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CRITIQUES DE CONCERTS |
11 octobre 2024 |
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Nouvelle production de Fra Diavolo d’Auber mise en scène par Jérôme Deschamps et sous la direction de Jérémie Rhorer à l’Opéra Comique, Paris.
Auber sur les rails
Sumi Jo (Zerline)
Auber est une station de métro. Elle porte le nom d’un brillant chef de file de la musique française du XIXe. Bien oublié, Daniel-François-Esprit Auber est réhabilité par Jérôme Deschamps. Il raconte les aventures rocambolesques d’un bandit, Fra Diavolo. Cet opéra, joué plus de 900 fois en son siècle, fut l’un des grands titres à succès de l’Opéra Comique.
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Ce n’était pas la même salle, mais peu importe, Auber revient à l’Opéra Comique avec Fra Diavolo. Quand on évoque l’opéra français au XIXe siècle émergent Berlioz, Bizet, Gounod. Mais l’école française était encore plus riche. Auber fut considéré comme l’un des meilleurs. Il le demeure. Travail bien ciselé, sa partition de Fra Diavolo est un petit bijou mélodique, une bulle de savon.
Il est vrai qu’elle est servie avec délicatesse, finesse et légèreté par un petit génie de la baguette, consacré révélation musicale de 2008 par la critique : Jérémie Rhorer (36 ans). Pas de grandes émotions dans cette partition : elle ne distille que du charme, de l’ironie, de la cocasserie.
L’histoire est celle d’un brigand magnifique comme on les aimait au XIXe, tel Zampa dont l’opéra éponyme de Hérold fut ressuscité l’an passé par William Christie dans ce même Opéra Comique. À croire décidément que la salle Favart devient un repaire de brigands ! Heurts, malheurs, enlèvements, dissimulations, lord anglais détroussé, belle ingénue que le père veut marier de force, gendarme beau gosse irrésistible, maréchaussée et coups de feu : tout cela fourmille de péripéties style BD ou roman d’aventures d’antan.
Dans sa mise en scène aux beaux décors mais sans doute trop sage et sans second degré, Jérôme Deschamps s’amuse. Mettre une tête de vache en matière de luminaire et des pieds de veau au lit de la belle Zerline ne suffit pas à provoquer l’hilarité. Une fois de plus, le formidable inventeur des Deschiens, devenu patron de l’Opéra Comique, n’ose plus aller de l‘avant, comme si son costume de directeur lui imposait de la réserve. Ses fans attendent qu’il déchaîne son talent incisif et provocateur dans des œuvres auxquelles il ne pourrait qu’insuffler de l’air frais.
Fra Diavolo permet aux chanteurs-acteurs des prestations succulentes. Dans la distribution de très haute tenue émergent trois chanteurs. Le ténor américain Kenneth Tarver, voix imposante dans un registre étonnamment large et interprétation pleine de malice, s’impose vocalement et dramatiquement : il roule des yeux avec un humour décapant.
La magnifique soprano Sumi Jo, si souvent qualifiée de rossignol mécanique, s’évertue dans de diaboliques vocalises : elle est naturelle, évanescente, magique. Elle habite son rôle. C’est là ce qui pourrait la réhabiliter pour des rôles plus charnus. Elle en vaut la peine. Parfois, les seconds rôles sont à l’opéra comme au cinéma essentiels, notamment ici celui de la mezzo Doris Lamprecht (Lady Pamela). Belle voix un peu acide, d’un comique léger et irrésistible, elle a l’intelligence du personnage.
Voici une soirée divertissante qu’on aurait aimée cependant un peu plus décapante.
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Opéra Comique - Salle Favart, Paris Le 25/01/2009 Nicole DUAULT |
| Nouvelle production de Fra Diavolo d’Auber mise en scène par Jérôme Deschamps et sous la direction de Jérémie Rhorer à l’Opéra Comique, Paris. | Daniel-François-Esprit Auber (1782-1871)
Fra Diavolo, ou l’hôtellerie de Terracine, opéra-comique en trois actes (1830)
Livret d’Eugène Scribe
Les Eléments
Le Cercle de l’Harmonie
direction : Jérémie Rhorer
mise en scène : Jérôme Deschamps
décor : Laurent Peduzzi
costumes : Thibaut Welchlin
préparation des chœurs : Joël Suhubiette
Avec :
Kenneth Tarver (Fra Diavolo), Sumi Jo (Zerline), Antonio Figueroa (Lorenzo), Doris Lamprecht (Lady Pamela), Marc Molomot (Lord Cockburn), Vincent Pavesi (Mathéo), Thomas Dolié (Giacomo), Thomas Morris (Beppo). | |
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