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CRITIQUES DE CONCERTS 29 mars 2024

Concert de l'Orchestre philharmonique de Radio France sous la direction de Myung-Whun Chung, avec la participation du pianiste Roger Muraro à la salle Pleyel, Paris.

Éclairs en deçà
© Vivianne / DGG

Éclairs sur l'au-delà, la dernière pièce orchestrale d'Olivier Messiaen, n'avait pas été jouée à Paris depuis plus de dix ans. Bien qu'interprétée par un Orchestre Philharmonique de Radio France et un Myung-Whun Chung des très grands jours, l'oeuvre déçoit franchement tant le compositeur semble y épuiser les techniques habituelles de son langage.
 

Salle Pleyel, Paris
Le 11/04/2008
Laurent VILAREM
 



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  • Olivier Messiaen décrivait le 17e concerto pour piano comme « l'un des plus beaux écrits par Mozart, un des plus variés, des plus contrastés Â». Aussi n'est-il pas surprenant de le retrouver au programme de l'une des soirées du grand cycle que l'Orchestre philharmonique de Radio France consacre toute l'année 2008 à Olivier Messiaen pour le centenaire de sa naissance. Et en effet, s'il ne les préfigure, on peut y trouver en les cherchant des éléments du langage du maître français, notamment une manière de séquencer les épisodes, de mêler avec agilité rythmes et sentiments extrêmes ou encore une façon de trancher les timbres, ainsi des bassons et des cuivres qui brusquent le discours dans l'Allegretto final.

    Ce sentiment est sans doute renforcé par l'interprétation du pianiste Roger Muraro, que l'on peut à bon droit considérer comme le plus grand interprète de l'auteur des Vingt regards sur l'enfant Jésus. Son toucher cristallin, sa manière de détacher les notes sont une vision originale de Mozart, à la fois enfantine et mélancolique, qui aurait eu davantage de corps si l'accompagnement du Philhar' avait montré davantage de rondeur et de grâce.

    Toutefois, l'événement de la soirée réside dans l'exécution des Éclairs sur l'au-delà de Messiaen, qui n'avaient pas été redonnés depuis leur création française en 1993, déjà par Myung-Whun Chung. On s'interroge de cette absence : est-ce à dire que cette oeuvre, créée pourtant par le New York Philharmonic six mois après la mort du compositeur, est mineure dans sa production ? Osons l'affirmative et tâchons d'en expliquer les raisons !

    Dès l'Apparition du Christ glorieux, première section d'une pièce qui en compte onze, Messiaen semble jeter une oreille rétrospective vers l'Ascension, un de ses premiers opus. On retrouvera ainsi un choral de cuivres, puis deux mouvements lents qui reprennent la même instrumentation – violons, violoncelles, altos. Une manière, soixante après, de boucler la boucle ?

    Assurément, l'oeuvre est mieux structurée et fait de son hétérogénéité le sujet même de son discours, mais pèche par une volonté globalisante trop appuyée. Car on y trouve beaucoup de musiques différentes : ici des échos sériels, là la simplicité d'un Arvo Pärt, là encore une orchestration en technicolor, avec trombones et gongs fatidiques, qu'un souffle brucknérien éloigne seul de la musique de film.

    Coutures visibles et matériau sans surprises

    De même, Messiaen manifeste la volonté de créer des atmosphères très contrastées – ainsi au charivari d'oiseaux notés hors-tempo des Élus marqués du sceau répond la douceur angélique de Demeurer dans l'amour, ainsi à la crainte menaçante des Sept anges aux sept trompettes succède immédiatement la caresse de Et dieu essuya toute larme de leurs yeux – qui entraîne une narration musicale dont on verrait les coutures et étire en longueur un matériau finalement sans surprises, surtout en regard de l'oeuvre antérieure de Messiaen.

    Davantage, cette manière de trancher de façon si volontaire les timbres, de traiter chaque mouvement à la manière d'un concerto pour orchestre distingue certes, pareille à celle d'un grand chef cuisinier, la saveur de chaque mélange sonore, mais est aggravé ici par le fait que chaque pupitre est chargé d'une signification particulière : flûtes-oiseaux, percussions-astres, trombones annonciateurs, cordes angéliques, qui alourdit l'oeuvre d'une typologie presque grossière. Il manque à ces Éclairs un soliste comme dans la Turangalilâ pour faire respirer et contrebalancer ce rapport à la globalité. Et combien plus étonnants et plus percutants étaient les alliages sonores de Des canyons aux étoiles !

    Peut-être devrons-nous attendre dix années encore pour pouvoir réentendre ces Éclairs sur l'au-delà et en vérifier la maturation. L'interprétation ce soir n'est pas en cause : trombones vaillants, vents et bois splendidement artistes, cordes soudain soyeuses – pour un sublime Demeurer dans l'amour, qui laisse à penser d'ailleurs, par sa façon de répandre sa consolation entre les silences que la meilleure façon de demeurer dans l'amour est justement de le considérer sur le point de disparaître –, et un chef qui sait comme personne transcender l'esprit et la lettre de cette partition, car qu'on se le dise, l'Orchestre philharmonique de Radio France est capable, dans certains répertoires, d'atteindre un niveau tout à fait inattendu.


