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CRITIQUES DE CONCERTS 09 décembre 2024

RĂ©cital de Fazil Say au Festival de Saint-Denis, France.

Fazil Say loupe une marche

Propulsé en France au rang de star par la grâce de la télévision, mais aussi d'emblée contesté, le pianiste Fazil Say a donné à Saint-Denis un récital confirmant plutôt ses défauts que ses qualités.
 

Pavillon de Musique de la LĂ©gion d'Honneur, Saint-Denis
Le 24/06/2000
GĂ©rard MANNONI
 



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  • Il ne suffit pas de s'agiter devant son clavier comme si l'on dansait chaque note pour ĂŞtre Katia Labèque, ni de chanter Ă  mi--voix chaque partition pour ĂŞtre Glenn Gould. Le petit ballet para- musical auquel se livre Fazil Say n'est pas seulement exaspĂ©rant et gĂŞnant, il dĂ©tourne visiblement le pianiste de l'essentiel : interprĂ©ter aussi avec les doigts. Certes, ces doigts sont d'une grande agilitĂ©, comme tous ceux de cette gĂ©nĂ©ration de virtuoses, et toutes les notes de la sonate de Liszt sont bien lĂ . Mais avons-nous pour autant entendu ladite sonate ? Fazil Say semble ignorer ce qu'est une construction d'ensemble. Ici, il joue au premier degrĂ© tous les aspects de l'Ă©criture lisztienne les uns après les autres, sans lien ni structure d'ensemble. Ce n'est pas la Sonate en si mineur mais un peu d'Au bord d'une source, suivi d'un peu de Mephisto valse suivi d'un peu d' Harmonies du soir, le tout bâti sur deux nuances principales, fortissimo et pianissimo, en un contraste permanent qui ravit l'auditoire par son impression de trou d'air et que Rubinstein avouait pratiquer parfois sciemment, pour dĂ©chaĂ®ner les applaudissements. Forte ou piano, le son reste dur, gĂ©nĂ©ralement plat et l'analyse de la partition très linĂ©aire. Quant aux sonates de Haydn et de Mozart qui occupaient la première partie du programme, elle n'ont bĂ©nĂ©ficiĂ© que d'un maniĂ©risme excessif, accentuĂ© par une prĂ©dilection pour les notes sautillĂ©es et toujours ces deux mĂŞmes nuances extrĂŞmes. MĂŞme la Marche turque fut Ă©crasĂ©e et malmenĂ©e, sans charme, sans cette fantaisie ni ces scintillements d'Enlèvement au SĂ©rail qui ont fait sa cĂ©lĂ©britĂ©. Il faut une très forte personnalitĂ© pour ne jouer que sur l'instinct, et un jeu beaucoup plus complet que celui que possède actuellement Fazil Say dans le domaine du phrasĂ©, de la recherche du son et de la construction des plans, pour mener une carrière au niveau de renommĂ©e oĂą des campagnes mĂ©diatiques bien orchestrĂ©es l'ont artificiellement placĂ©. Un bien mauvais service rendu Ă  un artiste qui vit sĂ»rement la musique avec intensitĂ©, mais ne dispose pas Ă  ce jour de tout ce qu'il faut pour le transmettre par le truchement d'un piano. Il n'est pas le premier Ă  vivre pareille mĂ©saventure !




    Pavillon de Musique de la LĂ©gion d'Honneur, Saint-Denis
    Le 24/06/2000
    GĂ©rard MANNONI

    RĂ©cital de Fazil Say au Festival de Saint-Denis, France.
    RĂ©cital Fazil Say, piano
    Oeuvres de Haydn, Mozart et Liszt

     


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