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CRITIQUES DE CONCERTS 20 avril 2024

Theodora de Haendel sous la direction d'Emmanuelle Haïm au Théâtre des Champs-Élysées, Paris.

Theodora in memoriam

Lorraine Hunt

Pour son premier grand oratorio haendélien à la tête du Concert d'Astrée, Emmanuelle Haïm a choisi Theodora, qui a marqué ses débuts triomphaux à Glyndebourne. Malgré un plateau vocal luxueux et un choeur de très haute tenue, on retiendra l'hommage rendu à Lorraine Hunt Lieberson plutôt qu'une lecture sans profondeur.
 

Théâtre des Champs-Élysées, Paris
Le 19/10/2006
Mehdi MAHDAVI
 



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  • Comment évoquer Theodora sans penser à Lorraine Hunt Lieberson, dont la disparition, le 3 juillet dernier à l'âge de 52 ans des suites d'un cancer, a arraché à plus d'un mélomane des torrents de larmes ? Si elle enregistra le rôle-titre sous la direction de Nicholas McGegan, la mezzo américaine, à qui cette exécution est dédiée, restera surtout comme l'insurpassable interprète d'Irene, notamment dans la mise en scène transcendante de foi tragique de Peter Sellars, dont elle fut l'une des interprètes fétiches. Dans son dernier récital paru chez Avie, cette haendélienne irremplaçable avait d'ailleurs gravé tous les airs d'Irene, qui prennent aujourd'hui valeur de testament artistique.

    Infiniment musicienne, et finement artiste, Anne Sofie von Otter évite soigneusement de se mesurer au souvenir de sa consoeur, avec qui elle partageait plus d'un rôle, en ciselant chaque mot, chaque note plutôt que de chercher une profondeur de timbre qu'elle n'a jamais eue, et une longueur de souffle qu'elle n'a plus, d'une ligne souvent proche du murmure, que viennent malheureusement briser ces ornements incongrus dont Emmanuelle Haïm à toujours eu le secret.

    Les da capi de Didymus subissent à cet égard peu ou prou le même sort, faisant basculer le chant raffiné à l'extrême de Stephen Wallace dans le maniérisme. D'un timbre flatteur mais sans réelle assise, où la voix de tête ne puise aucune couleur dans la poitrine, le contre-ténor britannique n'est d'ailleurs crédible que dans l'élégie, peu à même d'exprimer l'insoumission qui condamnera Didymus à mort.

    Après un douloureux Idomenée, Septimius rend en revanche à Paul Agnew, définitivement incomparable d'idiome vocal et stylistique dans la musique du premier XVIIIe, toute sa superbe, métamorphosant par la compassion la matité du timbre en velours. Le Valens de Matthew Rose est du même acabit, verbe acéré et agilité rugissante dans la plus pure tradition des basses anglaises, avec ce que cela suppose d'engorgement, certes, mais surtout d'éloquence, quand dans le rôle-titre, Geraldine McGreevy met deux actes à trouver la fluidité, sinon la pureté, de son lumineux martyre, avec une détermination un rien laborieuse.

    Un Concert d'Astrée approximatif

    Interventionniste en matière ornementale, Emmanuelle Haïm l'est beaucoup moins dès qu'il s'agit de donner une direction, des contours à la phrase musicale. Saluée par la presse britannique pour son interprétation du pénultième oratorio du caro Sassone à l'occasion de la tournée de la production de Sellars avec le Glyndebourne Touring Opera Orchestra, la chef-claveciniste peine en effet, à la tête de son propre ensemble, à s'élever au-dessus d'une certaine tiédeur, se laissant porter par le flot haendélien sans en sonder les zones d'ombres. Il est vrai que l'orchestre du Concert d'Astrée, après des débuts surmédiatisés et néanmoins prometteurs, ne cesse de décevoir au fil des prestations par ses approximations et la pauvreté de sa palette.

    Révélation du récent enregistrement de la Messe en ut mineur de Mozart dirigée par Louis Langrée, le choeur, magistralement préparé par Denis Comtet, est au contraire admirable de tenue, d'une couleur homogène et puissamment idiomatique, renforcée par la présence de nombreuses voix anglo-saxonnes.

    Sur le point de s'achever aux limites de la torpeur malgré ces voix triomphantes, cette Theodora aura pourtant été touchée in extremis par la grâce d'une émotion palpable, comme si Lorraine Hunt Lieberson avait voulu, Irene pour l'éternité, accompagner les âmes des martyrs dans leur dernier voyage : « Ils s'en sont allés prouver que l'amour est bien plus fort que la mort Â».




    Théâtre des Champs-Élysées, Paris
    Le 19/10/2006
    Mehdi MAHDAVI

    Theodora de Haendel sous la direction d'Emmanuelle Haïm au Théâtre des Champs-Élysées, Paris.
    Georg Friedrich Haendel (1685-1759)
    Theodora, oratorio en trois actes (1750)
    Livret de Thomas Morell d'après Robert Boyle

    Choeur et orchestre du Concert d'Astrée
    chef de choeur : Denis Comtet
    direction : Emmanuelle Haïm

    Avec :
    Matthew Rose (Valens), Steven Wallace (Didymus), Paul Agnew (Septimius), Geraldine McGreevy (Theodora), Anne Sofie von Otter (Irene).

     


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