|
|
CRITIQUES DE CONCERTS |
11 octobre 2024 |
|
Concerts de l'Ensemble Accroche-Note et de l'Ensemble Itinéraire dans le cadre du festival des Paris de la musique à la salle Gaveau, Paris.
Les quinquas qui comptent
Pascal Dusapin
Le festival les Paris de la Musique braque cette année ses projecteurs sur les compositeurs français nés pendant le baby boom. Longtemps considérés comme de jeunes compositeurs en devenir, vivant dans l'ombre de géants en voie d'extinction, ces quinquagénaires sont-ils devenus nos maîtres d'aujourd'hui ?
|
|
Wozzeck chez Big Brother
L’art de célébrer
Géométrie de chambre
[ Tous les concerts ]
|
Deux concerts, ce mercredi, donnés par deux ensembles qui ont beaucoup participé à la vie musicale contemporaine de ces vingt-cinq dernières années : l'ensemble Accroche-Note et l'Ensemble Itinéraire. Le premier réunissait judicieusement les deux compositeurs qui suscitèrent le plus d'espoir à la fin des années 1980 : Philippe Manoury et Pascal Dusapin.
À cinquante ans passés, ont-ils tenu les promesses soulevées ? Manoury est représenté par un trio, Ultima, pièce assez ingrate, qui nous fait penser que le compositeur n'a jamais réussi à se libérer d'un certain style académique avant-gardiste. Magicien de l'orchestre – qu'on se souvienne de Noon par l'Orchestre de Paris dirigé par Salonen ! –, la musique de Manoury semble entravée depuis toujours par la recherche d'une reconnaissance institutionnelle et par une rigueur formelle qui corsète le lyrisme visionnaire de son auteur.
Quant à Dupasin, sa renommée n'a-t-elle pas franchi les sphères de la musique contemporaine ? Compositeur indépendant, il est véritablement entré dans la maturité des très grands artistes. Et si le trio Rombach, joué par un ensemble Accroche-Note en très mauvaise forme, n'est pas une des pièces les plus inspirées de son auteur, la personnalité de Dusapin y transparaît pourtant à chaque mesure. Il y a une atmosphère Dusapin, qui ressemble un peu à celle des films du cinéaste russe Andrei Tarkovski. Des oeuvres au lyrisme explosif des années 1990, Dusapin est passé – le Granum Sinapis pour choeur paraissant faire la jointure – à une musique monochrome d'une grande force tragique.
Le deuxième concert, à l'interprétation plus accomplie, rend hommage à deux autres grands hommes de la musique française de ces trente dernières années : Gérard Grisey et Tristan Murail. Fondateur de la musique spectrale, Grisey compositeur n'a-t-il aujourd'hui pas plus d'influence et d'importance que Boulez compositeur ? Mort en 1998, Grisey est probablement depuis
Debussy, le compositeur qui a le plus réfléchi sur le son. L'Ensemble Itinéraire donne ses Périodes, qui comptent parmi ses plus grands chefs-d'oeuvre, à la modernité toujours aussi provocante, qui fait assister à ce miracle unique : la naissance de l'instrument.
L'oeuvre de Murail qui suit, la Barque mystique, donne une autre image de la musique spectrale. D'essence moins philosophique, elle paraît beaucoup plus confortable que celle de Grisey. Murail est un musicien au raffinement inouï, créant des alliages sonores si subtils que l'auditeur non averti peut perdre le fil du discours. Mais il est avant tout un compositeur climatique, aux pièces merveilleusement suggestives, auxquelles manque toutefois encore un rien de chair.
| | |
|
Salle Gaveau, Paris Le 04/10/2006 Laurent VILAREM |
| Concerts de l'Ensemble Accroche-Note et de l'Ensemble Itinéraire dans le cadre du festival des Paris de la musique à la salle Gaveau, Paris. | 1er concert :
Philippe Manoury (1952)
Ultima
Alban Berg (1885-1935)
Quatre pièces pour orchestre et piano
Claude Debussy (1862-1918)
Trois chansons de Bilitis
Pascal Dusapin (1955)
Trio Rombach
Ensemble Accroche-Note
2e concert :
GĂ©rard Grisey (1946-1998)
PĂ©riodes
Tristan Murail (1947)
La barque mystique
BĂ©la BartĂłk (1881-1945)
Sonate pour deux pianos et percussion
Ensemble Itinéraire | |
| |
| | |
|