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CRITIQUES DE CONCERTS 19 mars 2024

Récital de la mezzo-soprano Magdalena Kožená accompagnée par Il Giardino Armonico sous la direction de Giovanni Antonini au Théâtre des Champs-Élysées, Paris.

Jamais Kožená ne varie
© David Port

D'emblée star, Magdalena Kožená a tout pour elle, que ce soit le physique, la longueur de la voix, la qualité, l'égalité du timbre, la virtuosité et l'ardeur. Lui manque pourtant une qualité essentielle pour être une grande mozartienne, l'art de la caractérisation. Plus endiablé que jamais, Il Giardino Armonico n'a donc pas tardé à lui voler la vedette.
 

Théâtre des Champs-Élysées, Paris
Le 15/12/2006
Mehdi MAHDAVI
 



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  • Peu d'ascensions ont été aussi fulgurantes que celle de Magdalena Kožená, pour ainsi dire star avant ses débuts. En à peine dix années de carrière, la belle mezzo tchèque n'a-t-elle pas enregistré plus de disques qu'elle n'a chanté de rôles à la scène ? Il est vrai que la nature lui a fait don d'un instrument aussi somptueusement phonogénique que singulier : associé à une étendue, mais surtout une tessiture d'une longueur phénoménale, couverte avec une ampleur, une plénitude, un aplomb stupéfiants, ce timbre à la fois crémeux et vigoureux, raffiné et barbare, sombre et lumineux, lui permet tout, du soprano au contralto.

    Le paradoxe veut pourtant que ces qualités antagonistes soient à double tranchant. Car aussi enivrante soit-elle, cette voix se révèle limitée sur le plan de la dynamique et de la coloration. D'autant que l'art ne prend pas toujours le relais de la nature. Non que la technique soit inaboutie – la vocalisation est même d'une netteté, d'un abattage renversants –, mais le son ne semble pas systématiquement nourri, jamais vibrant sur toute sa valeur. Non plus que le chant soit inexpressif – il l'est peut-être même trop, tant la blonde mezzo s'applique, parfois jusqu'à l'ostentation, à sacrifier la ligne au profit du mot, surarticulant des voyelles si peu idiomatiques –, mais il lui manque cette variété qui permet une authentique caractérisation, ce qui, dans Mozart, peut s'avérer rédhibitoire.

    Passés au filtre de Magdalena Kožená, les traits subtils de Vitellia, Susanna, Cherubino et Fiordiligi se confondent en effet en une figure qui semble n'aspirer qu'à régler ses comptes avec la terre entière, sans parler d'un port totalement dénué de noblesse, accusé par une silhouette de top model. Si les écarts en sont habilement négociés, malgré des graves inutilement ogresques, Non più di fiori renie toute féminité, dans un style agressivement déclamatoire qui ne libère à aucun moment ces phrases qui pourtant coulent de source. Aucune brise ne saurait non plus troubler un Deh vieni non tardar au phrasé univoque, mais enfin restitué à une couleur qu'on ose croire plus proche de la créatrice Nancy Storace, dont la voix n'avait vraisemblablement rien à voir avec les insupportables têtes d'épingle qui sévissent le plus souvent dans le rôle.

    Quant au frémissement adolescent de Non so più cosa son, il se confond avec un élan guerrier, et toujours en voix de Suzanne, qui était la voix de Vitellia, cette même voix, ce même caractère, surtout, que la mezzo – typologie aussi réductrice qu'inappropriée s'agissant de Mozart – prête à Fiordiligi, puis en bis à Despina, sans parvenir à convaincre qu'elle peut être autre que Dorabella.

    Malgré une dynamique assouplie, Sesto n'est guère moins générique d'expression, mais Kožená y trouve enfin son emploi naturel de jeune premier d'opera seria, transi et manipulé, aussi menaçant qu'implorant dans son chantage affectif : l'accent s'y fait justement désespéré et vindicatif. Et les vocalises conclusives de Parto, parto sont décidément sans concurrence par la netteté et l'égalité du timbre, jusqu'à des si bémol radieux.

    La leçon de chant n'en est pas moins prodiguée par la clarinette de basset de Tindaro Capuano, tout aussi souple dans l'obbligato de cor de basset de l'air de Vitellia, à l'instar d'un Giardino Armonico qui n'est heureusement pas là que pour faire du remplissage entre deux airs. Osons même dire que les interventions purement instrumentales de l'ensemble italien constituaient le principal attrait de ce concert. À la gestique chorégraphique de Giovanni Antonini répondent en effet une sonorité fruitée, une dynamique contrastée jusqu'à l'exubérance, une virtuosité échevelée, et des phrasés diablement sensuels qui atteignent leur apogée dans la 4e symphonie de Luigi Boccherini, qui n'aura jamais autant mérité son sous-titre de la Casa del diavolo.




    Théâtre des Champs-Élysées, Paris
    Le 15/12/2006
    Mehdi MAHDAVI

    Récital de la mezzo-soprano Magdalena Kožená accompagnée par Il Giardino Armonico sous la direction de Giovanni Antonini au Théâtre des Champs-Élysées, Paris.
    Wolfgang Amadeus Mozart (1756-1791)
    Mitridate, rè di Ponto, ouverture KV 87
    Non più di fiori, air de Vitellia extrait de la Clemenza di Tito (1791)
    Giunse al fine il momenti
    Deh vieni
    , récitatif et air de Suzanne, extrait des Nozze di Figaro (1786)
    Non so più, air de Cherubino, extrait des Nozze di Figaro

    Luigi Boccherini (1743-1805)
    Sinfonia op. XII n° 4 en ré mineur « La Casa del diavolo Â» (1771)

    Ei parte
    Per pietà
    , récitatif et air de Fiordiligi extrait de Così fan tutte (1790)

    Carl Philipp Emanuel Bach (1714-1788)
    Symphonie en fa majeur W. 183/3 (1775/6)

    Deh per questo, Parto, parto, airs de Sesto extraits de la Clemenza di Tito

    Magdalena Kožená, mezzo-soprano

    Il Giardino Armonico
    direction : Giovanni Antonini

     


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