée bien décevante et en fait du Requiem sans paroles promis par la publicité, on se dit que celui-ci était surtout sans intérêt.
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Auditorium Maurice Ravel, Lyon Le 11/03/2006 Benjamin GRENARD |
| Concert de l'Orchestre national de Lyon sous la direction de Marc Piollet à l'Auditorium Maurice Ravel avec la participation du violoncelliste Gautier Capuçon. | Robert Schumann (1810-1856)
Concerto pour violoncelle et orchestre en la mineur, op. 129 (1850)
Gautier Capuçon, violoncelle
Dimitri Chostakovitch (1906-1975)
Symphonie n° 8, en ut mineur, op. 65 (1943)
Orchestre national de Lyon
direction : Marc Piollet | |
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