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CRITIQUES DE CONCERTS |
07 octobre 2024 |
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Récital du pianiste François Dumont dans le cadre des Rendez-vous de Rochebonne 2007.
Une entrée remarquée
Pour leur troisième édition, les Rendez-vous de Rochebonne offrent un récital Scarlatti-Ravel-Moussorgski à un jeune lauréat du Concours Reine Elisabeth. Une entrée remarquée pour François Dumont dans le paysage pianistique français, avec notamment d'impressionnants et très architecturés Tableaux d'une exposition.
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Vieille église du Château de Rochebonne, Theizé-en-Beaujolais
Le 29/09/2007
Benjamin GRENARD
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À tout juste 22 ans, François Dumont promet de s'imposer comme un des futurs talents de l'école française de piano. Lauréat du Concours Reine-Elisabeth, le jeune homme fait déjà preuve d'une incroyable maturité et d'une personnalité bien définie.
Les deux sonates de Scarlatti qui ouvrent son récital l'imposent d'emblée comme un musicien très soucieux de la lisibilité sonore autant que de la fluidité du discours musical, au gré d'un style naturellement vif ou chantant. L'adaptation pour le piano respecte à la fois l'équilibre du clavecin tout en donnant une consistance judicieusement dosée, et le discours harmonique travaillé de Scarlatti sied parfaitement à un instrument dont la sonorité reste attachée à la période romantique.
Avec Gaspard de la nuit, François Dumont plonge plus loin encore dans l'intimité de son univers. Trouble transparence d'Ondine, jeu de lumière filtrée, le milieu marin est aussi celui du rêve où la relation à l'espace est différente, où le son lui-même finit par se dissoudre dans le silence, à l'image de l'ultime accord tenu jusqu'à la dernière limite.
Après la dissolution du son et de l'espace, c'est au tour du temps d'être aboli dans le Gibet : malgré un balancement omniprésent et obstiné, une suspension temporelle est l'occasion d'une exploration subtile et délicate. En somme, notre pianiste fait siennes ces véritables peintures dans la lignée de la sensibilité spécifiquement française. Seul Scarbo, partie la plus fantasque de la pièce, captive moins malgré une volubilité et des flamboiements bien assumés.
Après le symbolisme français, place au réalisme russe dans une pièce bien trop rare au concert sous sa forme pianistique primitive : les Tableaux d'une exposition de Moussorgski. François Dumont, par un sens inné du timbre, prouve que l'orchestration, si elle est clairement sous-entendue, n'est pas nécessaire pour que le génie du cycle s'impose : le jeune Français s'approprie ce grand chef-d'oeuvre pianistique avec un goût affirmé pour la description sonore et une virtuosité qui force le respect, en dépit de petites scories.
Manquerait à cette vision un engagement dramaturgique plus prononcé, car dans la lignée du grand réalisme russe, ce qui intéresse Moussorgski est moins la description et l'illustration clinique que l'impact de chaque scène combiné dans un grand tableau dramatique unitaire. Hormis quelques réserves sur une Promenade quelquefois subitement hâtive et quelques transitions encore imparfaites – la grande montée menant à la Porte de Kiev –, cette prestation installe le pianiste dans le paysage français avec éclat, qu'en parfait architecte des blocs sonores, il traduit magnifiquement dans le finale de ces Tableaux mémorables.
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Vieille église du Château de Rochebonne, Theizé-en-Beaujolais Le 29/09/2007 Benjamin GRENARD |
| Récital du pianiste François Dumont dans le cadre des Rendez-vous de Rochebonne 2007. | Domenico Scarlatti (1685-1757)
Sonate en mi majeur K 162
Sonate en ré majeur K 141
Maurice Ravel (1875-1937)
Gaspard de la nuit (1908)
Modeste Moussorgski (1839-1881)
Tableaux d'une exposition (1874)
François Dumont, piano | |
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