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CRITIQUES DE CONCERTS 26 avril 2024

Reprise d'Alcina de Haendel dans la mise en scène de Robert Carsen, sous la direction de Jean-Christophe Spinosi à l'Opéra de Paris.

Une Alcina désenchantée
© Eric Mahoudeau

Parmi les mises en scène réalisées à l'Opéra de Paris par Robert Carsen, cette Alcina est sans doute la plus discutable. D'autant qu'en la réduisant à sa seule direction d'acteurs, la grève des techniciens – désormais terminée – en soulignait le caractère boulevardier. En dépit des débuts approximatifs de l'Ensemble Matheus dans la fosse de Garnier, la distribution réserve de beaux moments.
 

Palais Garnier, Paris
Le 13/12/2007
Mehdi MAHDAVI
 



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  • Lorsque Robert Carsen assurait les productions haute couture de l'OpĂ©ra de Paris, Hugues Gall avait fait de RenĂ©e Fleming sa glamoureuse Ă©gĂ©rie. Et sans doute est-ce la soprano amĂ©ricaine qui lui inspira cette Alcina grande bourgeoise traĂ®nant son ennui langoureux parmi une myriade d'Ă©phèbes plus ou moins nus dans une enfilade d'appartements immaculĂ©s, sans magie ni fureur. La personnalitĂ© de Natalie Dessay n'Ă©tait certainement pas non plus Ă©trangère Ă  la mĂ©tamorphose de Morgana, soeur d'Alcina, en soubrette nymphomane, minijupe et talons aiguilles.

    L'appropriation semblerait réductrice si elle n'était rééchantée par la révélation d'infinies perspectives ouvrant sur un jardin luxuriant, et d'ensorcelants jeux d'ombres. Mais lorsque la grève s'en mêle, et que la mise en scène se trouve privée de ces effets, et réduite à sa seule direction d'acteurs, le masque d'habile décorateur de Carsen tombe : ne reste plus qu'un vaudeville bien ordinaire, querelles de domestiques et imbroglios amoureux, que l'inévitable suicide final teinte de tragédie, en un détournement arbitraire de la partition rendu obligatoire par souci de crédibilité dramaturgique. En somme, rien de neuf sur le théâtre.

    Le désenchantement gagne aussi la fosse, où officie la baguette bien peu magique de Jean-Christophe Spinosi – le chef français se démène pourtant, s'octroyant l'obbligato de violon de l'air Ama, sospira, jusqu'à obtenir un beau succès personnel. Car enfin, l'absence récurrente de pulsation met en danger le plateau comme l'orchestre, qui va jusqu'à s'interrompre à une ou deux reprises, la dynamique reprend la recette qui fit la gloire de l'ensemble Matheus dans Vivaldi – introductions nerveuses, forte, accompagnements pianissimo, à la limite de l'inaudible, et d'une cohésion toute relative. Et puis ces accents arbitraires dès l'ouverture, ces basses rachitiques, ce théorbe en roue libre – est-ce vraiment le fait de l'enthousiasme, de la fraîcheur ?

    © Éric Mahoudeau

    Au plateau donc, de sauver la mise. Rescapée de la précédente reprise, dont elle n'était pas l'élément le moins discutable, Vesselina Kasarova fait un Ruggerio aussi inégal que ces registres entre lesquels elle ne cesse de jongler, et qui ne semblent pas sortir d'un seul et même gosier tant ces graves pachydermiques contredisent ce médium et ces aigus concentrés et lumineux, indurés les soirs de petite forme. Reste que la manière assez irrésistiblement ludique avec laquelle la mezzo bulgare sculpte les sons s'accorde parfaitement aux fanfaronnades que sont les deux premières airs de Ruggiero, que l'agilité peut être encore électrisante, et la ligne de Mi lusinga il dolce affetto tisse sa dentelle cousue de fils d'or entre deux sauts chaotiques.

    Succédant à l'Alcina d'Emma Bell pour les cinq dernières représentations, Inga Kalna en est l'exact antagoniste. Autant la soprano britannique exhibait, non sans force dramatique, les opalescences d'une voix naturellement ample et longue mais insuffisamment ductile, autant la lettone déploie un art constamment varié de la rhétorique expressive et ornementale, d'une voix pas toujours égale – le tranchant de l'aigu ne révèle-t-il pas la véritable nature de la magicienne –, mais infiniment colorée.

    Pulpeuse et agile, lumineuse et corsée, et de phrasés si délicieusement conduits, Olga Pasichnyk est une Morgana de rêve. Peut-être moins à l'aise qu'à Poissy avec Alan Curtis, et la colorature toujours gargarisante, Sonia Prina n'en trouve pas moins en Bradamante l'un de ses meilleurs rôles. Et pour compléter, trois jeunes français prometteurs: un Oberto – Judith Gauthier – suffisamment boyish, avec ce que cela peut sous-entendre de verdeur, un Oronte – Xavier Mas – au timbre si duveteux que la vocalise s'y nivelle à force de legato, et un Melisso – François Lis – autoritaire de timbre dans les récitatifs, mais trop raide encore pour Pensa a chi geme.




    Palais Garnier, Paris
    Le 13/12/2007
    Mehdi MAHDAVI

    Reprise d'Alcina de Haendel dans la mise en scène de Robert Carsen, sous la direction de Jean-Christophe Spinosi à l'Opéra de Paris.
    Georg Friedrich Haendel (1685-1759)
    Alcina, opera seria en trois actes (1735)
    Livret d'après Orlando furioso de l'Arioste

    Choeur de l'Opéra national de Paris
    Ensemble Matheus
    direction musicale : Jean-Christophe Spinosi
    mise en scène : Robert Carsen
    décors et costumes : Tobias Hoheisel
    lumières : Jean Kalman
    dramaturgie : Ian Burton

    Avec :
    Emma Bell (28/11) / Inga Kalna (13/12) (Alcina), Vesselina Kasarova (Ruggiero), Olga Pasichnyk (Morgana), Sonia Prina (Bradamante), Xavier Mas (Oronte), François Lis (Melisso), Judith Gauthier (Oberto).

     


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