    Olivier Messiaen décrivait le 17e concerto pour piano comme « l'un des plus beaux écrits par Mozart, un des plus variés, des plus contrastés Â». Aussi n'est-il pas surprenant de le retrouver au programme de l'une des soirées du grand cycle que l'Orchestre philharmonique de Radio France consacre toute l'année 2008 à Olivier Messiaen pour le centenaire de sa naissance. Et en effet, s'il ne les préfigure, on peut y trouver en les cherchant des éléments du langage du maître français, notamment une manière de séquencer les épisodes, de mêler avec agilité rythmes et sentiments extrêmes ou encore une façon de trancher les timbres, ainsi des bassons et des cuivres qui brusquent le discours dans l'Allegretto final.

    Ce sentiment est sans doute renforcé par l'interprétation du pianiste Roger Muraro, que l'on peut à bon droit considérer comme le plus grand interprète de l'auteur des Vingt regards sur l'enfant Jésus. Son toucher cristallin, sa manière de détacher les notes sont une vision originale de Mozart, à la fois enfantine et mélancolique, qui aurait eu davantage de corps si l'accompagnement du Philhar' avait montré davantage de rondeur et de grâce.

    Toutefois, l'événement de la soirée réside dans l'exécution des Éclairs sur l'au-delà de Messiaen, qui n'avaient pas été redonnés depuis leur création française en 1993, déjà par Myung-Whun Chung. On s'interroge de cette absence : est-ce à dire que cette oeuvre, créée pourtant par le New York Philharmonic six mois après la mort du compositeur, est mineure dans sa production ? Osons l'affirmative et tâchons d'en expliquer les raisons !

    Dès l'Apparition du Christ glorieux, première section d'une pièce qui en compte onze, Messiaen semble jeter une oreille rétrospective vers l'Ascension, un de ses premiers opus. On retrouvera ainsi un choral de cuivres, puis deux mouvements lents qui reprennent la même instrumentation – violons, violoncelles, altos. Une manière, soixante après, de boucler la boucle ?

    Assurément, l'oeuvre est mieux structurée et fait de son hétérogénéité le sujet même de son discours, mais pèche par une volonté globalisante trop appuyée. Car on y trouve beaucoup de musiques différentes : ici des échos sériels, là la simplicité d'un Arvo Pärt, là encore une orchestration en technicolor, avec trombones et gongs fatidiques, qu'un souffle brucknérien éloigne seul de la musique de film.

    Coutures visibles et matériau sans surprises

    De même, Messiaen manifeste la volonté de créer des atmosphères très contrastées – ainsi au charivari d'oiseaux notés hors-tempo des Élus marqués du sceau répond la douceur angélique de Demeurer dans l'amour, ainsi à la crainte menaçante des Sept anges aux sept trompettes succède immédiatement la caresse de Et dieu essuya toute larme de leurs yeux – qui entraîne une narration musicale dont on verrait les coutures et étire en longueur un matériau finalement sans surprises, surtout en regard de l'oeuvre antérieure de Messiaen.

    Davantage, cette manière de trancher de façon si volontaire les timbres, de traiter chaque mouvement à la manière d'un concerto pour orchestre distingue certes, pareille à celle d'un grand chef cuisinier, la saveur de chaque mélange sonore, mais est aggravé ici par le fait que chaque pupitre est chargé d'une signification particulière : flûtes-oiseaux, percussions-astres, trombones annonciateurs, cordes angéliques, qui alourdit l'oeuvre d'une typologie presque grossière. Il manque à ces Éclairs un soliste comme dans la Turangalilâ pour faire respirer et contrebalancer ce rapport à la globalité. Et combien plus étonnants et plus percutants étaient les alliages sonores de Des canyons aux étoiles !

    Peut-être devrons-nous attendre dix années encore pour pouvoir réentendre ces Éclairs sur l'au-delà et en vérifier la maturation. L'interprétation ce soir n'est pas en cause : trombones vaillants, vents et bois splendidement artistes, cordes soudain soyeuses – pour un sublime Demeurer dans l'amour, qui laisse à penser d'ailleurs, par sa façon de répandre sa consolation entre les silences que la meilleure façon de demeurer dans l'amour est justement de le considérer sur le point de disparaître –, et un chef qui sait comme personne transcender l'esprit et la lettre de cette partition, car qu'on se le dise, l'Orchestre philharmonique de Radio France est capable, dans certains répertoires, d'atteindre un niveau tout à fait inattendu.




    Salle Pleyel, Paris
    Le 11/04/2008
    Laurent VILAREM

    Concert de l'Orchestre philharmonique de Radio France sous la direction de Myung-Whun Chung, avec la participation du pianiste Roger Muraro à la salle Pleyel, Paris.
    Wolfgang Amadeus Mozart (1756-1791)
    Concerto pour piano et orchestre n° 17 en sol majeur, K. 453
    Roger Muraro, piano

    Olivier Messiaen (1908-1992)
    Éclairs sur l'au-delà

    Orchestre Philharmonique de Radio France
    direction : Myung-Whun Chung

     


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