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CRITIQUES DE CONCERTS |
05 octobre 2024 |
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Concert de l’Orchestre symphonique de Londres sous la direction de Bernard Haitink à la salle Pleyel, Paris.
Noblesse souveraine
Bernard Haitink a toujours privilégié la simplicité de ton. Son sens musical s’est conforté au fil du temps, privilégiant une forme d’aristocratie de la direction d’orchestre sans concession. À la tête du LSO, salle Pleyel, il prouve une nouvelle fois dans Mozart et Richard Strauss que la maîtrise, même sans surprise, vaut mieux que les débordements extatiques.
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Héritier de Ferdinand Leitner et de Paul van Kempen auquel il succédera comme directeur musical de l’Orchestre du Concertgebouw d’Amsterdam en 1961 à l’âge de 32 ans, Bernard Haitink est véritablement un chef à l’ancienne qui, en forgeant, est devenu forgeron. Loin de « l’artisanat furieux » dont parle René Char, il présente davantage le profil de ces compagnons du Moyen Âge qui, à l’issue de leur périple professionnel, réussissaient leur chef-d’œuvre et, par là -même, étaient adoubés par leurs pairs.
Avec l’Orchestre symphonique de Londres – une phalange qu’il connaît parfaitement – le chef néerlandais peut obtenir ce qu’il veut à la fois au niveau de la malléabilité et de l’adaptation. L’engagement des musiciens est visible à l’œil nu et leur implication permanente – observer les violons en action est, à cet égard, instructif.
Dès la 25e symphonie en sol mineur écrite par un Mozart de 17 ans, l’économie de moyens, la juvénilité de l’interprétation sans emphase, la simplicité dans l’énonciation emportent l’adhésion. Aucune recherche d’originalité dans cette manière toute classique – hormis un léger rubato du hautbois dans l’Allegro con brio initial – imprégnée de science orchestrale.
La musique de Richard Strauss a toujours convenu à Haitink aussi bien au disque qu’au concert. Le poème symphonique Don Juan a fière allure sous cette direction claire, précise et économe de geste, ménageant une progression où le lyrisme le dispute à la noblesse. La vaste fresque épique d’Une vie de héros est d’un hédonisme sonore jamais narcissique et les interventions du violon solo – illustrant la femme du héros –, se présentent comme un véritable concerto offert avec une fougue et une aisance d’intonation remarquables.
Vision pure s’il en est d’une ivresse toujours disciplinée y compris dans la récapitulation conclusive où Strauss regroupe « les œuvres acquises du héros » en un maelström restitué par Haitink avec une fluidité éblouissante. Le surhomme nietzschéen aux prises avec ses ennemis n’est pas, comme chez Karajan, le chef d’orchestre lui-même mais un serviteur qui s’efface pour laisser la place à la musique seule.
On pourra objecter qu’une telle maîtrise interdit toute fantaisie et que le London Symphony Orchestra n’a pas la patine d’or, de cuivre et d’argent des grandes phalanges d’Europe Centrale. Pourtant, seul le résultat compte : le chef et ses musiciens font corps pour nous délivrer non pas un message subliminal, mais une leçon d’humanité.
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Salle Pleyel, Paris Le 19/06/2008 Michel LE NAOUR |
| Concert de l’Orchestre symphonique de Londres sous la direction de Bernard Haitink à la salle Pleyel, Paris. | Wolfgang Amadeus Mozart (1756-1791)
Symphonie n° 25 en sol mineur K. 183 (1773-1774)
Richard Strauss (1864-1949)
Don Juan, op. 20 (1888)
Ein Heldenleben, op. 40 (1899)
London Symphony Orchestra
direction : Bernard Haitink | |
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