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CRITIQUES DE CONCERTS 27 avril 2024

Concert de l'Orchestre de Paris sous la direction de Mstislav Rostropovitch avec la participation de la violoncelliste Tatjana Vassilieva à la salle Pleyel, Paris.

L'archipel du désespoir

Pour le premier concert Chostakovitch avec l'Orchestre de Paris, Mstislav Rostropovitch donne de la 8e symphonie une vision marquée par l'angoisse et la tragédie, alors que la violoncelliste Tatjana Vassilieva exprime dans le 1er concerto pour violoncelle un lyrisme épuré, éloigné d'une conception exacerbée et grinçante.
 

Salle Pleyel, Paris
Le 15/11/2006
Michel LE NAOUR
 



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  • Mstislav Rostropovitch a fait du 1er concerto pour violoncelle de Chostakovitch qu'il a créé en 1959 l'une de ses partitions emblématiques dont le succès ne s'est jamais démenti. Désormais, l'âge venu, il confie à d'autres interprètes le soin de transmettre une tradition qu'il a si bien défendue tout en apportant à présent son concours en tant que chef d'orchestre.

    Salle Pleyel, avec l'Orchestre de Paris, il passe le flambeau à la jeune et talentueuse violoncelliste russe Tatjana Vassilieva, qui a reçu l'enseignement de David Geringas, lui-même ancien élève du maître. Son approche ne recherche pas l'expressionnisme ni même la parodie, voire l'ironie portée à son point culminant. Dotée d'une sonorité très subtile – le Jeronimus Amati de 1685 qu'elle joue n'y est pas non plus étranger –, nuancée dans ses éclats d'une perfection classique, elle s'appuie sur une technique instrumentale d'une justesse stupéfiante – la cadence qui conduit au Finale –, et inscrit le concerto dans une perspective originale excluant tout effet et toute sollicitation extérieure – Allegretto initial. L'accompagnement de Rostropovitch, peu démonstratif, n'appuie jamais le trait mais fournit un écrin à la soliste qui rassemble son énergie pour mieux la libérer, en particulier dans la reprise du thème initial, concluant l'oeuvre de manière saisissante et percussive.

    Après l'entracte, dans la 8e symphonie, le chef privilégie la noirceur, l'oppression, puisant ses ressources jusqu'au fond de lui-même. L'Adagio liminaire est d'une lenteur désespérante comme un requiem, d'une tension et d'une concentration où la fragilité le dispute à l'au-delà. Les mouvements rapides intermédiaires n'ont pas la vivacité roborative ni la pulsation que l'on attendrait, mais possèdent une force expressive aux tempi retenus qui entraînent inexorablement vers un abîme, se préoccupant moins de rigueur et de précision – les décalages provoquent parfois quelques dérapages – que d'unité du discours et de courbe d'ensemble. Nul triomphalisme dans cette interprétation intériorisée – on pense à l'Adieu du Chant de la Terre de Mahler – où la mort, omniprésente, masque le propos héroïque et épique – la lutte du peuple soviétique en 1943 contre l'envahisseur allemand.

    Une aventure qui ne laisse personne indemne

    L'Orchestre de Paris, tendu comme un arc, répond tel un seul homme aux indications très mesurées, voire minimalistes, d'un musicien avec lequel il a le sentiment de mettre sa propre vie en jeu. Les cordes prennent une ampleur tout à fait exceptionnelle, et chaque intervention soliste – la clarinette de Philippe Berrod, le cor anglais Gildas Prado, la flûte piccolo d'Anaïs Benoit ou encore le cor si assuré d'André Cazalet – une dimension à la hauteur d'une aventure qui ne laisse personne indemne en dépit de la conception très personnelle et discutable du chef, la symphonie durant sous sa direction quinze minutes de plus que de coutume.

    Cette formation prouve une fois encore que, dans les grandes occasions, elle est capable de s'engager pour délivrer un message à connotation émotionnelle, ce qui n'a pas échappé à un public debout, transporté par une telle expérience. L'ovation durant de longues minutes adressée à Rostropovitch salue non seulement l'interprétation si saisissante de la symphonie, mais plus globalement un artiste dont la vie même, liée à la musique, s'est inscrite dans le sillage de Chostakovitch.




    Salle Pleyel, Paris
    Le 15/11/2006
    Michel LE NAOUR

    Concert de l'Orchestre de Paris sous la direction de Mstislav Rostropovitch avec la participation de la violoncelliste Tatjana Vassilieva à la salle Pleyel, Paris.
    Dimitri Chostakovitch (1906-1975)
    Concerto pour violoncelle et orchestre n° 1 en mib majeur op. 107 (1959)
    Tatjana Vassilieva, violoncelle

    Symphonie n° 8 en ut mineur op. 65 (1943)

    Orchestre de Paris
    direction : Mstislav Rostropovitch

     


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