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CRITIQUES DE CONCERTS 19 avril 2024

Der Tag des Gerichts de Telemann sous la direction de David Stern au Théâtre des Champs-Élysées, Paris.

Un Jugement enflammé
© Johann Grimm

Compositeur le plus apprécié de son temps, et admiré de Bach, Telemann a pourtant été jugé trop prolifique pour échapper à un certain mépris de la postérité. Il n'en eut pas moins, au soir de sa vie, quelques fulgurances, parmi lesquelles ce Jugement dernier, défendu avec ardeur par David Stern et son étonnant ensemble Opera Fuoco.
 

Théâtre des Champs-Élysées, Paris
Le 15/03/2007
Mehdi MAHDAVI
 



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  • Ensemble a-t-il jamais mieux portĂ© son nom qu'Opera Fuoco, crĂ©Ă© en 2003 par le chef d'orchestre David Stern et le violiste Jay Bernfeld ? Avec deux superbes enregistrements haendĂ©liens Ă  son actif, ce jeune orchestre jouant sur instruments d'Ă©poque a en effet su s'imposer dans le paysage musical grâce Ă  une approche originale des rĂ©pertoires baroque et classique, fuyant tout dogme au profit de la puissance dramatique et expressive des oeuvres abordĂ©es. Le travail sur le texte et les rĂ©citatifs est donc au coeur de cette dĂ©marche, dont le but est d'exalter l'intensitĂ© théâtrale du chant.

    Der Tag des Gerichts (le Jugement dernier) s'avère à cet égard un terrain idéal pour David Stern et ses troupes. Composé en 1762 par un Telemann âgé de 81 ans, ce poème chanté en quatre contemplations, sur un texte de Christian Wilhelm Alers, frappe en effet par sa concision et sa violence, à travers lesquelles le baroque semble vouloir tendre la main au Sturm und Drang. À une écriture orchestrale contrastée, du frémissant silence à l'explosion cuivrée, souvent audacieuse, et plus d'une fois surprenante, répond une vocalité heurtée, déclamatoire, aussi périlleuse que peu gratifiante, extrêmement exigeante pour les interprètes, même les mieux rompus à ce répertoire.

    Si la basse de Raimund Nolde paraît accidentée et peu endurante dès le premier récitatif de l'Incroyance, le baryton somptueusement timbré de Markus Werba impressionne par la vélocité d'une déclamation apocalyptique, dans une relation proprement hallucinée des signes de la dévastation, tandis que le mezzo infini d'Ann Hallenberg, puissant alliage d'ardent métal et de velours hypnotique, confère à la Raison une cinglante autorité.

    Désormais contraint de composer avec une voix inégale, sans doute le fruit d'un appétit insatiable pour les expériences les plus diverses, et les plus inattendues, Paul Agnew, dont les récents débuts de chef n'ont fait que confirmer le sens infaillible de la ligne et de la couleur dans un programme Vivaldi renouant avec les plus belles heures des Arts Florissants, n'en apparaît que plus éloquent, dans la véhémente expression de la raillerie comme dans la félicité. Et la voix de Chantal Santon, remplaçant Lisa Larsson au pied levé, s'élève avec grâce et douceur, mais non sans chair, juvénile expression de la Foi.

    Mais si tous parviennent à transcender un poème dont la clarté n'est pas la principale qualité, c'est que le geste généreux de David Stern embrasse, et embrase, le dernier oratorio de Telemann avec un sens théâtral stupéfiant, contrebalancé par les interventions poétiques de la viole de Jay Bernfeld dans l'ultime contemplation. Surtout, le chef américain parvient à obtenir d'un choeur aux fortes individualités, et plus encore d'un orchestre en effectif particulièrement restreint une densité inespérée, créant des images sonores proprement terrifiantes, notamment dans les deuxième et troisième contemplations.

    Défendu avec une telle incandescence, Der Tag des Gerichts se hisse incontestablement parmi les chefs-d'oeuvre de l'oratorio, et ménage à Telemann une place méritée aux côtés de Bach et Haendel dans la Sainte Trinité de la musique baroque allemande.




    Théâtre des Champs-Élysées, Paris
    Le 15/03/2007
    Mehdi MAHDAVI

    Der Tag des Gerichts de Telemann sous la direction de David Stern au Théâtre des Champs-Élysées, Paris.
    Georg Philipp Telemann (1681-1767)
    Der Tag des Gerichts, poème chanté en quatre contemplations (1762)
    Texte du Pasteur Christian Wilhelms Alers

    Chantal Santon (soprano)
    Ann Hallenberg (mezzo-soprano)
    Paul Agnew (ténor)
    Markus Werba (baryton)
    Raimund Nolte (baryton-basse)

    Choeur et Orchestre Opera Fuoco
    viole de gambe et co-direction artistique : Jay Bernfeld
    direction : David Stern

     


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